De ce travail d’une cinquantaine de pages, l’on retiendra que le territoire affecté par le séisme survenu au Maroc le vendredi 8 septembre 2023 présente une topographie majoritairement montagneuse (Haut-Atlas) s'étendant sur une superficie totale de 53.135 kilomètres carrés. Cette zone englobe un ensemble de cinq provinces et une préfecture, réparties au sein de quatre régions distinctes mais néanmoins limitrophes à savoir :

Les provinces d’Al Haouz et Chichaoua et la préfecture de Marrakech dans la région de Marrakech-Safi, la province d'Ouarzazate dans la région de Drâa-Tafilalet, la province deTaroudannt dans la région de Souss-Massa et enfin la province d’Azilal dans la région de Béni Mellal-Khénifra.

Dans la région de Marrakech-Safi, outre la province d'Al Haouz qui a été la plus durement touchée avec 40 communes sinistrées, les provinces de Chichaoua et Marrakech ont également été affectées, avec respectivement 32 et 13 communes sinistrées.

Dans la région de Drâa-Tafilalet, la province d'Ouarzazate compte 17 communes sinistrées.
Dans la région de Souss-Massa, le tremblement de terre a touché 57 communes relevant toute de la province de Taroudannt.

Enfin, dans la région de Béni Mellal-Khénifra, le tremblement de terre a touché 10 communes relevant toute de la province d’Azilal.
 

Se référant au recensement de 2014, le HCP précise que cette zone abritait une population de plus de 2.402 millions d'habitants, répartis dans 475.928 ménages. Et qu’à la veille du séisme, l'estimation de la population de l’ensemble du territoire sinistré faisait état de 2.608.115 personnes, soit un accroissement de 9 % par rapport à 2014, résidant dans 578.280 ménages dont la taille moyenne avoisine 4,5 personnes.

Dans la province d’Al Haouz, épicentre du tremblement de terre, la totalité des communes, est sinistrée.
Les données d’avant le tremblement de terre indiquent que la population totale touchée par le tremblement de terre dans cette province s'élevait à 669.028 personnes en 2023. Chichaoua avait une population touchée de 357.720 personnes, Marrakech en comptait 553.134, Taroudannt totalisait 556.991 personnes et Ouarzazate comptait 317.669 personnes.

En ce qui concerne les ménages, les chiffres révèlent que la zone sinistrée de la province d'Al Haouz se composait la veille du sinistre d’un total de 145.818 ménages.
Celle de Chichaoua en comptait 78.686, celle de Marrakech 137.735, Taroudannt en comptait 124.226 et enfin la province de Ouarzazate comportait 65.922 ménages.

À l'exception de l'arrondissement de Marrakech-Médina, qui comptait avant le sinistre une population de 130.460 habitants résidant dans 34.871 ménages, les autres localités de la zone sinistrée, dont près de 93% sont des communes rurales, affichent des effectifs de population n’excédant pas les cent mille habitants et variant de 2.992 personnes résidant dans 769 ménages dans la commune de Tiout à 82.118 habitants qui résident dans 21.753 ménages dans la municipalité de Taroudannt.

En 2023, d’une part, la taille moyenne des ménages au sein des communes touchées par le sinistre s'établit à 4,5 individus, marquant une différence de 0,4 par rapport à la moyenne nationale (4,1 personnes).
Et d’autre part, les données sur la densité des zones sinistrées en 2023, permettent de constater que celle de la préfecture de Marrakech est la plus élevée atteignant 364 habitants par kilomètre carré suivie de celle de la province d’Al Haouz qui vaut 111 personnes par kilomètre carré.
La zone sinistrée de Ouarzazate enregistre une faible densité de 26 habitants par kilomètre carré et les zones sinistrée de Taroudannt, Azilal et Chichaoua connaissent des densités de population modérées qui valent respectivement 52, 58 et 59 habitants par kilomètre carré.

Et ce, au moment où la population en âge de travailler (tranche d'âge de 15 à 59 ans) représente une proportion relativement importante dans toutes les zones des provinces sinistrées (entre 56,1 % dans la zone sinistrée de la province d’Azilal et 61,6 % dans la zone sinistrée de la préfecture de Marrakech). Avec des tendances de vieillissement de la population plus prononcée dans certaines provinces sinistrées que dans d’autres.

