Une réponse lumineuse et adéquate quand on voit le résultat aujourd’hui de cet accompagnement de la jeunesse. Le centre est construit sur trois niveaux, avec pleins de salles où on apprend, la musique, le théâtre, la peinture et où on vient écouter des écrivains.
Je ne pensais pas qu’il y aurait autant de monde. La petite salle de musique était pleine à craquer. Beaucoup de jeunes du centre et d’ailleurs, sont venus écouter l’extraterrestre que je suis. C’est grâce à mon ami et homme de théâtre, Smail Falahi, qui a démarré ici, que j’ai été invité au centre de Sidi Moumen.
Amina Outmouhine qui a modéré la rencontre, est professeur de français dans un collège du quartier. Je lui ai dit, que pour mettre tout le monde à l’aise et pour que mon propos soit compris, je m’adresserais à l’assistance en langue marocaine : un mélange subtil de Darija et de Français. L’objectif étant, que le dialogue puisse être fructueux et utile, cassant au passage les barrières de la langue, tant je sais que la jeunesse actuelle ne maîtrise pas, dans sa majorité la langue de Molière, l’arabisation à outrance de l’enseignement étant passée par là…
Je remarquerais plus tard que j’ai eu raison d’opter pour cette langue marocaine de communication, les jeunes ayant pris la parole avec enthousiasme pour poser des questions intéressées sur l’histoire du Maroc et de Tanger, objet de mon roman.
Le jeune Taha voulait savoir quand et comment s’est construit l’hymne national que nous connaissons. Une jeune journaliste me demandait de lui parler de l’urbanisme de Casablanca et de son histoire. Une ingénieure en génie civile, qui enseignait la musique au centre, me demandait comment j’arrivais à concilier mon métier d’architecte et cette passion que j’ai pour l’écriture. Un autre jeune voulait que je parle de l’histoire qu’on nous enseigne et celle qu’on lit dans les livres. Pour ne pas oublier, ce jeune, qui venait pour la première fois au centre et qui fut ravi de voir autant d’activités culturelles et me demander pourquoi je n’avais pas écrit mon roman en arabe, vu que je maîtrise cette langue et que cela aurait eu un impact beaucoup plus important sur la jeunesse.
J’ai raconté mon parcours professionnel à Sidi Moumen, les valeurs pour lesquelles je me bats, pour contribuer à faire prendre conscience à mes lecteurs et au public, la grandeur de notre civilisation marocaine, car c’est notre identité que nous devons transmettre aux générations futures, et que l’histoire, grande ou petite, fait partie de cette transmission.
Un jeune m’a demandé pourquoi je n’écrivais pas le récit de cette expérience professionnelle pour que les gens comprennent dans quelle condition tout cela a pu être possible. J’ai répondu que cela n’était pas d’actualité, vu que tous les acteurs sont toujours de ce monde, et que je ne souhaite blesser personne, vu que beaucoup d’erreurs furent commises inutilement et souvent bêtement par des fonctionnaires obtus et stupides. Je ne suis pas du genre à jeter la pierre à qui que ce soit. Mais l’État doit prendre ses responsabilités, dans tous les domaines de la vie sociale, afin que les citoyens et principalement les jeunes, n’aient pas comme espoir de vouloir, tous, quitter ce pays, car ils pensent qu’ils n’y ont plus de place…
Il suffit de peu de choses, pourtant, pour y arriver. Le centre culturel « les étoiles » de Sidi Moumen en est la meilleure illustration. J’aurais tant aimé que ce centre et tant d’autres, furent construits avant Mai 2003. Nous aurions évité beaucoup de drames et de violences inutiles…
J’étais content de retrouver mon ami Jilali Boughnim, ancien DG de la société Attacharouk, qui m’a fait l’amitié d’assister à la rencontre d’aujourd’hui, et qu’il fut le témoin et l’opérateur principal de cette grande opération de relogement des bidonvilles des carrières centrales, Thomas et de Sidi Moumen vers la cité Attacharouk. Je lui ai rendu un hommage appuyé, à cette occasion, dix-neuf ans après.
Aujourd’hui, ce quartier est devenu un bout de ville, très dynamique. On y a ramené le tramway et tous les usages urbains qui manquaient tant à l’époque.
J’ai embarqué mon amie et écrivaine Yasmine Chami dans ce lieu. Elle en est revenue avec plein d’étoiles dans les yeux. Un rendez-vous pris pour Décembre prochain, afin d’y présenter ses romans. C’est ainsi que les choses doivent être faites, par l’engagement de chacun et de chacune parmi nous, envers les autres...
Moi aussi je suis revenu plein d’étoiles dans les yeux, avec toutefois, un brin d’amertume, par rapport à un passé gâché, mais plein d’espoir aussi, après la visite du centre, car je me dis qu’après tout, il n’y a pas de fatalité, et que nous pouvons « réparer le futur » si on s’y met toutes et tous, dès maintenant…!