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Trump ressuscite la politique là où les experts l’avaient enterrée


Rédigé par La Rédaction le Samedi 12 Avril 2025



Il y a des moments où l’histoire ricane. Pendant des années, les oracles de la mondialisation – économistes, consultants, géants de Davos – nous avaient assuré que la politique avait cessé d’exister, absorbée, digérée, et finalement dissoute par l’économie de marché mondialisée. On ne gouvernait plus, on gérait. La main invisible décidait, les peuples suivaient.

Puis, Donald Trump est arrivé. Fracassant les certitudes à coups de tweets et de droits de douane, il a remis l’État, le protectionnisme et même la souveraineté nationale sur le devant de la scène. Avec lui, l’économie n’est plus une force autonome, c’est un champ de bataille politique. Il ne négocie pas des accords : il impose des rapports de force. Il ne parle pas de croissance : il parle d’emplois « pour les Américains ». Et soudain, la vieille dichotomie entre politique et économie redevient visible, palpable, brutale.

Trump, en somme, n’est pas qu’un symptôme. Il est un rappel. La politique n’est pas morte. Elle était juste mise en sommeil. Et il aura suffi d’un président imprévisible pour rappeler au monde que, face aux algorithmes et aux marchés, un bulletin de vote peut encore faire trembler la planète.

Débat : Trump prouve que la politique n’est pas morte… ou alors, c’est un zombie très agité ?

Zeinab  : On l’avait enterrée, moquée, effacée au profit des "forces du marché". On nous avait seriné que les politiques ne décident plus, qu’ils ne font qu’accompagner les mouvements globaux de l’économie, technocrates impuissants face aux multinationales, aux GAFAM, à la spéculation. Et puis, Trump est arrivé, comme un éléphant dans le magasin de porcelaine néolibérale.

En rétablissant les frontières commerciales, en relocalisant les emplois, en défiant frontalement la Chine, l’OTAN, les Accords de Paris, il a montré que la politique — dans sa version la plus brutale — pouvait encore prendre le contrôle du jeu. Il a imposé l’idée que les peuples pouvaient reprendre la main. Que le "Make America Great Again" n’était pas un slogan de pub, mais une volonté de reprogrammer le logiciel mondial.

Adnane : Tu confonds politique avec spectacle. Ce que Trump a ramené, c’est un show à ciel ouvert, un théâtre de la brutalité. Bien sûr qu’il a agité les symboles de souveraineté, bousculé les élites, insulté les institutions. Mais au fond, qu’a-t-il réellement changé ? Les inégalités ont explosé, les lobbies sont toujours là, et les multinationales — qu’il prétendait combattre — ont vu leurs profits grimper sous sa présidence.

Il n’a pas redonné vie à la politique, il l’a vampirisée. Il s’est servi du langage de la rupture pour renforcer un autre système : celui du populisme à flux tendu, de la division permanente, et de la gouvernance par la peur. Rien de tout cela ne fait renaître la souveraineté. Au contraire, ça l’abîme.

Zeinab : Et pourtant, dans ce monde où tout semblait programmé d’avance — croissance sans fin, délocalisation inévitable, démocratie désincarnée — Trump a créé une faille. Il a donné aux électeurs le sentiment qu’ils pouvaient renverser la table. C’est ça, la vraie politique : introduire l’imprévu, casser le ronron, remettre l’humain au cœur du processus. Il a montré que le bulletin de vote pouvait encore renverser les certitudes.

Adnane : Oui, mais à quel prix ? À force de gouverner par clash, il a fracturé l’opinion, miné les contre-pouvoirs, et affaibli les institutions. C’est facile de "faire de la politique" quand on méprise les règles. C’est même séduisant. Mais ce n’est pas forcément sain. La vraie politique, ce n’est pas seulement d’imposer une volonté, c’est de bâtir un contrat social, de tisser du consensus. Or Trump ne crée pas du lien : il fabrique des ennemis.

Zeinab : Peut-être. Mais il a réveillé un instinct politique endormi. Il a obligé les démocraties à se regarder dans le miroir. À s’interroger sur leur dépendance à l’économie globalisée, sur leur perte d’autonomie stratégique. Et même ses adversaires, aujourd’hui, reprennent ses thèmes — relocalisation, souveraineté, maîtrise des flux migratoires. C’est bien la preuve que le politique peut encore orienter l’histoire.

Adnane : Ou alors, c’est la preuve que les slogans vides et les postures autoritaires sont contagieux. Ce que Trump a prouvé, ce n’est pas la résilience de la politique, mais sa vulnérabilité face à l’irrationnel. Il n’a pas sauvé la politique, il a accéléré sa mutation en série Netflix. Et dans cette série, les faits sont secondaires. Ce qui compte, c’est le choc, le clash, le buzz.

​Donald Trump a-t-il réactivé la politique dans un monde qui la croyait morte ?

Oui, si l’on entend par là sa capacité à déranger l’ordre établi, à rappeler que la souveraineté nationale existe, et que les électeurs peuvent encore bouleverser le système. Non, si l’on considère que cette résurgence s’est faite au détriment des institutions, de la vérité et du vivre-ensemble.

Trump n’a pas ressuscité la politique. Il l’a ramenée sur scène, maquillée, hurlante, parfois grotesque. Mais vivante. Et peut-être est-ce déjà trop, ou déjà bien.





Samedi 12 Avril 2025

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