Du spectre du 49.3 à la menace de dissolution.

Le président français a finalement choisi de se passer de l'approbation de  l'Assemblée nationale pour faire adopter sa réforme des retraites par un passage en force !

Jeudi16 mars , dans la matinée le Sénat avait adopté le texte retouché par la commission paritaire.

Grâce à un groupe sénatorial du parti LR , la cause était entendue. La France était sur le qui-vive à ce moment, qu'il s'agisse de l'Elysée, de la majorité gouvernementale qui comptait ses soutiens à l'Assemblée nationale des partis d'opposition ainsi que bien entendu les syndicats.

En effet, à quinze heures devait avoir lieu le vote chez les élus et la France des travailleurs retenait son souffle.
Et ce que ce redoutaient beaucoup a fini par survenir !

Macron convoque un conseil des ministres et demande au chef du gouvernement Elisabeth Borne d'appuyer sur le levier constitutionnel du 49.3 pour faire adopter le texte sans l'approbation de l'Assemblée nationale !

Les membres de la commission mixte paritaire s’ étaient accordé mercredi sur une même version du projet de loi, et il fallait que cette nouvelle" mouture du compromis" soit adoptée par les deux Assemblées.

Mercredi toujours,  Macron avait menacé de dissoudre l'Assemblée nationale en cas de vote perdant de sa réforme des retraites. Autrement dit,  messieurs- dames les députés, soit vous votez en faveur du plan Macron soit vous perdez votre fauteuil à l'Assemblée !

Du chantage pur et dur , mesquin et cynique qui signifie un flagrant échec pour Macron et son gouvernement sur ce dossier.
Pour se justifier, le président  français expliquera que lui n'a pas son fauteuil à perdre , qu'il veut sauver l'avenir du pays car la situation des finances du système de retraites ne lui laisse aucun choix .

Des arguments et des motivations qui ne trouveront pas d'écho favorable ni chez les syndicats ni auprès de l'opinion publique qui estime que le capital, CAC40 en premier , a réalisé des bénéfices records chiffrés à des centaines de milliards d'euros en 2022.

Après avoir longtemps fait planer le spectre d'un 49.3 , l'Elysée a finalement reculé , dans un premier temps,  préférant aller au vote comptant et spéculant sur la responsabilité des élus.

Emmanuel Macron avait toutefois menacé de dissoudre l'Assemblée nationale si jamais le vote est perdu, mais finalement, il a changé d'avis très peu de temps avant le vote .
Un revirement de dernière minute qui révélé un flagrant désaveu pour la majorité gouvernementale , extrêmement fragilisée par le chaos provoqué par ce plan de réforme !

Macron , après moi le déluge !

Une semaine plus tôt, il avait refusé de rencontrer les syndicats et s'était contenté de leur adresser une lettre.
Une lettre sans grand intérêt et qui a contribué à accentuer la colère , les mécontentements et l'incompréhension.

Si Elisabeth Borne a activé donc ce levier du 49.3 , c'est que l'Elysée n'était plus sûr de remporter ce vote et comme Emmanuel Macron ne voulait pas prendre le risque de voir sa réforme échouer , il a foncé vers le coup de force .

Le gouvernement français a certainement dépassé les "Borne " , et ceux et celles qui croient que Macron n'a pas répondu à la contestation se trompent car il a envoyé les forces de police à la rencontre des manifestants !

Et jeudi en soirée, les scènes de violence dans la capitale française et dans d'autres villes étaient tout simplement inédites !
Si les manifestations ont dégénéré et ne sont plus pacifiques , c'est le signe que la contestation va fatalement se radicaliser beaucoup estimant que la voix du peuple a droit au chapitre au sein des institutions élues, au nom de la morale et dela constitution !

Dans un déni de démocratie, le gouvernement français s'est ainsi entêté à faire un passage en force tout en méprisant et en ignorant la contestation qui gronde et en refusant le dialogue avec les syndicats.

Un grotesque et scandaleux déni de démocratie pour la cinquième République  qui prouve que les débats à propos de la réforme des retraites ont profondément fragilisé le président français et dans une moindre mesure Elisabeth Borne et son gouvernement.

En retrait des débats, Marine Le Pen et ses troupes regardaient les fractures s’ouvrir et les groupes se déchirer.
Pour marine le Pen, cette cacophonie est certainement du pain bénit, du pur bonus en termes de bénéfices électoralistes en vue de la prochaine présidentielle.

Marine et le RN entendent déposer des motions de censure  et de voter même celles déposées par la NUPES dans l'espoir de sauver les meubles, mais il s'agit juste de leviers constitutionnels inscrits dans le règlement de l'Assemblée nationale !

Depuis quelques mois , les français doivent subir des symptômes de " Macronie aigüe " et les signes d' une dérive autoritaire étaient persistants.

Mais là , il n'y a plus de place au doute : Macron ne fait même plus semblant et après moi le déluge .

Et le déluge de colère risque justement d'enflammer l'Hexagone avec l'explosion sociale qui couve .

Le déluge c'est la crise politique, la crise sociale et des airs de crise économique majeure qui s'entremêlent et risquent d'emporter la France dans un tourbillon de violence et de désordre .

Après les raffineries et les centrales EDF qui se mettent à l'arrêt le temps des manifestations, ainsi que les transports en commun, les appels à la grève générale vont se multiplier .Et ce même si les syndicats n'ont pas encore réussi à mettre la France à l'arrêt car les porte-monnaie sont vides et la réticence de certains secteurs rend difficile toute mobilisation générale en vue de grèves de longue durée pour bloquer la France!

Déjà , la capitale Paris  croule sous des tonnes d'ordures depuis que les éboueurs ont rejoint le mouvement de grève.

Dans la France d'aujourd'hui, pour conclure, celle du président Macron et bien avant probablement, l'Assemblée nationale et les partis qui y siègent ne représentent pas vraiment les français.

Ce qui est certain, c'est que depuis le départ Macron avait toutes les cartes en main et il avait élaboré un plan machiavélique pour faire adopter sa réforme avec ou sans l'aval des élus, que les français soient favorables ou pas !

Hafid Fassi Fihri