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La mondialisation, fossoyeuse de la sécurité sociale des nations bâties sur un siècle d’efforts ?

Maroc : Peut-on concilier mondialisation et État social ? Un pari audacieux !


Mondialisation et État social : l’audacieux pari du Maroc
Accords de libre-échange et réformes sociales : une coexistence possible ?
Maroc : peut-on réussir l’ouverture économique sans sacrifier l’État social ?



Le paradoxe de la mondialisation

La mondialisation, phénomène incontournable de notre époque, est souvent perçue comme un catalyseur de croissance économique et de progrès technologique. Cependant, elle n'est pas sans effets délétères. L'un des dommages les plus discutés est son impact sur les systèmes de sécurité sociale, fruits de décennies, voire d'un siècle, d'efforts et de luttes sociales dans les pays développés.

La promesse de la mondialisation est celle de l'interconnexion et de la prospérité partagée. Pourtant, cette ouverture des marchés et cette compétition globale ont un prix : une pression constante sur les politiques sociales. Les États, confrontés à des délocalisations et à une concurrence accrue, réduisent souvent les charges sociales des entreprises pour rester attractifs. Cette logique met à mal les systèmes de protection sociale, initialement conçus pour garantir un filet de sécurité à leurs citoyens.

Au cours du siècle dernier, des pays comme la France, l'Allemagne ou les pays scandinaves ont construit des systèmes de sécurité sociale robustes. Ces dispositifs, financés par des cotisations salariales et patronales, reposaient sur une économie nationale relativement stable. La mondialisation, en provoquant une mobilité accrue des capitaux et des entreprises, fragilise ce modèle. Les entreprises, sous la pression de maximiser leurs profits dans un contexte mondial, militent pour des baisses de charges qui grèvent les budgets publics, rendant les systèmes de santé, de retraite et d'assurance chômage vulnérables.

De plus, la mondialisation engendre une déresponsabilisation des multinationales vis-à-vis des pays où elles opèrent. Les entreprises externalisent leurs activités dans des régions où les normes sociales sont moins strictes, laissant les travailleurs locaux supporter le coût de l'insécurité sociale. Pendant ce temps, les pays d'origine, autrefois fiers de leurs acquis sociaux, voient leurs citoyens perdre progressivement ces droits.

Pour contrer ces effets, des solutions existent. Une coopération internationale plus étroite, imposant des standards sociaux universels, pourrait freiner cette spirale descendante. De même, une fiscalité plus équitable pour les multinationales, redistribuée au profit des systèmes de protection sociale, offrirait une piste pour préserver ces acquis historiques.

La mondialisation, si elle est laissée sans régulation, risque de saper les fondations mêmes des systèmes de sécurité sociale, témoins des luttes sociales du XXᵉ siècle. Cependant, avec une volonté politique forte et une mobilisation citoyenne, il reste possible d'imaginer un équilibre entre compétitivité économique et justice sociale.

Maroc : Peut-on concilier mondialisation et État social ? Un pari audacieux !

Le Maroc, acteur ambitieux sur la scène économique mondiale, a fait le pari audacieux d'embrasser la mondialisation tout en s'engageant dans un projet de grande envergure : la construction d’un État social. Avec plus de 50 accords de libre-échange signés, le royaume mise sur l’ouverture économique pour dynamiser son commerce extérieur et attirer des investissements. Parallèlement, des réformes majeures, comme la généralisation de la couverture sociale et la réforme de la santé et de l’éducation, tracent les contours d’un État social ambitieux. Mais ces deux trajectoires sont-elles compatibles, ou risquent-elles de s’entrechoquer ?

L’intégration dans l’économie mondiale, grâce aux accords de libre-échange, permet au Maroc de diversifier ses partenaires commerciaux, de renforcer sa compétitivité et d’attirer des investissements directs étrangers. Des secteurs comme l’automobile, l’aéronautique ou encore l’agriculture tirent profit de ces accords.

Cependant, cette ouverture impose une pression accrue sur l’économie locale, notamment les petites et moyennes entreprises, souvent peu préparées à affronter la concurrence internationale.

Par ailleurs, l’ouverture des marchés réduit parfois les marges de manœuvre fiscales, car pour séduire les investisseurs étrangers, les gouvernements adoptent souvent des politiques fiscales attractives, au détriment des recettes publiques nécessaires pour financer les services Depuis 2021, le Maroc s’est lancé dans un vaste chantier de refonte de son modèle social, marqué par des réformes structurantes telles que :
 
  •     La généralisation de l’Assurance Maladie Obligatoire (AMO) pour l’ensemble de la population.
  •     La réforme des retraites, pour garantir une couverture élargie et pérenne.
  •     L’amélioration des infrastructures éducatives et sanitaires, au cœur de la lutte contre les inégalités.

Cependant, la mise en œuvre de ces réformes exige des moyens financiers considérables et une gouvernance rigoureuse. Or, dans un contexte où l’État subit une pression fiscale pour rester compétitif au niveau international, les marges budgétaires se réduisent, mettant en péril la durabilité de ces politiques.

Cette double ambition place le Maroc face à un dilemme stratégique. Comment financer un État social solide tout en continuant à libéraliser son économie et attirer des investisseurs étrangers ? Les défis sont nombreux :
 
  • Compétition fiscale : Comment concilier l’attractivité fiscale nécessaire pour attirer les IDE avec les besoins de financement des politiques sociales ?
  • Soutien aux secteurs locaux : Les accords de libre-échange exposent les producteurs locaux à une concurrence accrue, parfois déloyale. Des mesures de soutien ciblées seront essentielles pour protéger l’économie locale.
  • Cohérence des politiques publiques : Le succès de cette transition repose sur une gouvernance intégrée, où les politiques économiques et sociales ne se cannibalisent pas mutuellement.

Pour réussir ce pari, le Maroc devra trouver un équilibre subtil entre ouverture économique et consolidation sociale :
Miser sur des accords équilibrés : Renégocier ou ajuster certains accords de libre-échange pour protéger les secteurs stratégiques tout en restant attractif.
Renforcer la fiscalité progressive : Garantir une redistribution équitable pour financer les réformes sociales sans grever la compétitivité.
Innover dans le financement social : Explorer des partenariats public-privé ou des mécanismes de financement innovants pour éviter une pression excessive sur les finances publiques.

Le Maroc s’engage sur une voie complexe mais prometteuse. Si la mondialisation offre des opportunités indéniables, elle met également à rude épreuve la capacité de l’État à construire un modèle social inclusif. Le succès de cette dualité repose sur une gouvernance intelligente et des choix politiques cohérents. La capacité du royaume à concilier ces ambitions pourrait devenir un modèle pour d’autres pays émergents confrontés aux mêmes défis.

 

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Adnane Benchakroun



Dimanche 22 Décembre 2024


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