L'un des aspects les plus novateurs de l'ouvrage de Bennis réside dans sa critique de l'idée largement acceptée que l'autodétermination, sous la forme d'un référendum, est la seule solution viable au conflit du Sahara. Cette position, soutenue par le Front Polisario et ses alliés, est souvent présentée comme incontestable. Or, Bennis montre avec rigueur que d'autres formes d'autodétermination, telles que l'association ou l'intégration avec un État souverain, sont également reconnues par la Charte des Nations Unies. Il révèle ainsi comment cette option a été négligée, voire délibérément ignorée, par certains analystes et militants, au détriment d'une approche plus nuancée et pragmatique.
L'évolution des positions internationales
Le livre explore également les changements subtils mais significatifs dans les résolutions des Nations Unies concernant le Sahara, notamment depuis 2007. L'accent mis sur la nécessité d'une solution politique négociée, fondée sur le compromis et le réalisme, marque une rupture avec les approches antérieures. Cette évolution, souvent sous-estimée, est au cœur de la thèse de Bennis. Il met en lumière comment le Conseil de sécurité a progressivement privilégié une solution pragmatique, loin des idéaux rigides promus par certains acteurs régionaux.
L'analyse de Bennis va plus loin en examinant les motivations des principales parties prenantes, notamment l'Algérie. Il décrit comment la position de ce pays a évolué depuis les années 1960, passant d'un soutien à des négociations entre le Maroc et l'Espagne à une opposition farouche à la souveraineté marocaine sur le Sahara. Ce changement de cap, souvent motivé par des considérations géopolitiques et idéologiques, est disséqué avec une précision qui invite à repenser les véritables enjeux de ce conflit.
Les biais dans les discours académiques et médiatiques
Un autre point crucial abordé dans le livre est la manière dont certains chercheurs et journalistes occidentaux ont influencé le discours dominant sur le Sahara. Bennis accuse ces acteurs de biais, favorisant souvent les positions algériennes au détriment d'une analyse objective des revendications marocaines. À travers une comparaison minutieuse entre les archives de l'ONU, les rapports des services de renseignement, et les analyses académiques, l'auteur met en évidence les lacunes et les manipulations dans les travaux de ceux qui défendent une ligne anti-marocaine.
Les répercussions géopolitiques et économiques
L'impact du conflit sur les relations du Maroc avec l'Union européenne est également exploré, notamment en ce qui concerne les accords commerciaux contestés par la Cour européenne. Bennis dépasse l'analyse juridique pour s'intéresser aux implications géopolitiques et économiques plus larges, soulignant l'importance de considérer ces facteurs dans la recherche d'une solution durable au conflit.
Vers une nouvelle approche de l"affaire du Sahara Marocain ?
Enfin, l'ouvrage souligne l'importance de la politique africaine du Roi Mohammed VI, qui a permis au Maroc de rallier un soutien croissant parmi les nations africaines. Cette dynamique régionale est présentée comme un levier essentiel dans la stratégie marocaine pour le Sahara, marquant une nouvelle ère dans la diplomatie du Royaume.
"The Self-Determination Delusion" de Samir Bennis est une invitation à repenser les bases mêmes du débat sur le Sahara. En remettant en cause les récits simplistes et en proposant une analyse complexe et nuancée, ce livre ouvre la voie à un dialogue plus éclairé et plus constructif sur l'avenir de cette région stratégique.