Par Anwar CHERKAOUI
Les fidèles, grands et petits, affluaient d’un pas rapide vers la mosquée.
Ce qui frappait en premier, c’était leur propreté.
Des habits modestes, certes, mais impeccables.
Jeunes et moins jeunes se mêlaient.
Djellabas et jeans se côtoyaient en toute simplicité.
Cheveux noirs, gris ou blancs, barbes longues ou soigneusement taillées, tous étaient réunis pour la prière du vendredi.
Dans le parking improvisé, voitures de luxe, économiques, motocycles et bicyclettes partageaient l’espace dans un curieux mélange de modernité et de modestie.
De mon siège au café, les récitations du Coran parvenaient à mes oreilles, tandis qu’une odeur alléchante s’échappait des maisons avoisinantes, promesse d’un repas chaud .
Avant de m’installer, j’étais passé chez mon coiffeur attitré.
Tandis qu’il ajustait son rasoir, d’autres clients s’étaient présentés.
Il les avait poliment déclinés : "Après la prière, Messieurs."
Alors que les versets sacrés berçaient mes pensées, un homme d’un certain âge s’assit à la table voisine. Intrigué, je l’interpellai :
– "Vous ne faites pas votre prière du vendredi à la mosquée ?"
Sa réponse me surprit :
– "Si, mais pas avant ma cigarette et mon café au lait du vendredi. C’est un rituel vital pour moi."
Un homme passa, le tapis de prière posé sur son crâne dégarni, pour se protéger du soleil hivernal de décembre.
Un pick-up stationna non loin de la sortie de la mosquée, rempli d’oranges. Le vendeur semblait serein, assuré que sa cargaison disparaîtrait rapidement une fois la prière terminée.
Un motocycliste arriva peu avant le khutba de l’imam, proposant bananes et mandarines. Ecouler la marcgandise est sur, grâce à Dieu.
Quand le muezzin lança l’appel : "Allah Akbar", les retardataires pressèrent le pas pour se joindre aux rangs déjà formés.
Une jeune femme, emmitouflée dans son manteau, un bébé dans les bras, traversa la foule sans y prêter attention.
Absorbée par ses propres soucis, elle ne remarqua même pas les fidèles qui la frôlaient en courant.
À la sortie, les pas s’accélérèrent comme dans une sorte de rituel rappelant le trot d’ "Al Harwala" à la Mecque.
Cette fois, c’était l’appel du couscous aux sept légumes qui les faisait saliver.
De mon perchoir avec ma tasse de café, je me demandais : étais-je en communion avec Dieu, même à l’extérieur du lieu sacré ?
La réponse me parut claire : oui.