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Chez ces gens-là, on cause pas, on taxe !


La technocratie silencieuse, telle est désormais la qualification de ce gouvernement Akhannouch qui en est presque à mi-mandat. A mi-mandat et dans un mutisme presque parfait, confirmé par les quelques exceptions causantes de cette équipe. Pas de débat public, pas de conférences, pas d’explications politiques, de la technocratie et encore de la technocratie… et pourtant, entre le présent PLF, l’inflation qui reprend et les grands chantiers sociaux et sociétaux, il y aurait matière à parler, convaincre, mobiliser, fédérer, en vue de réaliser et délivrer.



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Par Aziz Boucetta

Souvenez-vous, nous sommes en 2021, la campagne électorale bat son plein et les chefs de partis et leurs futurs candidats battent la campagne et ratissent large, au cri unificateur de la protection de la classe moyenne et de l’élargissement des libertés ; le RNI remporte l’élection, forme sa majorité et constitue son gouvernement, jurant de prendre soin de la classe moyenne, de laquelle tous les bienfaits émanent. Las… cette classe moyenne, dans le présent PLF, semble être la laissée pour compte.

Le Maroc est sur tous les fronts sociaux, infrastructurels, économiques, entrepreneuriaux… il a donc besoin d’argent et, l’endettement n’étant ni une panacée ni même une solution, les contribuables devront mettre la main à la poche. Mais mettre la main à la poche est une chose, qu’on mette la main dans votre poche en est une autre, et c’est ce qui semble être le cas avec ce PLF. Et rien, pas de débat public, de responsables gouvernementaux face à des experts fiscaux et économiques pour expliquer ces augmentations de taxes sur des produits de première nécessité.

Oh certes, prises séparément, les augmentations de TVA ne sont pas rudes en elles-mêmes, mais c’est leur cumul qui cogne. Et pour l’exonération de la TVA sur les médicaments, il semblerait que cela soit un leurre car la TVA à l’achat, non récupérable, sera répercutée dans le prix du produit, qui augmentera en conséquence.

Alors, dans un contexte inflationniste qui ne se dément ni ne faiblit, ces réformes feront mal à bien des ménages qui, comme à l’accoutumée, s’adapteront, mais consommeront moins et se déclasseront plus. C’est la malédiction de la classe moyenne, proie facile de tous les gouvernements du monde en mal de financement.

Dans la pièce de théâtre le Diable Rouge, cette formule a été prêtée au cardinal Mazarin : « Il y a quantité de gens qui sont entre les deux, ni pauvres, ni riches… Des (gens) qui travaillent, rêvant d'être riches et redoutant d'être pauvres ! C'est ceux-là que nous devons taxer, encore plus, toujours plus ! Ceux-là ! Plus tu leur prends, plus ils travaillent pour compenser…c'est un réservoir inépuisable »....

La « réflexion » est intemporelle et universelle.

Or, ces réformes fiscales sont nécessaires, et l’Etat a besoin d’argent pour financer ses projets sociaux et réaliser les grandes orientations royales (protection universelle, reconstruction d’al Haouz, aides au logement, …). Et ces réformes passeront au parlement, où le gouvernement est fort confortablement soutenu par une large majorité votante et silencieuse… tellement silencieuse qu’elle en devient complice. Et l’opposition est tellement dépassée et écrasée qu’elle en devient accessoire, voire inutile. Il ne reste que le débat public, la confrontation avec des experts, des universitaires, des économistes, des journalistes...

 

Les questions et questionnements porteront sur l’objectif de ces augmentations, sur leur chiffrage, sur leur opportunité. Pourquoi augmenter la TVA sur des produits de consommation massive (eau, électricité…) ? Comment gérer la probable et prévisible hausse des prix de certains médicaments ? Comment contourner les aléas des préalables retenus, sur le prix de l’énergie, sur la production céréalière, sur le cours de change ?

Comment appliquer les recommandations du Nouveau modèle de développement avec une croissance étique de 3,5% du PIB, alors même que ce NMD préconise des taux dépassant les 5 ou 6% ? Pourquoi le gouvernement ne pense-t-il pas à une taxation exceptionnelle des grandes entreprises, et particulièrement les distributeurs d’hydrocarbures, sachant que durant l’été, le pays a connu cinq augmentations des prix des carburants en un mois et demi ? Quelle est la philosophie retenue pour la classe moyenne ?

Et aussi des questions sociétales… Quid du code pénal ? Les libertés individuelles seront-elles améliorées (une réponse par oui ou par non, mais une réponse) ? Où en est la réforme du code de la famille et quelle est l’orientation générale retenue ? Existe-t-il au sein du gouvernement une réflexion autour des Marocains du monde, suite au discours royal de 2022 ? Et l’Afrique, la coopération Sud-Sud ?

Certains ministres s’expriment et s’expliquent, mais ils sont rares. En cette période de discussion du PLF, on attend M. Akhannouch, Mme Fettah et M. Lekjaâ pour donner des indications sur leur politique, qui détermine notre pouvoir d’achat. Et on attend aussi le chef du gouvernement sur les chantiers sociétaux, tout aussi important que les finances ou les infrastructures. 

Mais au vu du silence quelque peu hautain opposé à toutes les critiques sur cette technocratie silencieuse, on peut d’ores et déjà prévoir que le PLF passera comme l’équipe Akhannouch le souhaite, qu’il n’y aura pas de débat et encore moins de combat, que le silence perdurera, et que la politique continuera d’agoniser, encore et encore. Chez ces gens-là, on ne cause pas, on taxe !

La gouvernance en silence tue la confiance. C’est le lot du Maroc, au moins jusqu’en 2026…

Rédigé par Aziz Boucetta sur Panorapost 



Vendredi 3 Novembre 2023


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