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Les femmes marocaines et l'évolution du divorce : d'un tabou à une prise de pouvoir


Rédigé par le Jeudi 13 Avril 2023

En 2021, un tiers des mariages ont abouti à un divorce, et depuis la réforme du Code de la famille en 2004, le nombre de divorces a augmenté de près de huit fois. Cependant, il est conseillé de faire preuve de prudence et d'attendre la fin de l'année 2023 avant de tirer des conclusions objectives, étant donné les traumatismes causés par la pandémie de Covid-19.



Plusieurs raisons expliquent la hausse du taux de divorce, qui ne peut être attribuée uniquement à la réforme du Code de la famille. Voici quelques-unes de ces raisons.

Auparavant, le divorce était considéré comme un événement dramatique pour les femmes, car les maris pouvaient répudier leur épouse pour diverses raisons telles que la désobéissance envers la belle-famille, les lacunes en matière de gestion du foyer, l'infertilité ou la naissance de filles uniquement.

Les femmes étaient souvent victimes de violences, y compris celles infligées par une nouvelle co-épouse, sans avoir la possibilité de demander le divorce.

Les femmes qui divorçaient étaient méprisées par la société. Dépourvues de revenus, elles étaient souvent obligées de retourner vivre chez leurs parents, qui les surveillaient étroitement de crainte d'être déshonorés.

Depuis 2004, les femmes ont la possibilité de demander le divorce plus facilement en utilisant la procédure de "chikake", qui permet le divorce pour désaccord.

Les femmes étaient autrefois tenues d'être "sabbarate" (endurantes) et le divorce était souvent utilisé par les maris pour soumettre les épouses désobéissantes.

De nos jours, les femmes ne craignent plus le divorce et leur profil a évolué. Elles sont désormais capables de menacer de demander le divorce, ce qui peut blesser l'orgueil et la virilité de leur mari. La pratique de "sabbarate" est désormais rejetée par les femmes qui cherchent le bien-être dans leur mariage.

Les femmes cherchent aujourd'hui des unions basées sur l'amour et sont plus exigeantes envers leurs partenaires. Elles ont tendance à épouser des hommes modernes avant le mariage, mais qui adoptent une attitude plus traditionnelle une fois mariés. Cela témoigne d'une différence de représentation du mariage entre hommes et femmes.

Les hommes ont tendance à profiter de leur célibat et considèrent le mariage comme la fin de l'insouciance et de la liberté, ainsi que le début de grandes responsabilités. Pour les femmes, le mariage est souvent perçu comme une rencontre avec le prince charmant, le début de la liberté et d'une vie de plaisirs et de loisirs. Elles considèrent souvent le mariage comme une promotion sociale, dont les festivités peuvent parfois dépasser les moyens de leur époux.

Les désaccords entre les deux familles peuvent survenir dès les préparatifs du mariage, et le mari peut se retrouver poussé à s'endetter. Cette situation peut fragiliser le couple et entraîner des conflits durables entre les deux familles, laissant des blessures difficiles à cicatriser.

L'époux peut être tenté de rechercher à la fois les avantages du mariage et ceux du célibat, notamment des sorties et des loisirs avec ses amis ainsi qu'une certaine liberté. De son côté, l'épouse cherche souvent à construire une vie à deux, à la fois au sein du foyer et en dehors.

Il n'y a souvent pas de débat entre les époux sur les dépenses du foyer, car cela peut engendrer une certaine gêne. L'époux ne veut pas paraître trop intéressé par l'argent et l'épouse ne veut pas être perçue comme trop matérialiste. Cependant, ce flou et ces non-dits peuvent provoquer des conflits latents.

Les femmes qui apportent leur contribution au budget du couple peuvent choisir de divorcer si le mari fait preuve d'irresponsabilité, refuse de travailler ou néglige l'entretien de la famille.

Bien qu'un certain nombre d'hommes commencent à prendre part aux tâches domestiques, la majorité d'entre eux ne le font pas. Les femmes sont de plus en plus réticentes à subir une exploitation intensive, surtout si elles travaillent à l'extérieur du foyer, car cela peut leur être physiquement difficile.

La dépendance de l'un ou des deux époux à l'alcool, aux drogues ou à internet peut être une cause de divorce.

L'utilisation excessive du smartphone peut entraîner le divorce, notamment lorsque l'un des époux découvre des liaisons, virtuelles ou réelles, de l'autre. De même, des épouses addictes à Internet peuvent également provoquer des divorces en étant souvent indisponibles pour leur conjoint ou en suscitant leur jalousie.

Il y a trop de raisons de divorce pour être toutes énumérées. Jadis, le proverbe marocain "Aucun chat ne quitte la maison où se déroule une cérémonie de mariage" s'appliquait aux maris. Les femmes, quant à elles, ne demandaient pas le divorce, même si elles souffraient. Mais aujourd'hui, les femmes ont retourné ce proverbe à leur avantage. En étant financièrement autonomes, elles n'hésitent plus à demander le divorce et plus de la moitié des demandes émanent d'elles !

Le divorce est rarement une issue heureuse, surtout pour les enfants, mais parfois c'est une décision salvatrice. Il serait souhaitable que la décision soit prise de manière réfléchie et non comme une solution de facilité. Une communication non-violente entre les époux et la capacité à faire des concessions peuvent parfois prévenir la rupture.



Salma LABTAR
 





Salma Labtar
Journaliste sportive et militante féministe, lauréate de l'ISIC En savoir plus sur cet auteur
Jeudi 13 Avril 2023

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