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La démarche n’est certes pas politique, et encore moins politicienne, mais comme on dit, « tout est politique ». La page Facebook « Save Casablanca » vient de publier un gros mémo sur les gigantesques maux de cette ville, supposément capitale économique du pays mais inconsidérément livrée à des gens inconséquents et bien en-deçà de la responsabilité qui leur est confiée !
« Le Livre noir de la ville blanche » est l’œuvre commune et participative de Mouna Hachim et Ahmed Hamid Chitachni, les deux administrateurs de cette page Facebook à l’aussi triste qu’évocateur nom de « Save Casablanca ». 270.000 Casablancais(e) s’y sont retrouvés et y sont membres, soit près de 5% de la population de la métropole. Mme Hachim et M. Chitachni ont ainsi entrepris, sur trois mois, une compilation des réactions, commentaires, analyses et rapports de faits publiés sur la page Facebook, et tout y passe : des chaussées en chausse-trappes, de rares espaces verts à rougir de honte, des moyens de transport qui ne transportent pas les usagers de joie (une nette amélioration est cependant à noter depuis quelques semaines), un patrimoine géré comme si on en avait honte, des arbres abominablement décimés à la tronçonneuse et des plantations compulsives de palmiers… ou zid ou zid.
Que représente Casablanca, en chiffres ? 15% de la population nationale, avec un taux de jeunesse de 65%, 32% du PIB du royaume, un taux d’activité avoisinant les 50%, 3ème destination touristique du pays, des dizaines de kilomètres de littoraux… Et un discours royal particulièrement énervé sur la gestion de la ville, en 2013.
Depuis que la fonction de président du Conseil de la Ville a été créée, au début des années 2000, deux maires (le titre est un emprunt aux Français) se sont succédé, Mohamed Sajid de l’UC et Abdelaziz Omari du PJD, l’un aussi taiseux que l’autre, les deux ayant passablement l’envergure de diriger une métropole populaire et populeuse, industrielle et prometteuse de la taille de Casablanca. Le premier était (et est toujours) un homme d’affaires qui n’a pas su faire et qui s’est attiré les foudres royales lors de ce fameux discours de 2013, et le second a une âme de fonctionnaire au pire, de secrétaire général au mieux. Notre bonne ville mérite mieux… bien mieux que le coterie affairiste auquel a succédé la confrérie islamiste !
Depuis 2015, beaucoup de choses ont certes été réalisées, mais rien qui relevât directement et spécifiquement de la Ville, en dehors de la gestion quotidienne. Des instructions royales ont donné le la et l’Intérieur les a mises en musique, face à une population qui subit une gestion administrative oscillant entre le chaotique et l’erratique.
Au final, nous obtenons cela : deux personnes s’activent (Mme Hachim et M. Chitachni), 270.000 personnes agissent, et le reste des 4 millions d’habitants fulminent tantôt bruyamment, tantôt dans un silence rageur. Il y a une solution à tout cela, et cette solution porte un nom : la démocratie, ou l’élection. Et l’élection communale se tiendra (si tout se passe bien) dans cinq mois.
Rien n’a jamais changé en râlant dans les chaumières ! Il appartiendra aux Casablancais d’aller voter en masse et d’asséner un coup de massue à ces partis qui font bien plus de politique que de véritable gestion de la ville. Casablanca a besoin d’édiles courageux et innovateurs, visibles et accessibles, ouverts sur le monde et sur l’avenir ; Casablanca a besoin de représentants qui, par leur gouvernance, inspirent et attirent la confiance.
Et si les partis restent aussi peu novateurs en matière de profils et qu’ils persistent à préférer les arbitrages internes de candidatures plutôt que des ouvertures audacieuses sur la société civile casablancaise, alors votons quand même en masse et, comme la Ville blanche, votons blanc, mais votons !
Les partis politiques, si actifs et tellement habiles dans la confection des lois électorales, seront-ils capables d’offrir des profils talentueux aux citoyen(e)s ? Auront-ils, dans l’intervalle, oublié qu’une élection, avant même les élus, ce sont des électeurs ? N’y a-t-il donc dans ces partis que des affairistes, des intégristes, des carriéristes ou, pire, des opportunistes.
Que MM. Elotmani, Ouahbi, Baraka et Akhannouch veuillent bien faire honneur à leurs partis et à leur pays pour sauter au-delà des ambitions coupables de cadres approximatifs et qu’ils osent présenter des femmes et des hommes de valeur ! Casablanca, la Ville blanche, en a assez de ruminer des idées noires…
Rédigé par Aziz Boucetta sur https://panorapost.com