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Le génie de Boualam Sansal




Comment cet écrivain de Talent, figure emblématique de la littérature francophone, a su bousculer – « avec juste des mots » - et piéger l’Algérie, la mettant face à ses contradictions ? Au point où elle a dû défigurer ses origines, ses écrits, ses paroles et ses actes pour servir sa propagande anti-macrono et maroco-sioniste.

Le piège de l’Algérie. 
Boualem Sansal a toujours été un penseur critique acerbe vis-à-vis du pouvoir algérien à travers toutes ses fictions et ses pamphlets, depuis Boumediene. Mais il n’avait jamais été inquiété pour cela, sauf à avoir dû démissionner - « avoir été démissionné » selon Alger - de son poste de haut fonctionnaire au ministère de l’industrie, 25 ans auparavant. 

Mais voilà que le 2 octobre 2024, il déclare dans une interview à Frontières, « Ce qu’ont fait les militaires, c’est inventer le Polisario pour déstabiliser le Maroc parce qu’ils voulaient un système communiste. Ils ne voulaient pas que les Algériens se disent : peut-être que si on faisait comme le Maroc, ça serait mieux, ils seraient plus libres, il y aurait du tourisme, les choses se passeraient un peu mieux [..] Quand la France a colonisé l’Algérie, toute la partie ouest faisait partie du Maroc, Tlemcen, Oran, jusqu’à Mascara [..]. La France a dessiné arbitrairement des frontières, pour rattacher tout l’est du Maroc à l’Algérie [..] » 

Bref, il raconte les vraies raisons de la guerre des sables, à savoir les promesses non tenues des résistants algériens de réviser les frontières maroco-algériennes à l’indépendance de cette dernière.  Et en même temps qu’il parle du Maroc comme d’un grand empire millénaire, il traite l’Algérie précoloniale (avant 1830) - c’est-à-dire la Régence d’Alger de son nom de l’époque - de « petites entités sans profondeur historique ». 

C’en était trop, « intolérable », pour le pouvoir algérien : jeter ainsi un éclairage désagréable sur des vérités historiques, déniées, dérangeait le nationalisme algérien, la mythologie nationale fondée sur l'idée d'une grande nation algérienne, une puissance énergétique, géographique, et démographique, unifiée et distincte, avant l’arrivée de la France, justifiant ses frontières (pourtant qualifiées d’« héritées du colonialisme »), la légitimité au pouvoir de son armée prosoviétique, ainsi que le rôle d’un parti unique (le FLN qui aurait ramené l’indépendance par le sang). Le régime actuel en Algérie muselait déjà toute critique, jusqu’à un simple like sur les réseaux sociaux. Il fallait museler Sansal.

Première grande erreur, Boualem Sansal disparaît, il est enlevé, avalé, à son arrivée à l’aéroport d’Alger le 16 novembre 2024, sans en informer sa famille, sans en rendre compte à quiconque, illustrant ainsi la nature du pouvoir algérien, un « état totalitaire dans son abjection la plus absolue  » qui a peur de toute remise en question de sa narrativité. Avant que ce pouvoir ne doive reconnaître, après 6 jours, son arrestation sous la pression médiatique française.

Ensuite on refuse le visa algérien à son avocat Mtre François Zimeray, « parce qu’il est juif !».  L’Algérie a toujours confondu religion juive et sionisme. On déclarera plus tard que Boualem Sansal a refusé l’avocat commis d’office, et déclaré se défendre tout seul. En somme un « procès stalinien », sans aucune défense. 

Les chefs d’inculpations dans la bouche du juge sont : « atteinte à l’unité nationale, outrage à un corps constitué, pratiques nuisant à la sécurité nationale et à l’économie, vidéos qui menacent la sécurité nationale », de quoi écoper de la perpétuité. Dans la bouche du président algérien, il avait été arrêté parce qu’il avait diné la veille avec l’ancien ambassadeur de France, Xavier Driencourt. 

Le juge l’interroge justement sur sa messagerie WhatsApp avec ce dernier pour justifier l’accusation « d’insulte à l’armée et aux institutions gouvernementales ». Sur cette messagerie, on peut lire une réponse de Boualem Sansal à Xavier Driencourt : « Merci de le dire et de le rappeler à ceux qui croient qu’en Algérie, on vit dans le bonheur parce qu’on a du pétrole et Chengriha ». En outre il reproche à l’accusé d’avoir mis en péril l’économie nationale pour m’avoir écrit que les BRICS avaient rejeté la candidature de l’Algérie, « information sans doute « confidentielle » ironise Xavier Driencourt.

A l’issue d’un procès de 30 mn, Boualem Sansal est condamné à 5 ans de prison ferme. Seulement. Dans un souci d’apaisement des relations franco-algériennes de plus en plus tendues, depuis la reconnaissance par la France de la souveraineté marocaine sur le Sahara occidental, les présidents Emmanuel Macron et Abdelmadjid Tebboune s’entendent sur une grâce présidentielle « à titre humanitaire ». 

Mais Boualem Sansal ne supporte pas le pléonasme, un effort superficiel qui ne considère pas les vérités historiques, ni les injustices perpétrées contre des voix dissidentes comme la sienne. Il rejette appel de sa condamnation, n’autorisant aucune grâce avant la fin du procès en appel.   

Le piège de la France 
Il oblige ainsi la France à assumer ou rejeter son rôle dans de soutien d’un régime autoritaire. Fraîchement naturalisé français, et plusieurs fois primé en Europe, la France ne pouvait se permettre de ne pas le défendre bec et ongle. Mais « Donnez-nous vos écrivains, et reprenez vos Haragas » titrait une caricature française, tandis que la droite française détournait également les dires de Boualem Sansal, pour servir son roman national de colonisation civilisatrice.

Et le Maroc dans tout cela ? également piégé, pour son profil bas dans cette affaire, au lieu de le déclarer Héro national. Après tout il est de père marocain, et on aurait adoré que le Maroc lui octroie la nationalité marocaine par décret royal pour bien compliquer la tâche de ses sbires. 

 



Dimanche 6 Avril 2025


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