La nature. Ce vocable, à première vue, semble simple. Accessible. Dans la définition qu’il en donne, Le Robert confère à ce nom féminin plusieurs acceptions :
Les mots qui incluent, les mots qui excluent.
C’est dans le même temps le signe d’appartenance pour ceux qui en détiennent les attributs et les codes et d’exclusion pour les autres qui en sont dépourvus. Une ancienne anecdote, vieille de quelques décennies, me revient en mémoire. Quand j’entends pour la première fois « le maison » mes oreilles sont écorchées et mes cheveux se dressent sur la tête.
Je songe immédiatement à une faute de grammaire. En fait, c’est moi qui commets la faute ; et c’est d’une faute d’orthographe « le méson » qu’il s’agit et non de grammaire attribuée indûment à l’autre. Le méson est bien une particule de la physique et non un simple lieu d’habitation où ma totale ignorance de la physique m’a fourvoyée !
Les mots relèvent du fameux « habitus » forgé par le sociologue français, Pierre Bourdieu. Plusieurs siècles avant celui-ci Socrate, voyant un jeune homme beau, élégant et fier de sa personne parader sur la place publique d’ Athènes, lui lance : « parle pour que je puisse te voir ». C’est tout dire.
Je fais bien de me méfier des approximations et a priori en matière de connaissances. Avant de me lancer dans la rédaction de cette chronique, où je voulais célébrer la nature, le doute me pousse à consulter le dictionnaire pour m’enquérir de ou des éventuelles acceptions du mot nature. Je ne suis pas déçue. Le Robert en aligne pas moins de six et j’avoue en avoir sabré quelques-unes que j’estime éloignées de mes préoccupations du moment.
La nature, source inépuisable de beauté et d’émerveillement.
L’arc en ciel me comble de joie. Les nuages tous types confondus, cirrus, stratus et cumulus offrent, à mon regard perdu dans ce ciel infini, un ballet où le vent dessine le mouvement des nuages/danseurs et dirige leur élan. Le soleil avec son insoutenable lumière m’éblouit, ses lever et coucher sont une pure merveille pour l’œil humain.
La lune, si lointaine, me fait rêver. Les étoiles me transportent sur les ailes du temps. La montagne, dans sa majesté et son inaccessibilité, me questionne. Les océans et les mers aiguisent mes cinq sens, avec le déferlement et le grondement continus des vagues s’écrasant sur le rivage.
J’aime ces petites sources d’eau qui jaillissent de nulle part sans crier gare et me surprennent agréablement sur un chemin cahoteux. Le désert, dépourvu d’atouts esthétiques pour certains qui en ignorent le charme désarmant, me fascine. La pluie m’apaise, le tonnerre calme mes angoisses en me rappelant le retour de l’hiver.
J’aime la nature même dans un contexte de démesure, quand elle se déchaine, se révolte et menace l’homme de son redoutable courroux. « C’est dans la violence que la nature est la plus belle » a écrit François Raux, sûrement parce qu’elle est indomptable et bat l’homme à plate couture, lui qui ne cesse de la martyriser quand elle baisse la garde.
Face à cette force de feu et de flammes lancée par les volcans, j’ai un regard médusé et un ressenti mêlant admiration et stupeur. Ce qu’on désigne, généralement, par paysage désolé n’est pas moins privé de répondant à mes yeux. Il suffit de le regarder avec toute la tendresse que lui voue la nature qui l’a enfanté pour en pénétrer les propriétés et les vertus. Ce faisant, je ne pastiche point « Orgueil » le poème de Baudelaire , dans lequel il écrit : « J’ai pétri de la boue et j’en ai fait de l’or ».
L’univers végétal est un autre chef d’œuvre de la nature, en le regardant je me reconnecte au monde des merveilles. Les paysages bucoliques me ravissent. Les forêts sont un havre de paix, de pureté et de fraicheur où j’aime me réfugier. Les plantes se positionnent pour moi comme des êtres ultra vivants. Je converse avec elles, persuadée que mon langage n’est point un secret pour elles. Je ne parle pas le leur, mais je donne libre cours à mon instinct. Il accomplira le reste.
Dans cette nature qui nous est tombée du ciel, le sublime le dispute à l’unique, le miraculeux au prodigieux, le magique à l’inexprimable. En dépit de leur richesse et de leur extrême variété, les mots sont bien incapables de rendre compte de tant de beauté et de perfection envoutantes mais aussi de mystères déroutants. « ..le Trésor de la langue française dénombre 100.000 mots communs », selon lepoint.fr du 26 février 2024 : « Combien y a – t – il de mots dans la langue française ? ».
L’œuvre du Créateur plonge les âmes éprises d’absolu dans une douce et éternelle béatitude.
Dans cet ensemble à couper le souffle, l’homme est d’une infinie, désolante et insignifiante petitesse.
« Dieu n’a pas mal réussi la nature, mais il raté l’homme » Jules Renard.
Fatima Hqiaq