En termes de langue parlée, le HCP précise que si la Darija est la langue la plus répandue au niveau national, elle ne prédomine pas dans les zones touchées par le séisme.
A en juger par le RGPH 2014, la population de ce périmètre parle la Darija, mais aussi dans une large mesure le Tachelhit, qui est en fait la langue maternelle des habitants de la majorité des communes sinistrées. En effet, dans ces zones sinistrées, 66,9%de la population utilise la Darija, 64,7 % utilisent le Tachelhit, 2,1 % parlent le Tamazight et seulement 0,1 % utilisent les deux autres langues, à savoir Tarifit et Hassania.
C’est d’ailleurs ce qui fait dire au HCP que la langue Tachelhit est la première langue parlée dans la plupart des provinces et communes sinistrées, et de ce fait, une forte présence de locuteurs en cette langue dans ces zones est à prendre en considération.

Pour ce qui est du taux d’analphabétisme dans la zone sinistrée, les résultats du RGPH de 2014 révèlent que ce taux est au-dessus du niveau national avec 41,2 % contre 32,2 %.

Se basant sur les données du RGPH de 2014,le HCP estime que ce taux va de pair avec le niveau scolaire observé dans la région dans la mesure ou 44,4% de la population de la zone sinistrée n’ont aucun niveau d’étude, 5% ont le niveau préscolaire, 32,4% ont le niveau d’étude primaire, 10,3% ont le niveau secondaire collégial, 5,2% ont le niveau secondaire qualifiant, et seulement 2,7% ont le niveau supérieur.
A noter aussi que le taux de scolarisation de l’ensemble de la zone sinistrée est de l’ordre de 95 % qui est presque du même niveau que la moyenne nationale.

À ce titre, le HCP précise qu’en 2014, le taux de prévalence du handicap au niveau de l’ensemble de la zone sinistrée s’élève à 5,2 %, soit une légère différence de 0,1 en comparaison avec la prévalence du handicap à l’échelle nationale (5,1 %). Sachant que cet handicap touche toutes les zones provinciales sinistrées quoiqu’ une disparité significative est observée entre ces zones.

En termes d’habitat et conditions d’habitation, les données du RGPH 2014 révèlent qu’au niveau de l’ensemble de la zone sinistrée, près de la moitié (50,8 %) des ménages habitent dans un logement de type rural et 44,2 % des ménages habitent dans une maison marocaine. Les autres types de logement sont quasi-inexistants dans la zone sinistrée.

Par statut d’occupation du logement, la répartition des ménages des communes sinistrées fait apparaître que 84,9 % des ménages sont propriétaires de leur logement, dépassant la moyenne nationale qui est de l’ordre de 71,9 %. De plus, la proportion des ménages propriétaires de leur logement de quatre provinces dépasse la moyenne de la zone sinistrée, il s’agit de Taroudannt (86,3 %), d’Al Haouz (90,9 %), de Chichaoua (91,2 %) et d’Azilal (93 %).

La répartition des logements occupés selon leur ancienneté dans la zone sinistrée montre que 31,9 % du parc logement est âgée de plus de 50 ans, et 28,2 % des logements sont âgés entre 20 et 49 ans.

La répartition des logements occupés selon les matériaux de construction des murs fait ressortir que dans la zone sinistrée, la construction des murs de 42,5% logements a été faite à partir du béton armé, des briques en terre cuite et du parpaing, la construction des murs de 34,6% logements a été faite à partir du pisé et des briques de terre crue, et la construction des murs de 16,2% logements a été faite à partir des pierres scellées avec de la terre.

L’analyse des données du RGPH 2014 révèle des disparités au niveau provincial et au niveau communal.
Le bois récupéré, le bambou et l’herbe recouverts de terre sont les matériaux les plus utilisés dans la construction du toit dans la zone sinistrée avec 51,6 %, principalement dans les communes des provinces Chichaoua (71,6 %), Azilal (62,6 %) et Al Haouz (58,7 %). Quant à la dalle, elle a été utilisée dans la construction du toit de 42,4 % des logements de la zone sinistrée, et ceci principalement dans les communes de la préfecture Marrakech (53,3 %).

