Le peuple Marocain s’est exprimé, a usé de son droit (devoir ?) de vote. Issus des urnes, RNI, Parti Authenticité et Modernité (PAM) et Parti Istiqlal (PI) sont -dans l’ordre- les vainqueurs. Le PJD n’a obtenu que 13 sièges sur 395 disponibles au Parlement. 9 d’entre eux sont des femmes. Donc plus des deux tiers !
En 2021 un Parlement constitué par un tiers de femmes. Ce sont là des résultats très encourageants pour l’égalité femmes/hommes. Et pas d’ambiguïté, car même si le PJD a été relégué au huitième rang après dix ans, deux mandats, en tant que majoritaire, c’est une gifle qui ne peut qu’aider ledit parti pour les quinquennats à venir. Une leçon. Pas besoin non plus de polémiquer davantage sur cela.
Effectivement, on peut mettre en exergue l’éveil des citoyens vis-à-vis de la participation politique, qui paraît plus cohérente. Le parti perdant est dit « islamiste ». Cette notion peut paraître très extrême pour les autres nations. Pourtant ce ne sont pas pour autant des politiciens qui comptaient imposer la burqa -interdite au Maroc car le ministère de l’Intérieur l’ayant considérée comme coutume afghane et non marocaine- ou encore maltraiter les « infidèles » comme on peut l’entendre de la bouche d’occidentaux dont on sent la radicalisation émerger. Donc les personnes qui auront opté pour une autre voie que celle de l’Islam. Islam qui est Salam, la paix. C’est une religion de paix. Le rite marocain musulman, fondamentaliste, malékite, le démontre entièrement. Alors, pour un parti dit « islamiste », le terme est à revoir. D’ailleurs, pour tous, ce chef-d’œuvre qu’est le livre Le Génie de la Modération distingue clairement les termes entourant l’Islam. Distinguo réalisé par Feu Sa Majesté le Roi Hassan II, ancien Roi du Maroc, en personne.
Tout cela pour en arriver à cette politique de rigueur dans le but de limiter les dépenses. Ce que souhaitait le premier chef de gouvernement en 2011, M. Abdelilah Benkirane, dont le successeur perdant jeudi dernier aura suivi la ligne directrice. M. El Othmani, tout comme son prédécesseur, est un politicien avec une bonne volonté. Néanmoins, d’autres derrière doivent pouvoir suivre le cheminement qu’ils voulaient emprunter. Chemin risqué, inévitablement semé d’embûches : rigueur débouche sur stagnation. Les investissements se devaient d’être promus. Car les investissements liés à des projets productifs mènent à la création d’emplois, à l’amélioration de la qualité de vie des habitants, à une satisfaction générale et personnelle, à moins de criminalité… bref cela entraîne un effet domino, un cercle vertueux.
Si l’on se réfère au positionnement géographique et relationnel avec les autres pays d’Afrique, le Maroc est un partenaire vital pour tous les Etats du monde. Aux niveaux géopolitique mais aussi géostratégique, le Royaume est le carrefour mondial. Il s’est clairement imposé en tant que tel, sur tous les plans, économique, humain, technologique, et on peut en citer tellement. Surtout que les Marocains sont réputés pour leurs compétences humaines, en pensant, entre autres, aux ingénieurs, aux techniciens, aux médecins. Et c’est un pays qui possède une base de données de projets extrêmement riche, avec des études de marché et des compétences spécifiques qui ne peuvent qu’encourager les Investissements Directs à l’Etranger (IDE). Certes, tout est possible, mais les financements sont malheureusement souvent manquants. Donc la politique de rigueur ne peut être adoptée plus longtemps. Ce qui nous mène à nous demander quelle sera la différence avec les partis vainqueurs de ces élections. L’espoir est-il réellement permis ?
La réponse paraît indubitablement affirmative.
Il semble indispensable de passer à la question que tout un chacun se pose. Le gouvernement Marocain 2021 sera-t-il à la hauteur des espérances ? Les « technocrates » ont gagné. Donc on peut affirmer que des personnes dont le but principal dans la vie n’est pas la politique mais qui se sont engagés dans ladite voie est un signe ! La plupart sont riches. Ils ont sûrement du pouvoir. Quel serait leur but, si ce n’est contribuer à un Maroc meilleur ? Alors que pourrait être la coalition la plus envisageable ? Le PAM a surpris par ses résultats, mais son expérience gouvernementale n’est pas notable. Bien qu’à une échelle communale, voire régionale, on puisse contredire la réflexion. En plus du carnet d’adresses.
L’Union Socialiste des Forces Populaires (USFP), le parti socialiste, semble subir des perturbations, à l’image du PS français, telle une guerre intestine. On parle beaucoup d’un certain besoin du RNI de s’allier avec le PAM ou l’USFP pour une majorité parlementaire.
