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Il se passe des choses étranges aujourd’hui, avec les capitales des pays amis, ou dits amis… Des attaques en piqué et des coups-bas en rafale, des médias étrangers qui placent le Maroc dans leur ligne de mire, des actes inamicaux qui succèdent à d’autres actes, plus radicaux. Le diable se niche dans les détails, dit-on, et on n’a pas tort. Revue de détail, non exhaustive.
En matière de politique et de diplomatie, rien n’est jamais dit clairement, faisant penser à cette phrase de l’écrivain américain Henri Louis Mencken : « Quand un diplomate dit 'oui', cela signifie 'peut-être' ; quand il dit 'peut-être', cela veut dire 'non' ; et quand il dit 'non', ce n'est pas un diplomate ». Cette citation s’applique parfaitement à notre affaire du Sahara, avec nos alliés et amis traditionnels, et essentiellement si elle est adossée à cette autre pensée, du général de Gaulle cette fois : « La diplomatie est l’art de faire durer indéfiniment les carreaux fêlés ». Et aux yeux de bien des Européens, l’affaire du Sahara est un « carreau fêlé », une décolonisation bâclée par les deux anciennes puissances « protectrices » que sont l’Espagne et la France, auxquelles s’est récemment ajoutée l’Allemagne. Il s’agit respectivement des 4ème, 2ème et 1ère économies de l’Union européenne.
Et elles sont plutôt dubitatives face au chemin pris actuellement par le Maroc après son récent accord avec les Etats-Unis sur le Sahara, l’économie, la diplomatie, le sécuritaire et le militaire, la présence en Afrique… Depuis près d’un demi-siècle que dure et perdure l’opacité autour de cette question territoriale marocaine, l’Europe a toujours répondu présent dans les coups durs à l’ONU, ou présentés comme tels.
En réalité, avant les ruptures géopolitiques actuelles qui enregistrent, malgré les discours officiels, un écart de plus en plus sensible entre l’Amérique et l’Europe, les Etats-Unis s’alignaient globalement sur les positions de leurs alliés du Vieux Continent, dans une sorte de continuité des politiques datant de la première moitié du 20ème siècle, des politiques du partage du monde. Ce n’est plus le cas aujourd’hui, avec l’émergence de la Chine et de pôles de puissances régionales sur tous les continents. L’Europe, aujourd’hui sérieusement secouée, perd pied, et nous ne devons pas perdre de vue nos intérêts.
Devons-nous être pour autant aveuglément reconnaissants, éternellement résignés, à cette Europe qui nous a certes aidés, mais qui s’est servie au passage, et continue ? La réponse vient d’un ancien grand diplomate européen, Metternich : « La gratitude n'est pas un sentiment efficace en politique. C'est une erreur que d'en tenir compte »… surtout quand l’assistance européenne se conjuguait fortement avec moult avantages économiques accordés à l’Europe et qu’il serait long d’énumérer ici, encore.
Ainsi, les Espagnols, singulièrement irrités depuis l’accord entre Washington et Rabat, enchaînent les banderilles, la dernière étant le camouflet que le gouvernement Sanchez a fait subir à sa propre justice, à travers le piteux accueil réservé à Brahim Ghali, le chef du Polisario accusé de graves chefs d’inculpation en Espagne, comme crimes de guerres et viols… que Madrid a accepté de recevoir et de soigner sous fausse identité et fausse « nationalité ». Pour sa part, l’Allemagne a demandé et obtenu une réunion d’urgence du Conseil de sécurité en décembre, n’ayant rien obtenu d’autre qu’une saine colère de la diplomatie marocaine.
Quant à la France, elle semble aujourd’hui être à la peine et un peu aussi à la traîne, dans sa politique africaine, maghrébine et subsaharienne. Au Maghreb, l’éternel équilibre voulu par Paris entre ses relations avec Alger et avec Rabat montre ses limites. Quant à son appui international au Maroc, réel et (presque) sincère, il a été largement rétribué par les innombrables et incommensurables avantages accordés aux entreprises françaises, à la culture française, à la finance française…
Et au final, nous avons un nouvel allié, les Américains, qui n’ont pas d’amis durables mais des alliés privilégiés… nous avons des « amis » volatils, prenant appui sur l’histoire de la Conférence d’Algéciras et sur l’Histoire tout court, et nous avons un ennemi, l’Algérie officielle.
Alors, Dieu nous garde de nos « amis », notre ennemi, on s’en charge !
Rédigé par Aziz Boucetta sur https://panorapost.com