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Par Aziz Boucetta
Puis le communiqué poursuit en rappelant « la position du Maroc, au même rang que la cause nationale (du Sahara) », et d’insister, de marteler, d’asséner, en usant de mots comme « agression sioniste », « terrorisme sioniste »… Cela sort du cadre convenu ; il fallait donc recadrer. C'est vrai que les choses sont assez compliquées pour ne point en rajouter.
Le cabinet royal publie alors à son tour un autre communiqué dans lequel il évoque « les dépassements irresponsables et des approximations dangereuses, concernant les relations entre le Royaume du Maroc et l'Etat d’Israël », et où il rappelle les quatre points que sont i/ l’irréversibilité de la position marocaine pour la Palestine, ii/ la politique extérieure qui est une prérogative royale, iii/ l’inacceptabilité de l’exercice d’un chantage ou d’une instrumentalisation de cette même politique extérieure à des fins partisanes et, iv/ le cadre et le contexte institutionnels de la reprise des relations de Rabat avec Tel Aviv.
Coup de tonnerre politique et médiatique, coup de massue sur le PJD en général, sur la tête de Ssi Benkirane en particulier. Mustapha el Khalfi ne répond plus au téléphone et Abdelilah Benkirane interdit toute déclaration de tout membre du PJD sur la question, c’est dire…
La réaction du palais est-elle disproportionnée ? Non, eu égard à la sensibilité de la question et à sa très claire instrumentalisation par le PJD pour se renflouer aux yeux d’une opinion qui semble lui avoir quelque peu tourné le dos, après 10 ans aux affaires ; pas toutes les affaires, mais les affaires quand... même.
Quant à Abdelilah Benkirane, il paraît avoir oublié ce devoir de réserve qui s’applique à tout ancien haut responsable, et haut responsable, il le fut plus de cinq ans. Il sait donc, ou devrait savoir, ou aurait dû imaginer, ce que peut impliquer dans les rangs de son parti et au sein de la société les mots choisis pour qualifier la situation dans les Territoires occupés.
Lors de la signature de l’Accord tripartite, en décembre 2020, et depuis sa retraite, il avait agi en homme d’Etat, dans la conciliation et l’apaisement. Il ne peut aujourd’hui se permettre de se mettre dans tous ses états, dans le contexte effectivement complexe que décrit le communiqué royal.
Un débat a lieu aujourd’hui autour de la question de la réforme de la Moudawana, et rien de plus normal qu’une discussion sur les modalités de l’héritage. Le chef du PJD a exprimé son opinion, comme il est en droit et en devoir de le faire. Mais il appelle sa garde rapprochée qui surgit en renfort, sabre au clair, pour menacer, accabler, excommunier, appeler à la résistance contre toute position et proposition qui iraient à l’encontre de la sienne. Ce faisant, il investit un champ qui, non seulement relève de la sphère religieuse, donc royale, mais appartient aussi à la réflexion collective.
Les ennuis, problèmes, difficultés et travers de la politique actuelle sont nombreux, de l’inflation au manque de communication, des défaillances à la mauvaise gouvernance, des doutes aux questionnements. Mais dès lors qu’il s’agit d’Israël et de la Palestine, de la place de la femme dans la société ou encore de réforme du code de la famille, le PJD s’oublie et en oublie toute retenue, prêt à en découdre par tous les moyens.
Chacun peut apporter son avis sur la diplomatie, la religion, les affaires de la cité et l’économie mais comme partout ailleurs, chacun est tenu de le faire en tenant compte des réalités, des contextes, des contraintes et des limites. Le PJD a oublié cette règle, Abdelilah Benkirane et ses pairs du secrétariat général ont dérogé à cette règle. Il fallait un recadrage, il est tombé, chaque partie retrouvant son rôle.
Rédigé par Aziz Boucetta sur Panorapost