Écouter le podcast de cet article :
Scruter les situations antinomiques des paradoxes pour les surmonter plastiquement, tel paraît être le défi pour cet artiste-philosophe au parcours forcément mouvementé, avec ses doutes, ses craintes, ses remises en cause, ses questionnements et ses réponses picturales fécondes, parfois troublantes mais foncièrement heureuses.
L'enchainement diversifié et explorateur de ses approches a commencé par l'assimilation et le développement de sa théorie esthétique-éthique du Paradoxart, ce courant de pensée plastique à l'origine d'un mouvement dont Chemao fut, pendant les années 1980, l'un des principaux fondateurs aux côtés d'artistes Marocains et Allemands.
Le concept défendu par Chemao et consorts consiste en la résorption plastiquement du conflit contradictoire des paradoxes, alertant ainsi, par la réflexion et le débat qui en découlent, sur le danger de l'invasion des paradoxes déformateurs des règles éthiques et morales fondamentales de la société.
Par la volonté du libre arbitre qui anime, dans la quête de l'artiste, de nouvelles formes nécessitant de nouvelles méthodes adaptables à l'évolution de sa vision, c'est par périodes, moyennant différents styles, que son art a choisi de s'exprimer, évitant ainsi un style particulier qui resterait immuable, voire stérile.
Il y a eu la période réellement fondatrice, travaillée techniquement et théoriquement, que lui-même qualifie de période "Jaune Paradoxart". Caractérisée par une couleur jaune fulgurant, elle dénonce la prédominance de la futilité et se veut un questionnement persistant qui ne saurait trouver de valable réponse que dans l'expression plastique. Nacir Chemao raconte que le jaune fulgurant lui a été un jour inspiré par le "jaune" d'un œuf qu'il s'apprêtait à déguster au petit déjeuner. Il ne cessait de le contempler et d'en analyser la texture, la nature et la raison biologique et génétique de sa couleur.
Ce n'était alors plus un banal œuf à avaler, mais fondamentalement une couleur à adopter et à réussir puisqu'avant d'avoir répondu à une composition chimique, elle devait avoir un message fort, un sens vital, existentiel. La vision philosophique est ainsi partie d'une chose matérielle dont la couleur spécifique qui rappelle un cri, allait devenir l'une des composantes du fameux Tryptique. Une période au fait riche et mouvementée.
Vint la période Bleue. Une dénomination qui rappelle un peu celle des artistes du Blau-Reiter, période bleue du cubisme de Picasso ou du "Monochrome bleu" d’Ives Klein ou encore celui de Jean Monnneret. Pour Naciri Chemao, il ne pourrait y avoir qu'un seul et unique bleu et, partant du principe qu'il existe une infinité de bleus, il a choisi son bleu à lui, qu'il a lui-même inventé pour parfaire l'idée paradoxale de l'Eros et du sommum de l'extase. Son bleu a été une spéculation esthétique plastique, mystique et existentielle de la procréation, du passage de la vie vers la mort...
Ainsi, un objet abandonné et sans valeur pour le commun des mortels, paraissait à l'artiste être esthétiquement encore vivant et, du coup, il y voit un paradoxe puisque l'objet est ressuscité et doté d'une valeur esthétique une fois peint avec son beau bleu.
L'enchainement diversifié et explorateur de ses approches a commencé par l'assimilation et le développement de sa théorie esthétique-éthique du Paradoxart, ce courant de pensée plastique à l'origine d'un mouvement dont Chemao fut, pendant les années 1980, l'un des principaux fondateurs aux côtés d'artistes Marocains et Allemands.
Le concept défendu par Chemao et consorts consiste en la résorption plastiquement du conflit contradictoire des paradoxes, alertant ainsi, par la réflexion et le débat qui en découlent, sur le danger de l'invasion des paradoxes déformateurs des règles éthiques et morales fondamentales de la société.
Par la volonté du libre arbitre qui anime, dans la quête de l'artiste, de nouvelles formes nécessitant de nouvelles méthodes adaptables à l'évolution de sa vision, c'est par périodes, moyennant différents styles, que son art a choisi de s'exprimer, évitant ainsi un style particulier qui resterait immuable, voire stérile.
Il y a eu la période réellement fondatrice, travaillée techniquement et théoriquement, que lui-même qualifie de période "Jaune Paradoxart". Caractérisée par une couleur jaune fulgurant, elle dénonce la prédominance de la futilité et se veut un questionnement persistant qui ne saurait trouver de valable réponse que dans l'expression plastique. Nacir Chemao raconte que le jaune fulgurant lui a été un jour inspiré par le "jaune" d'un œuf qu'il s'apprêtait à déguster au petit déjeuner. Il ne cessait de le contempler et d'en analyser la texture, la nature et la raison biologique et génétique de sa couleur.
Ce n'était alors plus un banal œuf à avaler, mais fondamentalement une couleur à adopter et à réussir puisqu'avant d'avoir répondu à une composition chimique, elle devait avoir un message fort, un sens vital, existentiel. La vision philosophique est ainsi partie d'une chose matérielle dont la couleur spécifique qui rappelle un cri, allait devenir l'une des composantes du fameux Tryptique. Une période au fait riche et mouvementée.
Vint la période Bleue. Une dénomination qui rappelle un peu celle des artistes du Blau-Reiter, période bleue du cubisme de Picasso ou du "Monochrome bleu" d’Ives Klein ou encore celui de Jean Monnneret. Pour Naciri Chemao, il ne pourrait y avoir qu'un seul et unique bleu et, partant du principe qu'il existe une infinité de bleus, il a choisi son bleu à lui, qu'il a lui-même inventé pour parfaire l'idée paradoxale de l'Eros et du sommum de l'extase. Son bleu a été une spéculation esthétique plastique, mystique et existentielle de la procréation, du passage de la vie vers la mort...
