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Par Ali Bouallou
En 1870, les ouvriers des pays industrialisés travaillaient en moyenne 60 à 70 heures par semaine pendant 50 semaines par an. La pénibilité et la dangerosité du travail n’étaient nullement prises en compte. C’est à peine dans les années 1940 que le nombre d’heures de travail a été ramené à 8 heures par jour, 5 jours par semaine.
Des réglementations ont alors été mises en place grâce à de fortes mobilisations ouvrières, elles ont permis une réduction du temps de travail, une prise en compte de la pénibilité, et une augmentation des salaires sans pour autant diminuer la productivité.
Depuis quelques années, un autre saut qualitatif a pris son chemin dans l’évolution des conditions de travail. Il s’agit de la semaine de travail de 4 jours payée 5 jours. La pandémie de la Covid19 n’a fait que précipiter la réflexion autour de sa mise en place.
En effet, le constat effectué à l’issue de plusieurs expériences de télétravail a montré que la productivité n’est pas altérée mais plutôt augmentée et que les employés atteignent ainsi un meilleur équilibre entre les vies professionnelle et personnelle.
Plusieurs expériences ont été menées ou sont en train d’être menées dans plusieurs contrées. La Belgique a adopté ce modèle économique pour ceux qui le souhaitent. L’objectif du gouvernement belge est de dynamiser l’économie avec un taux d’emploi de 80% d’ici 2030 et une réduction de l’empreinte carbone ainsi que la diminution de futures impôts.
Le Royaume-Uni a fait le choix d’un appel à manifestation d’intérêt pour le recrutement d’entreprises désireuses de mener une expérience de 6 mois, de juin à décembre 2022. Une soixantaine d’entreprises a répondu à l’appel du gouvernement pour condenser le travail de 5 jours en 4 jours.
Ce projet pilote ainsi que plusieurs autres prévus aux Etats-Unis, en Irlande, au Canada, en Australie ou encore en Nouvelle Zélande, sont portés par le groupe de pression 4 Day Week Global.
D’autre part, si l’expérience pilote de la semaine des 4 jours a donné pleinement satisfaction en Islande entre 2015 et 2019 et a donné lieu à un meilleur aménagement du temps de travail, ses résultats ont été plus que mitigés en Suède puisque les retours d’expérience différaient d’un domaine d’activité à un autre.
Quid du Maroc ? Sommes-nous en mesure de nous poser la question au sein de nos administrations et entreprises publiques ainsi que dans le secteur privé ? Sommes-nous capable de maintenir le même niveau de développement en travaillant moins ? Est-il légitime de parler aujourd’hui de la semaine de travail de 4 jours au Maroc alors que le pays est en phase d’émergence avec tous les défis que cela relève ? Allons-nous avoir notre mot à dire dans un monde sauvagement mondialisé en phase de re-polarisation ?...
Il est bien entendu que les standards internationaux, pour ne pas dire occidentaux, finissent en général par devenir des standards universels. Si la semaine de travail de 4 jours payée 5 jours est adoptée dans tous les pays développés, les pays émergents ou en voie de développement seront contraints de suivre le mouvement.
Il est donc primordial que les partenaires sociaux au Maroc débâtent, de manière apaisée et responsable, de cette nouvelle rupture sociologique dans le cadre d’une réflexion anticipative prenant en compte les différents aspects liés à la semaine de travail de 4 jours.
Au final, la question à se poser est la suivante : Et si la semaine de travail de 4 jours était le salut du Maroc pour un meilleur partage du temps de travail, une meilleure résorption du chômage, une meilleure répartition des richesses nationales et une diminution des inégalités sociales ? La question mérite réflexion !
Rédigé par Ali Bouallou