La prospective territoriale, ou l’anticipation territoriale, est capitale pour engager puis accompagner des transitions durables au Maroc (écologique, énergétique, culturelle, économique, sociétale, etc.). Les réalités territoriales nationales d’aujourd’hui permettent de constater que davantage d’efforts méritent d’être fournis et que l’innovation et la performance devront être au cœur des méthodes nouvelles à privilégier, telles que la prospective ou l’anticipation. Explications. 

L’anticipation territoriale est considérée comme un ensemble de démarches et outils qui permettent aux acteurs territoriaux de programmer les plans de développement pérennes sur la base de prévisions et analyses des évolutions potentielles à venir. Cela inclut des études préalables des tendances démographiques, sociales, économiques, environnementales et technologiques.

En intégrant ces éléments dans les processus de planification, les territoires peuvent mieux se préparer aux défis futurs. 

L’anticipation territoriale devrait être systématique comme approche servant à imaginer et à préparer l’avenir d’un territoire. Contrairement à la planification traditionnelle, tournée vers le court terme, voire le moyen-terme, la prospective adopte une vision à long terme. Elle s’appuie sur l’analyse des tendances actuelles, l’identification des incertitudes et la construction de scénarios diversifiés.

Enjeux cruciaux d'une approche proactive

Les mesures proactives peuvent par exemple viser à éviter les risques sociaux, économiques voire sécuritaires comme la radicalisation comportementale de la jeunesse même diplômée, voire son désintérêt croissant de la chose publique et de l’intérêt général.

Ces jeunes qui se sentent parfois exclus et rejetés par la société, trouvent refuge dans les réseaux sociaux, nourrissent des rêves d’immigration clandestine, ou vivent une misère sentimentale, sociale et intellectuelle qui représente la base  d’un terreau fertile pour le populisme politique sous couvert religieux en l’occurrence. Une approche anticipative territorialisée ne peut qu’être de nature à impliquer ces cibles faciles, à les intégrer et à les maintenir du bon côté de la société. 

Par ailleurs, et tel qu’enregistré dans les zones du sud-est et sud-ouest marocain en ce début septembre 2024, les territoires sont de plus en plus confrontés aux effets du changement climatique et même à des phénomènes climatiques « exceptionnels » .

L’adoption systématique de mécanismes d’anticipation pourrait permettre sans doute d’identifier les risques, comme les inondations ou les sécheresses, et de mettre en place des stratégies d’adaptation et d’atténuation efficaces. Sur le plan démographique et sociétal, et avec l’évolution des modes de vie, les mutations culturelles et l’intensification des migrations régionales et nationales, il est crucial d’anticiper les besoins en logement, en santé, en éducation, en services publics et en infrastructures et équipements de base pour répondre à une population changeante et, donc, à des besoins de plus en plus croissants et alarmants.

Il y a désormais un besoin patent d’anticipation et de projection pour intégrer les enjeux d’avenir tels que les évolutions économiques, les mutations sociétales et démographiques, ou bien le changement climatique. L’accélération des changements au niveau des territoires rend l’avenir de plus en plus incertain ce qui impose une planification stratégique territoriale VUCA (caractéristiques de Volatilité, Incertitude, Complexité et Ambiguïté). L’anticipation s’impose de ce fait comme un outils stratégique majeur car dans un monde en constante évolution, marqué par des défis environnementaux, économiques et sociaux, savoir anticiper les besoins et enjeux futurs est essentiel pour bâtir des territoires résilients et durables.

Comment Anticiper ?

Concrètement, comment peut-on anticiper ? Je crois que la clé réside dans l’adoption d’une planification stratégique inclusive basée sur la prospection, l’analyse des données et l’implication élargie des acteurs du territoire. En combinant analyse, réflexion et créativité, l’approche anticipative permet aux acteurs locaux d’anticiper les défis et d’explorer les opportunités futures.

L’élaboration de scénarios prospectifs sur les différentes trajectoires possibles d’évolution d’un territoire permet d’évaluer les conséquences de différentes décisions. Certaines mesures ou actions pourront être tout simplement mises de coté pour éviter toute externalité négative probable. Ensuite, l’analyse de données statistiques et de modèles prédictifs est à considérer afin d’aider à mieux comprendre les tendances certaines et à anticiper les évolutions probables.

Des travaux et études de grande valeur, et de dimensions nationales, régionales et locales, sont disponibles auprès des organismes et institutions spécialisés tel que le Haut-Commissariat au Plan (HCP).  Et enfin, la « Concertation et Participation » devront occuper une place centrale dans le processus de planification avec une implication réelle et opérationnelle de l’ensemble des acteurs locaux concernés, les citoyens et les représentants de la société civile. Ceci viendra créer un environnement d’interaction pour enrichir les réflexions et renforcer l’adhésion aux programmes et leur durabilité.

L’anticipation territoriale est un levier essentiel pour développer des territoires durables face aux défis futurs de notre temps. En intégrant cette démarche dans les politiques publiques de développement et les projets locaux, les acteurs territoriaux seront mieux outillés pour considérer puis faire face aux incertitudes de demain.

Il est temps de prendre conscience de l’importance de cette approche pour bâtir un avenir meilleur pour tous. Mais si de telles approches anticipatives sont à présent vérifiées et communément acceptées pour un développement territorial durable, leur mise en œuvre nécessite des recettes de nouvelle génération appuyées par un changement de mentalité chez l’acteur local afin de les rendre non seulement intellectuelles mais aussi opérationnelles et efficaces.