Par Mustapha Sehimi
Le Secrétaire général des Nations unies, Antonio Guterres, a mis à profit sa conférence de presse de début d'année avec les médias accrédités à l’ONU pour faire le recadrage de la position de l’organisation mondiale à propos de la question nationale, indique le politologue Mustapha Sehimi. «Ce recadrage vise en particulier la position de l’Algérie», souligne M. Sehimi, faisant observer que le SG de l’ONU
«a rappelé à ce sujet qu’il fallait relancer le processus de négociations en vue d’un règlement politique, négocié sur la base des principes validés et consacrés par le Conseil de sécurité, à savoir une solution de compromis, réaliste, pragmatique et prenant en compte la prééminence de la proposition marocaine d’autonomie déposée en Conseil de sécurité en avril 2007».
M. Guterres a tiré les conclusions de la première visite de son envoyé personnel, Staffan de Mistura, qui a effectué une tournée dans la région du 13 au 19 janvier courant, dit le politologue, faisant remarquer à propos de cette tournée que l’agenda prévu a été modifié, à la demande d’Alger, puisque l’émissaire onusien a visité le Maroc, les camps des séparatistes à Tindouf, puis la Mauritanie et enfin l’Algérie.
«L’Algérie a voulu être la dernière partie à être visitée par l’envoyé onusien pour tenter de faire valoir sa nouvelle position, à savoir que ce n’est qu’un pays voisin et non une partie prenante principale»,
Ce processus de négociations a été de nouveau consacré par le Conseil de sécurité dans la résolution 2602 du 29 octobre 2021, rappelle M Sehimi, précisant que le processus ne doit pas se limiter à des tables rondes.
«la position d'Alger a été recadrée car depuis l'adoption de la résolution 2602, les responsables algériens n'ont cessé de déclarer qu'ils ne voulaient plus être associés au format de la table ronde. Alger avait d'ailleurs exprimé sa désapprobation de cette résolution. Voilà donc aujourd'hui la communauté internationale qui valide un processus basé sur des principes consacrés par le Conseil de sécurité et l'Algérie qui se met en dehors de ce processus. Et c'est sous la pression de la communauté internationale qu'elle a dû accepter de recevoir l'émissaire de l'ONU».
La question du Sahara relève exclusivement du cadre politique défini par l'ONU
Dans les propos d'Antonio Guterres, M. Sehimi retient un autre élément important. «Il n'y a qu'un seul cadre valable et validé, qui est celui des Nations unies, et toutes les manœuvres algériennes visant à impliquer ou à faire interférer d'autres acteurs sont rejetées par le SG de l'ONU», souligne-t-il. «Ces manœuvres tendaient à faire considérer que l'Union africaine en particulier devait être impliquée au même titre que l'ONU pour faire avancer ce processus de négociation. Cependant, l'UA n'a pas la compétence pour se saisir de cette question. Cela a été réaffirmé lors du sommet de Nouakchott en juillet 2018, où l'UA a fait adopter le principe d'une troïka (le président en exercice de l’UA, le président de la commission africaine et le président à venir de l’UA), qui a un mandat précis d’accompagnement du processus de négociations qui est entre les seuls mains des Nations unies», affirme M. Sehimi.
Et de rappeler «les manœuvres algériennes ont toujours voulu que l'Union africaine soit impliquée et cela a été prouvé au niveau des travaux du Conseil de paix et de sécurité, où l'Algérie a toujours multiplié les manigances et les pressions pour l'impliquer, comme ce fut le cas en mars 2021. Mais là encore, la majorité des membres de ce Conseil ont rappelé l'exclusivité du mandat onusien dans la gestion de la question du Sahara marocain et réitéré leur soutien à la décision 693 adoptée à l'unanimité lors du Sommet des Chefs d'État et de gouvernement à Nouakchott en juillet 2018».
Les menaces terroristes, un message clair en direction d'Alger
Dans ses déclarations, le SG de l’ONU a mis l’accent sur les problème de stabilité et de sécurité qu’il y a dans la région.
«La situation créée par le mouvement séparatiste et son parrain, l'Algérie, est un facteur qui porte atteinte à la sécurité et à la stabilité dans la région, en particulier dans la région du Sahel, avec le risque que ces problèmes de sécurité ne débordent sur les rives sud et nord de la Méditerranée»
La diplomatie algérienne, selon M. Sehimi, est plus que jamais isolée. Elle est en situation d’échec, elle n’est plus audible et n’a pas de soutiens. «Elle ne traduit que les rigidités qui sont celles du système politique algérien. Et Son isolement a été encore une fois confirmé par l’échec de l’organisation du Sommet arabe, prévu en mars à Alger, et qui a été reporté à une date ultérieure»
Rédigé par Mustapha Sehimi sur Le Matin