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A dos de mulet, Macron court après un pur-sang


Rédigé par le Mardi 28 Février 2023

Le président Macron veut « avancer » avec le Maroc, sauf qu’il peine à en délimiter les contours sur une carte géographique.



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Ainsi donc, le président français, Emmanuel Macron, a exprimé sa volonté « d’avancer avec le Maroc ».

Les accusations de corruption d’eurodéputés, d’oppression de la liberté d’expression et d’espionnage de son propre téléphone par le Maroc ne seraient que des « polémiques », qui ne doivent pas empêcher les deux pays d’avancer ensemble, et qu’il ne fallait pas « en rajouter ».

A voir la manière dont le président Macron réagit aux protestations de ses concitoyens, le déni de la réalité semble être un trait de caractère du personnage.

Appliquée aux relations avec le Maroc, qui a élargit le cercle de ses partenariats, cette approche a encore moins de chance de succès.

Bérézina en Afrique

Il est intéressant de noter que cette déclaration a été faite le 27 février, alors que le président Macron s’apprêtait à mener une tournée africaine qui devrait le mener au Gabon, au Congo, en République démocratique du Congo et en Angola.

Sur ces quatre pays africains, les deux derniers ne sont pas d’ex-colonies françaises, alors que le Gabon, qui en est une, a préféré rejoindre, en juillet 2022, le Commonwealth, qui regroupe les anciennes colonies britanniques. C’est la voie qui a été déjà suivie par le Rwanda, en 2009.

Nul besoin de rappeler que le Burkina Faso a demandé, en janvier de cette année, le départ des soldats français présents sur son territoire, rejoignant en cela le Mali et la Centrafrique, ou la présence militaire française a pris fin en 2022.

La Françafrique s’effiloche, donc, à vue d’œil, mais les décideurs politiques français ne parviennent pas à l’admettre, ce qui serait nécessaire pour procéder à une révision radicale de la nature des relations de Paris avec ses ex-colonies et protectorats sur le continent noir.

Faire-savoir sans savoir-faire

En Afrique du Nord, les choses sont encore plus difficiles pour la France. La nouvelle génération des décideurs politiques français, nés après les indépendances des pays africains, ignorent tout de la complexité des relations triangulaires, Paris-Rabat-Alger.

Plus soucieux de communication et des commentaires des médias que de mettre en œuvre une véritable politique africaine, en général, et maghrébine, en particulier, cette nouvelle génération de décideurs français multiplie les impairs, sans prendre conscience des conséquences à terme de son absence de vision stratégique.

Car le changement n’a pas concerné seulement le sommet de l’Etat en France, mais également celui des pays africains, ainsi que leurs économies et leurs sociétés.

Cela fait plus de deux décennies que la Chine s’est imposée comme un partenaire économique alternatif aux ex-puissances coloniales sur le continent, alors que la Russie commence à proposer les services de ses mercenaires de Wagner à tous les pays du Sahel victimes du terrorisme, qui estiment que les forces françaises se sont montrées inefficaces pour sécuriser et stabiliser la région.

Partenariats diversifiés

Le cas du Maroc, en Afrique du Nord, est encore plus déplaisant pour Paris. Un rapport, attribué aux services de renseignement allemand, publié fin 2021, met l’accent sur le développement rapide du royaume, dont les ambitions subsahariennes sont clairement affichées.

Ledit rapport souligne également le gap qui se creuse entre le Maroc et les autres pays du Maghreb, ce qui fait enrager les dirigeants algériens.

Sur le plan de ses relations extérieures, le Maroc s’est crée de nouvelles et prometteuses opportunités en renforçant ses liens avec les Etats-Unis et en développant ses fraîches relations avec Israël.

Avec la présidence Trump, le Maroc s’est assuré de la reconnaissance par les Etats-Unis de la marocanité du Sahara, que la présidence Biden n’a pas reniée.

Le rapprochement avec Israël est en train de se traduire, de son côté, par l’installation d’une industrie militaire qui renforce d’autant la souveraineté du royaume.

A courir deux lièvres…

Il n’y a pas que l’Algérie qui voit d’un mauvais œil le royaume consolider son poids politique, économique et militaire au Maghreb. La France est encore plus outrée de constater que son influence au Maroc a fondu comme neige au soleil.

En chevillant la reconnaissance de la marocanité du Sahara à la nature de ses relations avec les autres pays du monde, le Roi Mohammed VI a crée un autre problème encore à la France.

Il faut être équitable, la France n’a jamais soutenu le séparatisme polisarien. Mais Paris s’est toujours plu à ne pas clarifier officiellement sa position à ce sujet, de manière à ne pas vexer Alger.

Jouer sur les deux tableaux a longtemps servi les intérêts de la France, mais toute chose à une fin et cette confusion savamment entretenue par Paris concernant la marocanité du Sahara ne pouvait plus durer.

L’anguille marocaine

Plutôt que de reconnaître que les temps ont changé et qu’il va falloir se réadapter à la nouvelle réalité géopolitique au Maghreb, en effectuant des choix douloureux, certes, mais incontournables, les décideurs français se sont imaginés qu’ils pouvaient continuer à jouer aux plus malins.

Activer ses réseaux d’influence au parlement européen et multiplier les campagnes de dénigrement du Maroc a semblé à Paris une bonne approche afin de faire pression sur Rabat.

Une fois qu’il est devenu évident que cette démarche a surtout entraîné une levée de boucliers de la part des Marocains, les simples citoyens encore plus que les décideurs politiques, Paris s’est mise à chercher le moyen de faire machine arrière, tout en évitant de perdre la face.

Il est peu probable que le président Macron ait conscience à quel point il s’est montré pathétique, aux yeux de l’opinion publique marocaine, en essayant d’éluder la question du Sahara quand il a traité, dans son récent discours, des relations entre la France et le Maroc.

Miser sur un tocard

Pour avancer ensemble, la moindre des politesses est le respect mutuel. Comment la France peut-elle convaincre le Maroc d’un renforcement des relations bilatérales, tout en refusant de reconnaître officiellement la marocanité du Sahara ?

Quand à opter pour des relations plus solides avec l’Algérie, en sacrifiant celles avec le Maroc, la France a vite compris que traiter avec des psychopathes n’est jamais sans conséquences graves.

La France est, aujourd’hui, coincée, ne sachant comment réparer ses relations avec le Maroc sans se faire aboyer par les dirigeants algériens.

A Madrid, on se frotte les mains de satisfaction. L’ablation de la tumeur polisarienne s’est faite sans douleur. Place aux bonnes affaires avec le royaume chérifien.

A vouloir le beurre, « mais en même temps » l’argent du beurre, Paris risque fort de n’obtenir ni l’un, ni l’autre. 

Le président Macron peut toujours avancer, avec un général algérien portant le casque de garde républicain français à ses côtés. Mais il ne va pas manquer de se sentir bien seul.





Ahmed Naji
Journaliste par passion, donner du relief à l'information est mon chemin de croix. En savoir plus sur cet auteur
Mardi 28 Février 2023

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