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Le 8 mars, des chiffres et… des mal-être


le 8 mars est la journée choisie par l’humanité pour faire un point d’étape et considérer ce qui a été fait, ce qui aurait dû l’être et ce qu’il reste à faire. Et force est de constater que, globalement, au Maroc, ce qu’il reste à faire est considérable, pour ne pas dire monumental.



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Par Aziz Boucetta

On pourra donc toujours offrir des roses aux femmes, le 8 mars, elles y verraient des épines, du moins pour celles qui savent... L’égalité entre les femmes et les hommes est ou devrait être une préoccupation tout au long de l’année, mais le 8 mars est la journée choisie par l’humanité pour faire un point d’étape et considérer ce qui a été fait, ce qui aurait dû l’être et ce qu’il reste à faire. Et force est de constater que, globalement, au Maroc, ce qu’il reste à faire est considérable, pour ne pas dire monumental.

Pourquoi ? Parce que les hommes ne sont pas encore vraiment convaincus de l’égalité, et, plus grave, tant de femmes non plus. Et donc, d’immenses efforts restent à faire au Maroc. Mieux que mille mots, des chiffres pour le montrer :

- Le Maroc occupe le 135ème rang dans la participation économique de la femme, et le 116ème rang pour l’efficacité des politiques et mesures d’autonomisation économique des femmes (CESE, 2014),

Violence

- 7,6 millions de femmes âgées de 15 à 74 ans parmi les 13,4 millions ont subi au moins un acte de violence, soit 57% (HCP, 2019),

- La cyberviolence touche 1,5 million de femmes au Maroc, soit un taux de prévalence de 13,8%,

- Mariage des mineures : 20.097 demandes d’autorisation ont été déposées et 13.652 ont été approuvées, soit les deux-tiers (ministère public, 2022),

- 80% des femmes souffrant de troubles mentaux sont victimes de violences en tous genres (Association des parents et amis de personnes handicapées mentales, Hadaf, 2017).

Activité et emploi

- Le taux d’activité des femmes, de 30% en 2000, est de 20,9% en 2021 (Bank al-Maghrib et HCP, 2022), contre 38,2% pour les Marocaines vivant à l’étranger (CESE, 2022),

- 36% des femmes actives occupées ont un emploi non rémunéré contre 9% pour les hommes (HCP, 2022),

- La part des femmes dirigeantes et entrepreneuses au Maroc est de 16,1% en 2019 (moyenne mondiale de 43,2% et moyenne de l’Afrique subsaharienne de 56% (Banque mondiale) ; les femmes dirigent 18% des entreprises individuelles et 11% des SA et des SARL,

- Dans le secteur public, les femmes aux postes de responsabilité représentent 23,5% et 21% dans les institutions législatives,

- Les femmes au Maroc sont en moyenne 30% moins payées que les hommes, tous secteurs confondus (HCP, 2022),

- Pour porter le taux d’activité des femmes à 33% en 2026, le Maroc devra créer annuellement 404.000 nouveaux emplois nets au profit des femmes uniquement (sachant que la moyenne annuelle de création nette d’emplois est de 160.000,... sexes confondus, (Bank al-Maghrib, 2022).

Divers

- Sur le plan bancaire, 71% des personnes bancarisées, âgées de 15 ans et plus, sont des hommes et 29% des femmes,

- Le nombre de ménages dirigés par des femmes seules est de 1.375.000, soit 16% du total de ménages, dont 55% sont veuves et 80% ne détenant aucun diplôme (HCP, 2019),

- La population marocaine à l’étranger est à 44% composée de femmes, contre 20 à 30% dans les années 90, et parmi elles 44,7% sont d’un niveau d’enseignement supérieur (CESE,2022) Cela s’explique par la résistance « face aux pesanteurs sociales et culturelles de leur société d’origine» (Fatima Ait Ben Lmadani, 2012),

- En matière d’égalité en héritage, et tous âges, sexes et milieux confondus, 69% des Marocain(e)s s’y opposent, contre 23% (et seulement 29% des femmes, pourtant les principales concernées), (sondage)… On arrête là l’énumération, car on a compris.

 

Non, malgré les déclarations, les manifestations de satisfaction et les autocongratulations, la situation des femmes au Maroc reste bien en-deçà de ce qu’elle devrait être. Oui, la femme au Maroc est sous-employée, sous-payée, sous-considérée, agressée et surtout, avant tout et par-dessus tout, sous-protégée par une classe politique soit incompétente soit insouciante soit inconsciente.

Malgré les recommandations du roi, les instructions de la loi et les prescriptions de la foi, très peu de choses ont réellement été faites en faveur des femmes, et cela ne semble pas devoir s’améliorer. Au point que les femmes devraient être considérées collectivement comme un groupe vulnérable, du fait d’une société de nature largement patriarcale, une nature à laquelle tant de femmes adhèrent encore.

Le 20 août 1999, le roi Mohammed VI, tout juste intronisé, disait ceci : « Comment espérer atteindre le progrès et la prospérité alors que les femmes, qui constituent la moitié de la société, voient leurs intérêts bafoués, sans tenir compte des droits par lesquels notre sainte religion les a mises sur un pied d'égalité avec les hommes, des droits qui correspondent à leur noble mission, leur rendant justice contre toute iniquité ou violence dont elles pourraient être victimes, alors même qu'elles ont atteint un niveau qui leur permet de rivaliser avec les hommes, que ce soit dans le domaine de la science ou de l'emploi ? ».

Vingt-trois années plus tard, et malgré des avancées (venues en écrasante majorité du palais), nous ne pouvons que constater le mal-être persistant de la frange féminine du pays, « la moitié de la société »… Le développement du royaume patientera donc encore…

Et dans cette attente, des roses oui, mais des épines aussi.

Rédigé par Aziz Boucetta sur Panorapost 



Jeudi 9 Mars 2023


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