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Le viol est à l’université… on peut avoir honte !




Par Aziz Boucetta

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Au Maroc, comme partout ailleurs, les violeurs et autres harceleurs pullulent, mais au Maroc, comme pas partout ailleurs, les noms sont tus, la discrétion est de mise et, si possible, l’impunité vole au secours des violeurs. En un mois, plusieurs affaires sordides ont secoué le microcosme de l’enseignement supérieur, entraînant des enquêtes des administrations concernées et des requêtes des personnels consternés.
 

Le procédé est vieux comme le monde : prendre appui sur une position d’autorité, de domination pour l’enseignant, de dépendance pour la victime. Quelle est cette dépendance ? Les résultats, les notes obtenues, moyennant faveurs sexuelles de toutes natures. C’est aussi triste que cela, c’est aussi abject que cela, oui, car de la part d’un enseignant universitaire, on ne peut trouver d’autres mots, sauf peut-être l’ignominie.
 

A Oujda, puis à Settat, puis à Tanger, puis Casablanca, les langues se délient, montrant ces mœurs qui se délitent, regroupées sous le nom générique de « sexe contre bonnes notes ». Sans revenir sur les détails dont tout le monde connaît le caractère sordide et immonde, le modus operandi est toujours le même, seuls les moyens de communication, très variés, varient : une relation sexuelle, elle aussi variée, contre une bonne note, variable en fonction de la « générosité » de la victime, et de la « disponibilité » de sa famille (un des enseignants a en effet proposé l’intermédiation entre les victimes et d’autres professeurs, proposant d’étendre la relation à la sœur et même la mère de la victime !)
 

Plus graves sont les révélations de la presse, fondées sur les déclarations des jeunes femmes harcelées, qui ont affirmé avoir saisi les hiérarchies des enseignants incriminés, et à chaque fois, c’est la même chose : classement de l’affaire. Plusieurs responsables des administrations concernées tentent d’abord d’étouffer chaque affaire, puis de la camoufler, avant d’aller vers les médias et de jurer, la main sur le cœur, qu’ils sont dans une logique de « tolérance zéro » !
 

Combien sont-elles à avoir été soumises à un tel chantage dans les enceintes universitaires, chantage au sexe et chantage à la vidéo ? Personne ne le sait, et on peut craindre que personne ne le saura jamais. Au Maroc, ce sont environ 95 % des cas de viol qui ne sont pas déclarés (90% en France), en raison de la société qui se montre impitoyable envers les femmes et qui a toujours cette tendance facile à les incriminer, leur reprochant en clair ou indirectement d’investir un espace public qui ne serait pas le leur. Il y a aussi ce caractère patriarcal de la société qui justifie les actes masculins, après avoir assuré une éducation où l’homme peut se croire tout permis, et cela se confirme avec les lois sur les relations sexuelles, toujours en défaveur de la femme, même quand elle est victime de viol).
 

Si on arrondit le 95% de viols ou tentatives non déclarées, on est à 100%, ce qui signifie que les viols sont tout simplement impunis dans ce beau royaume qui est le nôtre.
 

Alors combien de viols et tentatives de viol, harcèlements ou simples « lourdeurs/indélicatesses » se produisent-ils au Maroc, dans les universités ? Et, plus grave, peut-on raisonnablement penser que ce qui se pratique – à grande échelle semble-t-il – dans l’enseignement supérieur n’est pas le prolongement de ces agressions en cycle secondaire, voire même primaire, avec des enfants, des fillettes ?
 

Il faut relever que la justice (ou plutôt sa haute hiérarchie...), après avoir regardé ailleurs, s’est penchée sérieusement sur le problème, plaçant ces enseignants en détention provisoire, en attendant la définitive, et on peut espérer que les peines seront lourdes car il n’y a que des circonstances aggravantes. On peut en revanche rendre hommage à la police qui a fait traiter ces cas par la Brigade nationale de la police judiciaire, montrant le sérieux accordé à ces affaires.
 

Enfin, rien ne saurait s’améliorer si un travail de fond n’est pas mené en direction de la société, avec les programmes scolaires, les prêches du vendredi (puisque les violeurs prient, aussi), les programmes télés, et pas seulement les pubs, mais des films, des documentaires, des témoignages… Et aussi l’intimidation des administrations universitaires et scolaires, dans le cas où une connivence ou une complaisance seraient relevées. Un numéro vert comme ceux ouverts dans certains établissements d’enseignement, c’est bien, mais traiter les signalements, dans la discrétion, c’est encore mieux.
 

Dans l’attente, ne l’oublions pas : des enseignants font chanter des filles en âge d’être les leurs pour s’attirer leurs faveurs, et celles de leurs sœurs, et cela se passe à l’université. On peut avoir honte !
 

Rédigé par Aziz Boucetta sur https://panorapost.com




Mercredi 5 Janvier 2022


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