Ainsi, un objet abandonné et sans valeur pour le commun des mortels, paraissait à l'artiste être esthétiquement encore vivant et, du coup, il y voit un paradoxe puisque l'objet est ressuscité et doté d'une valeur esthétique une fois peint avec son beau bleu.
S'en suit le thème du cheval, mais un cheval toujours à l'état sauvage, libéré de la contrainte de porter une selle, de représenter une bataille ou encore de faire partie d'une "Tbourida" (Fantasia). Juste le cheval, symbole de liberté. Ce n'est pas une période proprement dite, mais un thème érigé en élément récurrent et constituant à l'infini des phases transitoires. C'est un "personnage" refuge dans lequel s'identifie l'artiste.
Ce qui intéresse à priori l'artiste chez le cheval c'est sa forme, son extraordinaire caractère interchangeant puisque indépendant. Il "rappelle mon tempérament" proclame fièrement l'artiste. "Sa morphologie et notamment sa force vitale, m'aident pratiquement à exprimer ces trois notions qui me tiennent à cœur : Esthétique, énergie, mouvement".
Et pour cause. Le cheval appelle le sacré et force le respect. Créature sublime qui a de tout temps imposé estime et déférence, elle constitue un piédestal où l'on apprend la modestie. Les chevaux de Chemao ne sont cependant pas l'objet d'un symbolisme.
Ils sont le fruit d'une libre imagination purement artistique. Leur forme, en tant que signe à faire revivre les lignes, motive l'artiste pour qui ces lignes traversent un champ fluide et font chanter d'autres couleurs, d'autres formes, d'autres races. Le but est d'utiliser leurs lignes et de les faire courir dans tous les sens, les transformant en d'autres chevaux. Au sens fort du terme, ces créatures imprègnent l'âme faisant qu'il finit par s'y identifier.
Le Tryptique est ainsi au complet mais sans aucun hermétisme, puisque thèmes et séries se font leur place dans une œuvre foisonnante.
C'est le cas de la série "Industrie-Nature" (1986), la série des silhouettes (1986- 1989), la série Jazz, ou encore la série Bombas qui rappelle la forme arrondie, une figure exprimant quelque chose de beaucoup plus fort que la vie ou la mort, où l'homme, épousant la position fœtale, évoque la force tranquille.
Et l'on en arrive au thème enchanteur de l'arbre, une façon très judicieuse de nous convier à une table sous les ombrages d'un immense arbre imaginaire. Plus qu'un rappel à la nature, c'est un signe de protection d'une vie harmonieuse et communicative.
C'est la fête à table ! Tout le monde se sent invité dans ce jeu de formes et de couleurs qui expriment la grande joie et le bonheur de se retrouver et d'échanger les goûts... comme dans une grande famille.
En fin de compte, l'ensemble de l'œuvre de Naciri Chemao puise dans un imaginaire où l'irréel rappelle à s'y méprendre le réel, son paradoxe...
Du jeudi 4 mai au 3 juin 2023.
Espace RIVAGES, siège de la Fondation Hassan II pour les Marocains Résidant à l’Etranger, Avenue Ibn Sina, Rabat.
Rédigé par Jamal Hajjam
Ce qui intéresse à priori l'artiste chez le cheval c'est sa forme, son extraordinaire caractère interchangeant puisque indépendant. Il "rappelle mon tempérament" proclame fièrement l'artiste. "Sa morphologie et notamment sa force vitale, m'aident pratiquement à exprimer ces trois notions qui me tiennent à cœur : Esthétique, énergie, mouvement".
Et pour cause. Le cheval appelle le sacré et force le respect. Créature sublime qui a de tout temps imposé estime et déférence, elle constitue un piédestal où l'on apprend la modestie. Les chevaux de Chemao ne sont cependant pas l'objet d'un symbolisme.
Ils sont le fruit d'une libre imagination purement artistique. Leur forme, en tant que signe à faire revivre les lignes, motive l'artiste pour qui ces lignes traversent un champ fluide et font chanter d'autres couleurs, d'autres formes, d'autres races. Le but est d'utiliser leurs lignes et de les faire courir dans tous les sens, les transformant en d'autres chevaux. Au sens fort du terme, ces créatures imprègnent l'âme faisant qu'il finit par s'y identifier.
Le Tryptique est ainsi au complet mais sans aucun hermétisme, puisque thèmes et séries se font leur place dans une œuvre foisonnante.
C'est le cas de la série "Industrie-Nature" (1986), la série des silhouettes (1986- 1989), la série Jazz, ou encore la série Bombas qui rappelle la forme arrondie, une figure exprimant quelque chose de beaucoup plus fort que la vie ou la mort, où l'homme, épousant la position fœtale, évoque la force tranquille.
Et l'on en arrive au thème enchanteur de l'arbre, une façon très judicieuse de nous convier à une table sous les ombrages d'un immense arbre imaginaire. Plus qu'un rappel à la nature, c'est un signe de protection d'une vie harmonieuse et communicative.
C'est la fête à table ! Tout le monde se sent invité dans ce jeu de formes et de couleurs qui expriment la grande joie et le bonheur de se retrouver et d'échanger les goûts... comme dans une grande famille.
En fin de compte, l'ensemble de l'œuvre de Naciri Chemao puise dans un imaginaire où l'irréel rappelle à s'y méprendre le réel, son paradoxe...
Du jeudi 4 mai au 3 juin 2023.
Espace RIVAGES, siège de la Fondation Hassan II pour les Marocains Résidant à l’Etranger, Avenue Ibn Sina, Rabat.
Rédigé par Jamal Hajjam