Trois questions à Najib Mikou, par notre confrère lopinion.ma
Il faut s’en féliciter, le politique ne peut, ne doit faire l’économie d’une telle présence. Les réseaux sociaux sont devenus à travers le monde, au fil des dernières années, le réceptacle, l’outil et le passage obligé du débat politique et de la proximité avec le plus grand nombre. Après quelques hésitations de casting, nos grands partis politiques ont fini par s’y mettre.
Je conviens et concède que l’exercice n’est pas du tout aisé, de par la nature de tels échanges sur le Web, mais c’est le prix nécessaire à payer pour que nos partis jouent pleinement leur rôle d’être à l’écoute du plus grand nombre, de communiquer avec le plus grand nombre et de convaincre le plus grand nombre.
Ceci dit, pour être fécond comme moyen de faire évoluer la démocratie chez nous, un tel espace d’échange où prévaut l’anonymat, a nécessairement besoin d’obéir à une charte des valeurs qui régisse les rapports entre les partis et les internautes. De part et d’autre, tout doit être permis, sauf l’insulte et le mensonge.
En attendant, nos partis politiques devraient y semer de la bonne graine pour en cueillir le bon fruit.
2- Avec la dégradation de la situation épidémiologique, les meetings ne seront pas au rendez-vous comme les années précédentes. Estimez-vous que le digital est suffisant pour mobiliser l’électorat ?
Beaucoup d’avantages à cela. Déjà pour commencer, il nous épargnera la pollution de nos espaces de vie communs par des vagues humaines qui crient dans tous les sens et des millions de papiers jetés à tort et à travers. C’est donc un moyen propre dans tous les sens du terme.
Pour être encore plus sérieux, le numérique a l’avantage considérable de vaincre le temps et l’espace à travers des messages qui, moyennant un seul clic en moins d’une fraction de seconde, parviennent à leur cible en temps réel et là où elle peut être. C’est un gain inestimable en énergie, en temps, en coût et par conséquent, en efficacité.
Le numérique est dans le même temps, un moyen de démocratisation de la transmission de l’information et de l’accès à l’information, à travers ce démantèlement de ces barrières énergie, temps et coût. Il rend possible la création de liens qui n’auraient jamais pu exister par ailleurs.
Donc oui, le digital permettra en grande partie, de surmonter le handicap pandémie qui rétréci fortement le champ des meetings.
Je dis en grande partie, car le numérique avec toute son armada de réseaux sociaux, reste malgré tout, une simple vitrine froide, et donc ne peut jamais se substituer à l'”être”, au contact humain direct porteur par nature, d’émotions, de réalité.
On est finalement, pleinement dans deux sphères certainement, incontestablement, complémentaires, mais nullement similaires. Le numérique et le physique, le virtuel et le réel, le plastique et le chaleureux.
Malgré donc la pandémie qui sévit malheureusement de plus belle, nos paris politiques ne devraient pas renoncer à la dose minimale nécessaire de contact humain, ciblé et respectueux des mesures barrières sanitaires.
3- Quels sont les enjeux des prochaines élections ?
Je n’en vois qu’un : le changement.
La dictature d’un quotidien très pesant, avec tous ses revers en termes de pression, de stress, d’hésitation, d’obligations, a pris au piège une équipe gouvernementale qui s’agitait dans tous les sens pour assurer et tenter de convaincre de sa capacité à gérer le pays.
Une telle approche courtermiste, a fait transparaître au moins trois défaillances majeures :
1- une absence quasi-totale d’anticipation, de projection et de mobilisation autour d’aspirations collectives, légitimes et pressantes, de même que de grands enjeux d’avenir,
2- une absence d’initiatives fortes sur des leviers et opportunités pourtant bien identifiés et capables de propulser la croissance et l’emploi,
3- une équipe gouvernementale pâtissant de leadership et d’homogénéité, que le poids du quotidien a fini par mettre au grand jour, ses grandes divergences, ses dissonances, son essoufflement et sa démotivation.
Le Maroc vers lequel on doit inéluctablement se diriger pour être au rendez-vous de nos défis et aspirations multiples, aussi bien à l’échelle nationale que internationale, exige bien mieux que cela, mérite bien mieux que cela, à tous points de vue.
Tout prête à croire par conséquent, que la vingtaine de millions d’électeurs prendraient massivement le chemin des urnes le 8 septembre prochain et feraient le choix clair et net du véritable changement qui traduirait une réelle prise de conscience des grands atouts de notre pays et des enjeux de son futur très proche.
Ce qui permettrait de faire émerger une nouvelle majorité qui devrait être suffisamment forte, ramassée et homogène pour pouvoir imprimer les ruptures et le changement incontournables, et un gouvernement suffisamment expérimenté, compétent et innovant pour pouvoir mener les chantiers du changement avec le rythme et la collégialité qui s’imposent.
Il y va du Maroc développé, juste, solidaire et rayonnant auquel nous aspirons pour nous tous et pour nos générations futures.
Najib Mikou
Expert en Prospective et Etudes Stratégiques