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Caisse de Compensation : une réforme qui semble pas assez efficace

Analyse, 5 questions de l'opposition et 5 questions de la majorité


Rédigé par le Mardi 22 Octobre 2024

Le Projet de Loi de Finances 2025 présente la Caisse de Compensation comme un levier pour alléger les dépenses publiques et soutenir les ménages vulnérables. Cependant, une analyse plus approfondie révèle que la réduction des subventions semble être une illusion, cachant les véritables défis budgétaires auxquels le Maroc est confronté. La dépendance continue à des subventions massives ne pourrai que fragiliser l’économie nationale et limiter les perspectives de réforme durable.



La Caisse de Compensation, un boulet pour les finances publiques?

Le Projet de Loi de Finances (PLF) 2025 annonce un effort de rationalisation des subventions publiques, avec une enveloppe globale de 22,9 milliards de dirhams pour la Caisse de Compensation, destinée principalement au gaz butane, au sucre et à la farine de blé tendre. Pourtant, malgré les déclarations d'intention du gouvernement, cette réforme apparait insuffisante.

Les 21,8 milliards de dirhams alloués en 2023 pour la subvention du gaz butane témoignent de l'effort considérable consenti pour maintenir les prix à un niveau abordable pour les ménages. Cependant, cette politique coûteuse risque d'entraver la capacité de l'État à libérer des ressources pour des investissements structurants. La baisse prévue à 19,46 milliards de dirhams pour 2025 ne représente qu'une réduction minime, tandis que les fluctuations des prix internationaux du gaz butane pèsent toujours sur les finances publiques​.

Cette réduction annoncée dans le PLF 2025 semble plus symbolique que véritablement transformative. Le rapport sur la compensation montre clairement que les efforts pour contenir la subvention sont contrariés par la volatilité des cours mondiaux du gaz​ Ainsi, le gouvernement reste pris dans un cercle vicieux où les ajustements sont dictés par les marchés internationaux, limitant toute tentative de réforme en profondeur.

Le sucre représente un autre produit critique dans la politique de subvention de l'État. En 2023, la charge de compensation du sucre s’élevait à 4,07 milliards de dirhams, un chiffre illustrant la dépendance marocaine vis-à-vis des importations de sucre brut​. Alors que le taux de couverture de la consommation nationale par la production intérieure reste désespérément bas, oscillant entre 16% et 19%, la réforme tarde à se concrétiser. Pour 2025, le gouvernement prévoit une réduction symbolique de la subvention à 3,442 milliards de dirhams, mais cette baisse ne suffira pas à inverser la tendance​.

L'enjeu fondamental ici n'est pas simplement de réduire la subvention, mais de repenser l'ensemble de la chaîne de production et d'importation pour réduire la dépendance structurelle du Maroc vis-à-vis des marchés extérieurs. Or, aucune mesure concrète n'est proposée pour résoudre cette problématique. En l'absence d'une stratégie claire pour augmenter la production locale, la subvention du sucre ne peut que peser sur les finances publiques.

La subvention de la farine de blé tendre, élément de base dans l'alimentation des ménages marocains, reste stable autour de 1,344 milliard de dirhams. Malgré cela, l'évolution des cours mondiaux du blé rend cette subvention de plus en plus coûteuse, sans perspective claire de sortie de crise​. Là encore, le manque de production nationale de blé contraint l'État à s'appuyer massivement sur des importations, ce qui aggrave la charge de compensation, alors que le Royaume opte pour l'agriculture d'exportation.

En théorie, le gouvernement annonce vouloir cibler les subventions vers les populations les plus vulnérables. Mais en pratique, la Caisse de Compensation continue de subventionner massivement des produits dont la consommation est généralisée, au lieu de se concentrer sur les ménages les plus démunis.

En dépit des affirmations du gouvernement, la Caisse de Compensation demeure un fardeau lourd pour les finances publiques. La rationalisation des dépenses, vantée dans le PLF 2025, ne repose que sur des ajustements mineurs qui ne sauraient répondre aux véritables défis structurels du Maroc. Si la réforme de la compensation doit réussir, elle doit impérativement s’accompagner de politiques agricoles ambitieuses, d'une augmentation de la production locale et d'un recentrage des subventions sur les ménages vulnérables.

En l'état, le projet de loi de finances semble prolonger une dépendance chronique aux subventions, sans offrir de solution efficiente et pérenne pour réduire cette charge pesante. Les montants alloués pour 2025 ne reflètent qu'un ajustement de surface, loin de l'effort de réforme attendu par les observateurs économiques et la société civile.

Si j'étais parlementaire de l'opposition, j'aurai posé ces 5 questions à Madame la Ministre des finances

  1. Madame la Ministre, comment le gouvernement compte-t-il compenser le ralentissement des Investissements Directs Étrangers (IDE) au Maroc, notamment dans les secteurs clés comme l’aéronautique et l’automobile, face à une économie mondiale fragile ?
  2. La croissance mondiale modérée de 3,2 % en 2024 pourrait affecter les prévisions économiques nationales. Quels plans sont mis en place pour protéger l’économie marocaine des effets négatifs de la fragmentation des chaînes d'approvisionnement mondiales ?
  3. Les tensions géopolitiques internationales pèsent lourdement sur le commerce global. Comment envisagez-vous de réduire la vulnérabilité de l’économie marocaine aux chocs externes, surtout dans un contexte de conflits en Europe ?
  4. Le chômage des jeunes en Chine, un de nos principaux partenaires commerciaux, menace de ralentir leur demande pour nos exportations. Quelles mesures spécifiques comptez-vous adopter pour diversifier les partenaires économiques du Maroc ?
  5. Le Projet de Loi de Finances 2025 propose-t-il des dispositions pour répondre aux problèmes structurels de l’industrie nationale, sachant que des pays comme l’Allemagne rencontrent des défis similaires ? Comment s’assurer que ces réformes seront suffisamment ambitieuses pour garantir une vraie relance industrielle ?

Si j'étais parlementaire de la majorité, j'aurai posé ces 5 questions à Madame la Ministre des finances

  1. Madame la Ministre, le Maroc a montré une résilience économique remarquable en 2023. Comment les réformes économiques en cours permettront-elles de consolider cette résilience face aux risques géopolitiques et climatiques mondiaux ?
  2. Les secteurs automobile et aéronautique, piliers de nos exportations, continuent d’attirer la demande mondiale. Comment le PLF 2025 prévoit-il d’accroître les investissements dans ces secteurs pour profiter des perspectives de croissance mondiale modérée ?
  3. Vous avez mentionné la diversification sectorielle de notre économie. Quelles nouvelles stratégies seront adoptées pour renforcer cette diversification et maintenir le Maroc dans une position compétitive sur les marchés internationaux en 2025 ?
  4. Le PLF 2025 tient compte d’une reprise modérée dans les régions Afrique subsaharienne et MENA. Comment le Maroc pourrait-il exploiter cette reprise pour renforcer ses échanges commerciaux et ses partenariats économiques dans ces régions ?
  5. La baisse des taux d'intérêt dans les économies avancées devrait encourager les investissements. Comment le gouvernement envisage-t-il d’utiliser cette opportunité pour stimuler les IDE et soutenir la croissance nationale en 2025 ?

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Mamoune ACHARKI
Journaliste junior passionné par l'écriture, la communication, les relations internationales et la... En savoir plus sur cet auteur
Mardi 22 Octobre 2024

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