La vision raisonnable, en tenant compte de l’expérience gouvernementale alliée à un agenda bien adapté et une convergence politique constructive, serait de voir RNI, PI, Union Constitutionnelle (UC) et Mouvement Populaire (MP) s’associer pour ce mandat. Si l’USFP peut éluder sa guerre intestine durant les cinq prochaines années, -ce qui règlerait probablement ses problèmes car le temps panse les plaies- le parti pourrait alors intégrer cette perspective d’une union historique RNI-PI-USFP-UC-MP. Ajoutons aux valeurs de ces partis la dimension académique, non pas seulement car les technocrates sont des personnes généralement diplômées, donc instruites, mais l’UC et le MP sont des partis connus pour des membres qui sont d’une valeur universitaire incontestable. PAM, PJD, Parti du Progrès et du Socialisme (PPS) -réputé communiste- et autres partis formeraient alors l’opposition.
Le gouvernement jouirait alors d’une majorité cohérente au Parlement. Cette éventuelle coalition pourrait être viable si l’on tient compte du PAM qui a attaqué, médiatiquement, personnellement le nouveau chef de gouvernement et l’USFP qui ne pourrait entrevoir ledit PAM au sein du futur gouvernement. Le pays étant sublimé d’une réputation internationale quant à sa stabilité -Grand Merci à la Monarchie Constitutionnelle qui est vitalement Garante de ladite stabilité- concernant moult domaines essentiels à la pérennité de l’Etat, il est inévitable de s’atteler aux chantiers sociaux.
L’essentiel du programme du chef de file, le RNI, pourra aisément se reposer sur les conclusions émises par la Commission spéciale sur le modèle de développement. Cette dernière a été nommée par Sa Majesté le Roi du Maroc en personne. Le président désigné, Son Excellence Monsieur Chakib Benmoussa, Ambassadeur de Sa Majesté le Roi à Paris, grand intellectuel et fin connaisseur des institutions Marocaines -ancien ministre de l’Intérieur- et de leurs limites, se sera -très judicieusement- entouré de personnalités complémentaires, eu égard à la difficulté de la mission.
Fouad Laroui, pour n’en citer qu’un, est un écrivain ayant reçu le Prix Goncourt et est un esprit lumineux et critique au possible pour permettre une avancée certaine. Et ce qui en ressort emplit d’espoir la Nation Marocaine, mais aussi la monde car celui-ci interagit avec le Maroc ! Inégalités femmes/hommes et inégalités territoriales, mais aussi, surtout, deux domaines pour lesquels les gouvernements successifs ont toujours péché, l’éducation et la santé ! Santé pour laquelle le libéralisme à l’Etats-unienne aura laissé beaucoup de victimes dans l’oubli, faute de moyens, faute de preuve d’affiliation à la Caisse Nationale de la Sécurité Sociale (CNSS). La CNSS dont le débat pourrait bientôt être clos avec les nouvelles décisions prises quant à sa gestion.
Le rapport sur le nouveau modèle de développement tombe à point nommé. Il a été demandé en 2019, à l’aube de la pandémie, et pourtant cette dernière n’a pas empêché la Commission de présenter des résultats en moins de deux ans ! Miracle ? Non. Selon Anatole France -auteur, entre autres, de La vie d’Emile Zola et prix Nobel de littérature en 1921- « la curiosité excite le désir plus encore que le souvenir du plaisir ».
L’Histoire évolue et, en l’espèce, celle du Maroc fait un considérable bond en avant, ce qui va faire évoluer la vision de tous, partout autour du globe. « Le vrai voyage est celui dont on a rêvé. Il assouvit nos curiosités et met un terme à nos illusions ». Belle illustration dans Le Voyage de Nacira Boukli-Hacene, franco-algérienne, écrivaine et grande professeure de français réputée pour ses exploits dans les quartiers nord de Marseille -quartiers avec une dangereuse réputation-.
Cette dernière aura œuvré vraisemblablement pour cette intégration identitaire pluridisciplinaire qui a été évoquée dans des chroniques précédentes de San Sophism, et qui sera défendue bec et ongles, aujourd’hui et dans le futur.
Que ce soit la Pr. Boukli-Hacene, Constant, Fouad Laroui, Son Excellence Monsieur Chakib Benmoussa, la Commission spéciale sur le modèle de développement ou encore le futur gouvernement du Royaume Chérifien, tous s’accordent implicitement sur cette citation de la baronne, la formidable romancière et journaliste -entre autres- George Sand : « deux corps peuvent s’associer pour produire un corps, mais la pensée peut seule donner la vie à la pensée ».
Et si après avoir lu cela, on se demande encore si envisager un gouvernement ainsi formé paraît illogique, pensons simplement à ce grand président Français qui a marqué à jamais le monde, Jacques Chirac : « on greffe de tout aujourd’hui : des reins, des bras, un cœur, sauf des couilles, par manque de donneurs ». Sans oublier sa célèbre réplique au Salon de l’Agriculture en France, en 2001, lorsqu’un individu l’avait traité de « connard » : « Enchanté, moi c’est Jacques Chirac ».
Par Constant San Sophism