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Après une année de discussions extrêmement tendues, une « réunion de la dernière chance » a finalement permis de parvenir à un consensus début novembre, pour que les 198 Etats présents à Dubaï concrétisent définitivement la mesure le 30 novembre dernier.
Il faut cependant relativiser la portée d’un tel fonds pour au moins deux raisons. D’abord, il n’a aucun pouvoir contraignant et les contributions des Etats sont facultatives. Les sommes annoncées dans la foulée n’incitent pas à l’optimisme. Ainsi, l’Union européenne a annoncé une contribution de 225 millions d’euros (dont 100 millions de la part de l’Allemagne), les Emirats arabes unis ont promis 100 millions, le Royaume Uni 50,5 millions, les Etats-Unis 17,5 millions d’euros et le Japon 10 millions. Soit à peine 400 millions. Bien sûr, d’autres annonces devraient intervenir par la suite. Mais il ne faut pas s’attendre au miracle.
Ensuite, ces sommes demeurent dérisoires par rapport aux coût total engendré par la perte de récoltes, la destruction d’infrastructures ou encore des déplacements de populations du fait de cyclones, de sécheresses ou de la montée des eaux. Ces coûts sont estimés entre 290 milliards et 580 milliards de dollars (entre 265 milliards et 532 milliards d’euros) par an d’ici à 2030.
La deuxième mesure est relative à la création par les Emirats Arabes Unies, pays hôte, d’un fonds privé doté de 30 MM $ consacré à la lutte contre le changement climatique. Par une telle mesure, les Emirats cherchent à impliquer davantage le secteur privé dans la lutte contre le réchauffement climatique. Cette mesure revêt une valeur d’exemple pour le capital privé qui doit s’investir dans les affaires du climat dans la mesure où les besoins en investissements climatiques sont estimés à 2400 MM $ par an !
On le voit, face à l’urgence climatique, les progrès sont timides. Les grands pays industriels ne s’empressent pour joindre les actes à la parole. La situation appelle un sursaut réel et un engagement sincère de toutes les parties et en premier lieu de ceux qui ont tiré profit jusqu’à maintenant à savoir les pays industrialisés qui sont à l’origine de l’émission de CO2. D’autant plus que la sortie de l’ère « des énergies fossiles » n’est pas pour demain.
Au contraire, on assiste à un retour en arrière avec le recours de certains pays à l’usage du charbon. Et ce n’est pas la technique du captage du dioxyde de carbone, dit CCS (Carbon Capture and Storage), qui va résoudre le problème même si elle connaît un élan massif.
Et tout comme il faut croire en l’action climatique, il faut également être convaincu qu’entre les voix de ceux qui se résignent aux "petits pas", et de ceux qui ne jurent que par les "grandes ruptures" – mues par l’idéologie et portées par le dogme, il y a un chemin médian. Un chemin fait de pragmatisme certes, mais aussi de volontarisme, d’ambition et de vision. C’est ce chemin-là que nous devons faire nôtre, si notre dessein est toujours d’être à la hauteur des engagements souscrits à la COP.21 de Paris en 2015, et à la COP.22 à Marrakech en 2016. »
Et le Souverain de poursuivre : « Dans un système mondial toujours inéquitable, l’Afrique a reçu 30 milliards USD des flux annuels de financement climatique en 2020, ce qui représente moins de 12% de ses besoins. Pénalisé et défavorisé, le Continent a pourtant tous les atouts pour devenir la solution climatique mondiale, la solution aux grands défis du 21eme siècle. L’absence d’une solidarité agissante ralentit considérablement l’élan de son action climatique. »
Pour conclure, il n’est pas sans intérêt de rappeler cette déclaration de Jacques Chirac lors du Sommet mondial sur le développement durable à Johannesburg sept 2002 : "Notre maison brûle et nous regardons ailleurs. La nature, mutilée, surexploitée, ne parvient plus à se reconstituer et nous refusons de l'admettre."
Rédigé par Abdeslam Seddiki