En termes d’équipements, les données du RGPH 2014 révèlent que la population résidante dans la zone sinistrée parcourt en moyenne 5,9 kilomètres pour atteindre la route goudronnée la plus proche de leurs logements de résidence principale.

Cette moyenne dépasse la moyenne au niveau national qui est de l’ordre de 3 kilomètres, et ce, en raison du relief de type montagneux qui caractérise cette zone.

Les données du RGPH 2014 font apparaître que 6,8 % des logements de la zone sinistrée ne disposent pas d’une cuisine, avec une différence allant de 4,9 % de logements sans cuisine dans les communes sinistrées d’Al Haouz à 17,5 % de logements sans cuisine dans les communes sinistrées d’Azilal.

De plus, 10,2 % des logements de la zone sinistrée ne disposent pas d’une W.C, avec une différence allant de 1,5 % de logements sans W.C dans les communes sinistrées de Marrakech à 36,6 % de logements sans W.C dans les communes sinistrées d’Azilal.

En ce qui concerne l’existence du bain dans les logements, les données du RGPH 2014 ont révélé que 50,4 % des logements de la zone sinistrée ne disposent pas d’un bain, et la différence varie de 39 % de logements sans bain dans les communes sinistrées d’Al Haouz à 61,6 % de logements sans bain dans les communes sinistrées de Ouarzazate.

En termes de mode d’évacuation des eaux usées, le HCP révèle que seul 24 % des ménages de la zone sinistrée habitent un logement raccordé au réseau public d’assainissement contre 58,9 % au niveau national.

Les différences au niveau provincial sont importantes, elles vont de 6,4 % logements dans les communes sinistrées de la provinc d’Azilal à 44,9 % des logements des communes sinistrées de la préfecture de Marrakech.

Près du tiers, des ménages de la zone sinistrée utilisent des fosses septiques afin d’évacuer les eaux usées (33,3 %), et la différence entre les provinces varie de 23,9 % dans les communes sinistrées de la province Ouarzazate à 39,8 % dans les communes sinistrées de la préfecture de Marrakech. En revanche, 42,7 % des ménages de la zone sinistrée utilisent d’autres modes d’évacuation des eaux usées (puits perdu, nature…). Ce sont surtout les ménages des zones rurales qui recourent à ces modes, car ils ne sont pas raccordés au réseau public d’assainissement.

En prenant en compte l'ensemble de la zone sinistrée, la moyenne du taux de pauvreté multidimensionnelle atteint 18,5 %, ce qui est nettement supérieur au taux national du Maroc, qui est de 8,2 %.
De même, la moyenne du taux de vulnérabilité pour la zone sinistrée est de 21,5 % dépassant également le taux national de 12,6 %.

Ces résultats indiquent que, dans l'ensemble, les provinces de cette zone géographique sont confrontées à une plus grande privation multidimensionnelle et à un risque accru de vulnérabilité par rapport à la moyenne nationale

Le taux d'activité de la zone sinistrée s'élève à 45,6 %. Bien que ce chiffre soit légèrement inférieur à la moyenne nationale du Maroc, qui est de 47,6 %, le HCP note que la zone sinistrée englobe des provinces qui connaissent des niveaux d'activité économique variés, ce qui explique en partie cet écart. Et que par milieu de résidence, le taux d'activité des provinces sinistrées en milieu urbain est de 48,3 % contre 49,1 % au niveau national. Pour le milieu rural, le taux est de 43,7 % contre 45,1 % au niveau national.

Le HCP note aussi que dans l'ensemble de la zone sinistrée, le taux d'activité des hommes est substantiellement plus élevé que celui des femmes, illustrant des inégalités persistantes sur le marché du travail. Les femmes affichent un taux d'activité de seulement 16,5 %, alors que les hommes atteignent un impressionnant 76,2 %. Cette importante disparité reflète des défis en matière de participation des femmes à la vie économique au sein de ces régions.

L’analyse des données sur la répartition de la population active selon la situation dans la profession dans les six provinces, révèle des variations significatives dans la répartition de la population active selon la situation dans la profession entre les différentes provinces sinistrées. Dans l’ensemble de la zone, conclut le HCP, plus que quatre actifs occupés sur cinq sont soit des salariés dans le secteur privé (51,3 %) ou des indépendants (30 %). Les deux milieux de résidence suivent la même répartition de la situation dans la profession.