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Par Aziz Boucetta
C’est aujourd’hui chose faite avec les Emiratis, dont le fonds souverain principal gère près de 900 milliards de dollars et qui projette de devenir plus actif et bien plus présent en Afrique, « terrain de chasse » des grands investisseurs dans le monde, dans plusieurs secteurs et domaines. Or, l’un des atouts de la diplomatie marocaine demeure ses bonnes relations avec une Afrique en crise mais aussi en devenir.
Dans la Déclaration conjointe entre Rabat et Abu Dhabi, il est dit que « les deux chefs d’Etat ont insisté sur l’ambition (…) à mettre en place des partenariats économiques stratégiques communs et pionniers au niveau des marchés régionaux et internationaux, notamment dans l’espace africain ».
Cela ressemble à un début de mise en pratique du discours du roi Mohammed VI, le 6 novembre dernier, sur sa stratégie afro-atlantiste, passant par la réalisation du fameux gazoduc qui parcourra la façade ouest atlantique, du Nigéria au Maroc, et aussi par la connexion des Etats enclavés du Sahel avec les pays atlantiques, à travers notamment le projet Dakhla Gateway to Africa.
Jusque-là, la lente et résolue intégration du Maroc dans sa profondeur africaine était bien plus géopolitique qu’économique, en dépit des investissements consentis par le royaume, Etat et entreprises. Et même si on considère que les investissements marocains en Afrique demeurent importants, que le royaume est – selon les avis – premier ou second investisseur sur son continent, dans tous les cas, son poids reste peu significatif par rapport à des mastodontes comme...la Chine, l’Inde, le Japon, l’UE et les Etats de la péninsule arabique.
Pour sa part, le Maroc investit également sur son continent, mais il manque de ressources financières suffisantes pour affronter les autres. A deux, les deux pays peuvent faire plus et mieux, et c’est tout l’avantage de cette « triangulaire » avec l’Afrique, où l’un apporte son entregent et sa connaissance de l’économie ouest-africaine et l’autre son argent et sa maîtrise des arcanes financières.
A deux, l’attelage devient intéressant, efficace et pertinent.
La Déclaration, très complète, prévoit également les modalités des financements, par prêts, apports en capitaux, financements innovants et dons, et tout cela, les projets, leurs études, les montages financiers et le reste devra être évalué et conclu dans un délai maximal de trois mois. Autant dire, connaissant Mohammed VI et Mohamed Ben Zayed, que les partenariats verront le jour et leur mise en œuvre démarrera dans les tous premiers mois de 2024.
Avec ce partenariat très large et au vu des secteurs concernés, le Maroc aura trouvé le moyen de réaliser ses ambitions, tant nationales qu’africaines, dans un monde en changement où les alliances se font et se défont, dans une Afrique en proie aux diverses convoitises de puissances par ailleurs bousculées par leurs propres défis géopolitiques (l’Occident empêtré par ses problèmes économiques et bousculé par la brutalité israélienne, la Chine et la question de Taiwan, la Russie et la guerre en Ukraine…).
Un exemple édifiant de coopération du Nouveau Sud qui pourra s’imposer face à ces puissances qui ne parviennent pas à trouver un langage commun à l’égard des pays du Sud, aux ambitions nouvelles, de plus en plus décomplexés, et qui auront désormais une alternative aux financements contraignants, conditionnels et intrusifs de ces mêmes puissances « globales ».
Il restera seulement, pour le Maroc, de pouvoir mettre son administration au niveau requis pour recevoir ces investissements et pouvoir les implémenter dans les temps requis, face à des Emiratis qui, en matière d’organisation et d’efficience, ont déjà fait leurs preuves. Le roi a fait son travail en trouvant les financements, au gouvernement de faire le sien en mettant la gouvernance au niveau adéquat.
Rédigé par Aziz Boucetta sur Paorapost