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Par Ahmed Naji
L’approche éditoriale de ce sujet par les médias nationaux reflète une réelle volonté de voir l’Union européenne adopter une position cohérente concernant la marocanité des provinces du Sud du royaume. Voir les chalutiers chinois remplacer ceux européens n’est pas l’ambition première affichée.
Les Marocains, décideurs politiques comme simples citoyens, restent, jusqu’à présent, stupéfaits par la décision de la Cour de justice de l’Union européenne (Cjue), en date du 4 octobre, portant annulation des accords de pêche entre le Maroc et l’Ue.
Le motif avancé serait la conclusion dudit accord « sans le consentement du peuple du Sahara occidental ». Un étrange déni des choix exprimés par les habitants des provinces du Sud à travers leurs représentants démocratiquement élus et ce depuis plusieurs décennies.
Mais c’est surtout la contradiction entre l’allongement continue de la liste des pays membres de l’Ue soutenant la proposition d’autonomie des provinces du Sud sous souveraineté marocaine et l’arrêt de la Cjue que les Marocains peinent à comprendre. Quand Paris rejoint Madrid et Berlin pour dire que le Sahara est marocain, Luxembourg, siège de la Cjue, trouve le moyen d’aller à contre-courant.
Même si Bruxelles, siège de l’Ue, a vite réagi, à travers la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, et le Haut représentant de l’Ue, Josep Borrell, en affirmant que « les accords conclus doivent être respectés », cette dissonance dans les prises de position des différentes institutions de l’Ue intrigue à Rabat.
Comme la nature a horreur du vide, la semaine dernière, l’Agence fédérale de la pêche de Russie a distribué des quotas de pêche de pélagiques dans les eaux territoriales marocaines à des entreprises russes.
En même temps, la Chine frappe à la porte d’entrée pour renforcer sa flotte de pêche au Maroc. Un accord entre Rabat et Pékin a été conclu, en juillet 2023, pour renforcer leur coopération, entre autres dans le domaine de la pêche maritime.
Il y a des questions à se poser sur la vision géopolitique qui guide la politique de l’Ue au Sud de la Méditerranée occidentale, qui semble tiraillée entre dogmatisme idéologique et acceptation des réalités.
L’argument de l’indépendance de la Cjue sonne creux quand celle-ci accorde foi aux propos d’une milice accusée de liens avec les groupes terroristes sévissant au Sahel, coupable avérée de détournements des aides humanitaires et refusant tout recensement des habitants des camps de Tindouf, en Algérie, un pays qui ne cache pas son hostilité envers le Maroc.
Sur son flanc Sud, l’Ue paraît avoir perdu son cap, errant au gré des différents groupes de pression qui hantent les couloirs de ses institutions.
Le prisme à travers lequel le Maroc déploie ses relations extérieures, sa souveraineté sur ses provinces du Sud, l’oriente nécessairement vers des partenaires les mieux au fait de leurs propres intérêts.
Rédigé par Ahmed Naji