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La population de Gaza ou le "dommage collatéral" désigné d'avance


Rédigé par Jamal HAJJAM le Lundi 23 Octobre 2023

La guerre que mène Tsahal contre le mouvement Hamas, coupable d’avoir meurtri et humilié l’Etat d’Israël par son attaque d’envergure spectaculaire et inédite du 7 octobre 2023, s’est assuré de prime à bord un "dommage collatéral" de taille, désigné à l'avance : deux millions et demi de gazaouis, soit l'ensemble de la population de la bande de Gaza majoritairement composée de réfugiés créés à la base par Israël.



Par Jamal HAJJAM

L’Etat hébreu trouve dans le besoin de laver l’affront subi, l’opportunité de réaliser ses plans expansionnistes en tentant de chasser les gazaouis de leur terre par le fer et le feu, sous prétexte de “guerre d’extermination” contre le Hamas catalogué terroriste par Israël et l’Occident. 

Pour sa part, le movement Hamas qui a montré une très bonne maîtrise du terrain et une évolution qualitative et quantitative en termes de materiel et de savoir faire, met le paquet et tente le tout pour le tout. 

Les boucheries en cours dans la bande de Gaza déjà assiégée depuis 17 ans, dont la plus abjecte et la plus ignoble (une de plus) est l’attaque contre un hopital qui a fait plus de 500 morts, relèvent pour l’Etat d’Israël d’une stratégie jamais abandonnée, dans sa forme comme dans sa finalité, faite de crimes à répétition jusqu’à la lassitude. 

Mais malgré les guerres avec leurs bombardements massifs, malgré les privations et les tueries, les palestiniens de Gaza font preuve d’une résistance sans faille et se montrent prêts à tous les sacrifices pour arracher ne serait-ce qu’un aperçu de liberté.

Terroriser pour déporter

Il apparait clairement que le procédé israélien durant cette guerre s’appuie sur la terreur en vue de parvenir à une déportation forcée des palestiniens de Gaza vers le Sinaï en Egypte et, vraisemblablement dans une seconde phase, ceux de Cisjordanie vers la Jordanie, le tout dans le cadre d'une politique de nettoyage ethnique que les États-Unis et l’Europe paraissent prêts à soutenir. 

Le Président égyptien et le Roi jordanien auxquels le véritable enjeu de cette sale guerre n’échappe pas, se sont d’ailleurs très vite dressé contre toute tentative de transfert des populations de Gaza en dehors des frontières historiques de la Palestine. Le niet tranché, particulièrement du président Al-Sissi, a eu son effet à ce stade des évènements, mais ne garantit rien pour l’avenir, d’autant que les occidentaux semblent particulièrement séduits par une telle perspective et ne manqueront pas de mettre la pression pour ce faire. 

Quoi qu'il en soit, une chose est certaine, Israël cherche sérieusement à se débarrasser de la totalité ou de la majeure partie des Palestiniens et à appliquer sa loi sur l’État-nation, c’est-à-dire faire de cette entité une patrie réservée aux Juifs, sans aucune place pour les Arabes, qu’ils soient musulmans ou chrétiens.

Persevérance dans le reniement des engagements

Le gouvernement d’extrême droite de Netanyahu qui n’a jamais admis l’existance d’un Etat palestinien indépendant vivant côte à côte avec Israël, voudrait tout au moins revenir à la situation d’avant les accords d’Oslo de 1993, accords qui avaient institué un auto-gouvernement palestinien en Cisjordanie et à Gaza en échange, d'une part, d’une reconnaissance mutuelle entre Israël et l’OLP et, de l'autre, de l’engagement à résoudre les questions de la délimitation des frontières définitives d’Israël et de l’État palestinien en devenir, de la fixation du statut des colonies juives sur les territoires palestiniens, de la résolution de l’épineux problème d’Al Qods et enfin, du traitement de la lancinante question des réfugiés palestiniens.

Seulement, ces points cruciaux et incontournables pour l'instauration d'une paix pérenne dans la région donnent, depuis la signature des accords d’Oslo, de l’urticaire à l’extrême droite israélienne, à Netanyahu en premier lieu pour qui ces accords, comme il l’avait déclaré publiquement, "sont le problème et non la solution". C'est dire que le premier ministre israélien n'intègre nullement l’idée de la paix et fait de la tergiversation et du reniement des engagements antérieurs de l’Etat d’Israël un mode de gouvernance, ce qui est en soi un crime contre un peuple dépossédé de ses droits inaliénables à la liberté et à l’indépendance. 

Victimes depuis toujours  

En fait, depuis que la Société des Nations (ancêtre de l’ONU) a imposé le mandat britannique à la Palestine en 1922, au lendemain du démantèlement de l'empire Ottoman, soit il y a plus d’un siècle, le peuple palestinien est victime de tous les crimes possibles et imaginables ; victime d’injustice, d’arbitraire, de persécution, d’oppression, d’exil forcé, d’appartheid, d’assassinats, de crimes de guerre et de crimes contre l’humanité, voire d’épuration ethnique comme c’est le cas en ce moment à Gaza.

Tous les territoires qui étaient avant 1917 sous domination ottomane sont devenus par la suite des États pleinement indépendants, à l’exception de la Palestine à laquelle on a réservé un autre sort, des plus étranges et des plus injustes.

