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Tunisie : Rached Ghannouchi, chef du parti Ennahdha, arrêté


Rédigé par le Mercredi 19 Avril 2023

À 81 ans, Rached Ghannouchi, chef du parti islamo-conservateur Ennahdha a été arrêté, lundi, selon les autorités tunisiennes.



« Guerre civile »

Les autorités tunisiennes ont arrêté le 17 avril Rached Ghannouchi, le chef du mouvement islamo-conservateur Ennahdha.

Il est considéré comme l'un des principaux opposants au président Kaïs Saïed et était également le dirigeant du Parlement dissous en juillet 2021 par le président tunisien. Cette arrestation marque l'opposant le plus important à avoir été arrêté depuis le coup de force en Tunisie.
 
L’homme a été arrêté par des policiers à son domicile à Tunis, a affirmé Ennahdha dans un communiqué, en dénonçant « ce développement extrêmement grave » et appelant à sa « libération immédiate ».
 
Mondher Lounissi, le vice-président d'Ennahdha, a déclaré que Ghannouchi avait été emmené dans une caserne de police pour être interrogé, sans la présence de ses avocats.

Cette arrestation fait suite à des déclarations rapportées par les médias, dans lesquelles Ghannouchi a averti que la Tunisie pourrait être confrontée à une "guerre civile" si l'islam politique, qui est la base de son parti, était éliminé.
 
L'arrestation a eu lieu pendant l'iftar, le repas de rupture du jeûne du ramadan, et seulement quelques heures avant que les musulmans célèbrent la nuit sacrée "Laylat Al Qadr".
 
En février, Rached Ghannouchi avait comparu devant le pôle judiciaire antiterroriste suite à une plainte l'accusant d'avoir qualifié les policiers de « tyrans ».

Il avait ensuite été entendu en novembre 2022 par un juge du même pôle judiciaire dans une affaire liée à l'envoi présumé de jihadistes en Syrie et en Irak.
 
En juillet de cette même année, il avait été interrogé pour des soupçons de corruption et de blanchiment d'argent relatifs à des transferts de fonds étrangers vers une organisation caritative affiliée à Ennahdha.

Plusieurs arrestations

Depuis le début du mois de février, les autorités ont mis en détention plus de vingt opposants et personnalités, dont des anciens ministres, des hommes d'affaires, ainsi que le directeur de Mosaïque FM, la station de radio la plus écoutée du pays.
 
Ces arrestations, qui ont été dénoncées par des organisations locales et internationales de défense des droits humains, ont visé des personnalités politiques de premier plan appartenant à la principale coalition d'opposition, le Front de Salut National (FSN), dont fait partie le parti Ennahdha. Le président Saïed a qualifié ces personnes de "terroristes".
 
« L’arrestation du chef du plus important parti politique au pays, qui a toujours montré son attachement à l’action politique pacifique, marque une nouvelle phase dans la crise », a réagi le président du FSN, Ahmed Néjib Chebbi. « Cela relève de la vengeance aveugle contre les opposants », a-t-il ajouté.
 
Rached Ghannouchi, qui avait été un opposant de premier plan pendant les régimes de Habib Bourguiba et Zine el-Abidine Ben Ali, est retourné au pays après vingt ans d'exil à Londres, suite à la chute du dictateur en 2011. À son retour, des milliers de personnes ont célébré son retour.

Cependant, depuis la révolution, sa popularité a progressivement diminué, car certains l'accusent d'être un manipulateur pragmatique qui est prêt à tout pour rester au pouvoir.

« Démocrate musulman »

Même s'il n'a jamais réussi à obtenir une majorité absolue, il a toujours veillé à ce qu'Ennahdha soit un élément clé dans les différentes coalitions depuis la révolution.
 
Cela l'a amené à conclure des alliances peu conventionnelles avec des partis politiques tels que Qalb Tounes du riche homme d'affaires Nabil Karoui ou encore avec l'ancien président Beji Caïd Essebsi. Cette approche a été justifiée par la nécessité d'un "consensus" vital pour la transition démocratique.
 
Au commencement de sa carrière, il avait initialement puisé son inspiration auprès des Frères musulmans égyptiens, avant de se tourner vers le modèle islamiste turc de Recep Tayyip Erdogan.
 
Par la suite, il a transformé Ennahdha en un mouvement civil, dont l'objectif était de se concentrer exclusivement sur la politique. Depuis, il se présente comme un "démocrate musulman", qui défend des valeurs conservatrices sans être dogmatique.


L'odj avec Libération





Mercredi 19 Avril 2023

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