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Par Abdeslam Seddiki
Et ceci pour une raison simple : le gouvernement croit avoir bien fait jusqu’à présent et n’hésite pas à afficher sa satisfaction. Le ton est donné dès la première page : « Le gouvernement a réussi, sous la conduite visionnaire et éclairée de SM Le Roi que Dieu l’Assiste, à faire face à ces pressions pour limiter leur retombée économique et sociale, à travers l’adoption d’une politique efficace fondée sur deux actions complémentaires : une action anticipative consistant à affronter les contraintes conjoncturelles en atténuant leurs effets tant sur l’économie nationale que sur le niveau de vie des citoyens ; une action structurelle à long terme consistant à aller de l’avant dans la mise en œuvre des réformes nécessaires à l’amélioration des conditions de vie des citoyens, la réalisation des taux de croissance élevés, créateurs d’emplois en nombre suffisant, tout en dégageant des marges budgétaires à même d’assurer le financement nécessaire de ces réformes » (traduit par nos soins).
Comme on ne change pas une équipe qui gagne, on ne change pas, non plus, une politique qui marche ! Ainsi, le gouvernement entend-il poursuivre la gestion des affaires du pays.
Dans l’esprit de cette continuité, et en application des orientations royales annoncées dans le dernier discours du trône et des fondements du programme gouvernemental, la note de se fixe quatre priorités pour le prochain PLF 2024 : renforcer les mesures de lutte contre les impacts conjoncturels ; poursuivre l’instauration des bases de l’Etat social ; poursuivre la mise en œuvre des réformes structurelles ; consolider la durabilité des finances publiques.
Ces priorités sont déclinées successivement en mesures dont certaines sont précises et chiffrées et d’autres sont annoncées sous forme de bonnes intentions et de promesses exprimées au conditionnel. Pour l’essentiel, il s’agit de mesures et de programmes déjà en cours de réalisation.
Ainsi, au niveau du premier axe, il est question essentiellement de la stratégie «Génération Green » qui a succédé au Plan Maroc vert et pour laquelle le gouvernement persiste et signe comme il l’a fait lors des assises nationales de l’agriculture de Meknès avec la signature de 19 contrats-programmes.
Il est question aussi, et c’est une question vitale pour notre pays, de l’implémentation du Plan National de l’eau tel qu’il a été élaboré sous la supervision royale pour la période 2020-2027 avec une enveloppe de 143 MM DH.
Et pour cause ! En matière d’éducation, tous cycles confondus, les résultats palpables et encourageants se font toujours attendre. Notre système éducatif pâtit d’une pléthore de réformes et de leur complexité. Au lieu de suivre le cheminement courant consistant à aller du plus simple au plus complexe, on assiste au contraire à une inversion de la méthode.
Ce qui explique jusqu’à présent l’échec des différentes réformes et stratégies mises en place depuis la charte décennale de l’éducation. Le même constat d’échec est perceptible au niveau de l’emploi bien que le gouvernement continue à miser sur les bienfaits des deux programmes « awrach » et « forsa » dont les résultats ne se reflètent pas sur les chiffres relatifs à l’emploi et au chômage. (voir la dernière publication du HCP)
Au chapitre « réformes structurelles », l’accent est mis essentiellement sur la promotion de l’investissement en activant la nouvelle charte d’investissement et le Fonds Mohammed VI pour l’investissement. L’objectif étant de concrétiser les orientations royales consistant à mobiliser 550 MM DH d’investissement et créer 500000 emplois au cours de la période 2022-2026.
Il est également, question de la transition écologique avec l’objectif d’atteindre une production de l’électricité à base du renouvelable de 52% à l’horizon 2030.
Enfin, concernant la durabilité des finances publiques, la note de cadrage évoque deux mesures importantes : la réforme de la LOF (loi organique des finances) à travers l’adoption de la programmation pluriannuelle et l’intégration des Etablissements publics ; la poursuite de la mise en œuvre de la loi-cadre relative à la réforme fiscale à travers notamment la réforme de la TVA et l’intégration du secteur informel. Bien évidemment, personne ne peut être contre ces mesures dans l’absolu.
Mais on attendra de voir plus clair sur leur contenu et leur trajectoire pour nous prononcer dans un sens ou dans un autre, notamment au sujet de la TVA dont la réforme est conditionnée par les objectifs que l’on se fixera. Espérons que cette réforme va dans le sens de plus de justice fiscale et de soutien au pouvoir d’achat des consommateurs et en premier lieu les consommateurs populaires.
Le gouvernement poursuit l’objectif de réduction du déficit budgétaire. Nous y souscrivons entièrement ne serait-ce que pour préserver notre indépendance et réduire le recours au marché financier international. Mais il y a plusieurs façons d’y parvenir sans pour autant puiser béatement dans des recettes libérales éculées.
Le moment est venu, si on veut que notre pays passe à un stade supérieur de son développement conformément au vœu exprimé par le Roi, de revoir nos modes de réflexion et notre manière d’agir. Un projet de loi de finances marqué du sceau de sérieux n’est nullement un luxe. C’est une nécessité pour permettre à notre pays d’aller de l’avant sur la voie du progrès et occuper la place qu’il mérite dans un monde en pleine mutation.
Par Abdeslam Seddiki