Dans le fond, le mandat de la Société des Nations pour la Palestine permettait à la Grande Bretagne de prendre le contrôle de la Palestine afin de mettre en œuvre la tristement célèbre Déclaration Balfour du 2 novembre 1917 ; déclaration par laquelle le ministre britannique des affaires étrangères, Arthur Balfour, adressait au nom du gouvernement britannique sa fameuse lettre ouverte à Lord Walter Rothschild, éminence de la communauté juive britannique et financier du mouvement sioniste. Dans cette déclaration, il était précisé que le gouvernement britannique “envisageait favorablement l’établissement en Palestine d’un foyer national pour le peuple juif”. 

La suite, tout le monde ne la connaît que trop bien : Le “foyer national pour le peuple juif” ne signifiait rien d’autre qu’un Etat sans partage, Israël, et l’éviction des propriétaires des lieux, alors que les dispositions de l’article 2 du mandat britannique évoquait la “sauvegarde des droits civils et religieux de tous les habitants de la Palestine, indépendamment de leur race et de leur religion". L’article 7 du même mandat précisait encore que la puissance mandataire était chargée de promulguer “une loi sur la nationalité” et que cette loi devait comprendre des dispositions visant à "faciliter l’acquisition de la citoyenneté palestinienne" -bien la "citoyenneté palestinienne”- par les Juifs qui établissent leur résidence permanente en Palestine.


 

Le mouvement sioniste à l’oeuvre 

La Déclaration de Balfour, légitimée par la Société des Nations, a ouvert la voie devant le mouvement sioniste pour l’exécution de ses plans. Entre 1922 et 1947, des juifs venus essentiellement d’Europe de l’Est immigrent massivement en Palestine à une cadence soutenue, à telle enseigne qu’en 1937, sur fond de revendications d’indépendance et d’opposition à l’immigration, la population palestinienne s’est tout naturellement révoltée. De leur côté, des groupes terroristes sionistes, agissant de pression sur la puissance mandataire pour la dissuader de répondre aux revendications des Palestiniens, multipliaient les attentats.

Le territoire entra alors dans un cycle de terrorisme et de violence -qui n’a jamais pris fin- acculant le Royaume-Uni à confier en 1947 le problème de la Palestine à l’Organisation des Nations Unies. Cette dernière a immédiatement  proposé le partage de la Palestine entre deux États indépendants, l’un arabe et l'autre juif, et le placement de la ville d'Al-Qods sous régime international. 
Mais c’était sans compter les plans inavoués des sionistes pour qui le partage du territoire n'a jamais été recevable.

Dès 1948, David Ben Gourion proclame l’établissement d’un Etat juif sous le nom d’Israël qui, à l’issue d’une guerre avec les arabes (Egypte, Jordanie, Syrie, Irak et Liban) la même année, prit le contrôle de la quasi-totalité du territoire de la Palestine, dont la majeure partie d’Al Qods.

La Jordanie et l’Égypte assurèrent toutefois le contrôle du reste des territoires assignés à l’État arabe par la résolution onusienne de partage du territoire, soit la bande de Gaza et une partie de la Cisjordanie, territoires qu’Israël s’empressa ensuite d’occuper à la faveur de la guerre de 1967, tout en annexant Al Qods-Est. Deux vagues d’exode palestinien ont suivi ces deux guerres gagnées par l’Etat hébreu. 

La victoire arabe de 1973 a certes rétabli un certain équilibre des forces, mais n'a pas résolu grand-chose dans le dossier palestinien qui allait cependant faire l'objet d'un chapelet de résolutions onusiennes posant les principes d’une paix juste et durable, à savoir le retrait d’Israël des territoires occupés lors des conflits armés, un juste règlement du problème des réfugiés et la cessation de toutes assertions de belligérance, tout en réaffirmant les droits inaliénables du peuple palestinien à l’autodétermination, à l’indépendance, à la souveraineté et au retour des exiles à leurs foyers.

La Résistance en réponse à l’arrogance

Le problème palestinien aurait pu être réglé à ce stade de l’histoire mais, dans la plénitude de son arrogance, Israël a continuellement affiché une fin de non recevoir à toutes les décisions internationales et, ni les accords de paix signés avec l'Egypte et la Jordanie, ni la proposition arabe de Beyrouth de 2002 offrant la paix et la reconnaissance d'Israël par l'ensemble des pays arabes en échange du retour aux frontières de 1967 et de l'établissement d'un État palestinien indépendant avec Al-Qods Est comme capitale, n'ont ramené Israël à la raison. Bien au contraire, à chaque initiative favorisant les conditions de la paix, l'Etat hébreu répondait par des massacres et par davantage de colonies à tel point que la carte de la Cisjordanie a fini par ressembler à un morceau de gruyère. 

La guerre actuellement en cours dans la bande de Gaza n'est d'ailleurs qu'un épisode de cette tendance lourde chez les politiques israéliens qui fait que tout au long de la tragédie palestinienne, l’occupation israélienne n’a fait que gagner en intensité et en violence avec un appétit insatiable pour plus de terres. Pendant ce temps, l’Occident a savamment transformé la lutte palestinienne pour la liberté en un "conflit" à gérer par des formules, jamais par des actes. 

Voilà qui pose la grosse et inévitable interrogation : Comment parvenir à la concrétisation de la solution prônée par la communauté internationale de deux États vivant en paix, en présence de cette arrogance inouïe d'Israël et du soutien complice de l’occident ? Devant l’absence de réponse concrête et agissante et devant le feu vert permanent octroyé à Tel Aviv par ses alliés, ce sont les actes de résistance, tout-à-fait légitimes par ailleurs, qui s’invitent sur le terrain -la nature ayant horreur du vide- pour rappeler au bon souvenir de la communauté internationale la cause de la Palestine et les sempiternelles souffrances de son people.

Mais jusqu’à quand ?  

Rédigé par Jamal Hajjam 





Lundi 23 Octobre 2023

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