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​Femmes rurales et entrepreneuriat : quand le crédit devient un mirage


Rédigé par le Mercredi 26 Mars 2025



L’image est belle sur les affiches : des femmes souriantes, réunies autour d’un projet coopératif, fabriquant des produits du terroir ou montant une petite entreprise. Mais derrière ces images, la réalité est bien plus complexe. Pour des milliers de femmes rurales marocaines, l’accès au financement reste un parcours d’obstacles, souvent infranchissable.

Selon l’étude du Haut-Commissariat au Plan (HCP) publiée en mars 2025, les femmes représentent à peine 14% des dirigeantes d’entreprises et 17% des associées, un chiffre encore plus faible en milieu rural. La raison principale ? L’absence d’accès au crédit bancaire, liée à une combinaison de facteurs économiques, géographiques et culturels.

Premier frein : les garanties exigées. La plupart des femmes rurales ne possèdent ni terrain ni propriété en leur nom. Faute de garanties solides, elles ne peuvent prétendre à un prêt bancaire classique. De plus, le faible taux de bancarisation des femmes, notamment chez les cheffes de micro-entreprises, aggrave cette exclusion.

Deuxième obstacle : la distance. Les guichets bancaires et les services de microfinance sont souvent concentrés dans les grandes villes. Pour une femme vivant dans un douar reculé, se rendre en agence signifie parfois parcourir plusieurs dizaines de kilomètres, avec des frais de transport, des contraintes culturelles (mixité, temps d’absence) et une logistique familiale difficile à gérer.

Troisième barrière : un accompagnement inadapté. Les dispositifs d’appui à l’entrepreneuriat ne tiennent pas toujours compte des besoins spécifiques des femmes rurales. Les formations proposées ne sont pas contextualisées, les formateurs ne sont pas sensibilisés aux réalités locales, et les horaires sont peu compatibles avec leurs responsabilités domestiques. Il manque aussi des services annexes essentiels, comme la garde d’enfants ou l’appui juridique.

Résultat : seules 9,2% des femmes rurales occupaient un emploi salarié en 2019, et près de 98% des actives travaillaient dans l’informel. Les coopératives féminines, pourtant nombreuses, souffrent de gouvernance fragile, d’un faible encadrement technique et d’un accès limité aux marchés.

Pourtant, le potentiel est là. De nombreuses femmes souhaitent créer leur activité, participer à la vie économique, valoriser les savoir-faire locaux. Mais elles se heurtent à un système qui ne parle pas leur langue, au sens propre comme au figuré.

Le HCP appelle à une réforme structurelle de l’accès au financement : fonds de garantie spécifiques, microcrédits adaptés, plateformes mobiles, mais aussi intégration des services de soutien dans les territoires ruraux (conseil, incubation, accompagnement). Il est également urgent de repenser l’ingénierie sociale : sensibiliser les familles, former les fonctionnaires locaux, créer des environnements favorables à l’entrepreneuriat féminin.

Car l’enjeu dépasse l’économie. Il s’agit d’un combat pour l’inclusion, pour la reconnaissance, et pour une société plus équitable. Offrir du crédit aux femmes rurales, ce n’est pas simplement prêter de l’argent : c’est leur faire crédit, humainement, pour qu’elles reprennent place dans le développement du pays.

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Mercredi 26 Mars 2025

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