Il y a quelques mois la Renaissance Sportive de Berkane a conçu un maillot pour les compétitions africaines arborant la carte du Maroc comme symbole de son identité. Elle a déposé, comme le stipule les règlements, le maillot pour validation auprès de la commission Ad Hoc de la CAF qui n’a émis aucune remarque, permettant ainsi l’utilisation du maillot sur tous les stades du continent. Personne n’y a trouvé à redire, y compris la fédération algérienne. Cette dernière n’a d’ailleurs émis aucune contestation lorsque Berkane a participé aux premiers matchs de la CAF avec le maillot validé et aucune opposition n’a été formulée, plus tard, lorsque le tirage au sort a mis aux prises l’équipe de l’USMA, représentant algérien à la Renaissance de Berkane.
Ce n’est qu’à quelques jours du match à Alger que les autorités locales vont réagir, probablement alertés par la large diffusion du maillot sur les réseaux sociaux. La réaction du pouvoir d’Alger a été brutale et des instructions ont été données pour bloquer les maillots à l’entrée du territoire algérien. On connait la suite. La CAF, saisie par la fédération algérienne, a sommée cette dernière d’accepter que Berkane joue avec le maillot qu’elle a auparavant autorisé. Une sommation confirmée en urgence par le TAS, ultime voie de recours des litiges sportifs. Rien n’y fait, le match d’Alger n’a pas eu lieu, les autorités algériennes ayant refusé de lever la confiscation des maillots de Berkane, provoquant une colère sourde du public algérois désireux d’en découdre sportivement. Au match retour l’USMA toujours victime du pouvoir politique sera contrainte de déclarer forfait. Le club ayant refusé d’affronter Berkane à cause encore une fois du maillot pourtant validé.
La CAF a logiquement considéré le match gagné par Berkane sur les scores de 3-0 pour chaque match. Elle devait par la suite, c’est encore le règlement, réunir son comité de discipline pour décider des sanctions à appliquer à l’encontre de l’USMA et de la fédération algérienne. Des sanctions à la fois sportives : suspension du club des prochaines compétitions africaines et pécuniaires pour le manque à gagner les droits de diffusion télés et ceux des annonceurs. Ce Comité va finalement reporter sa décision, suite à des pressions « politiques », si l’on en croit les déclarations de l’ensemble des commentateurs des plateaux médiatiques officiels algériens d’une part, et si l’on se réfère aux derniers remerciements des dirigeants de l’USMA aux autorités officielles algériennes. La diplomatie algérienne s’est démenée pour faire pression sur son homologue Sudafricaine pour ce report. C’est d’ailleurs assez croustillant de constater que l’Algérie politique s’engage dans une affaire sportive, pour faire condamner l’intrusion de la politique dans le sport.
C’était avant tout pour gagner du temps et engager une nouvelle procédure devant le TAS. C’est l’USMA soutenu par sa fédération, c’est logique, qui va engager cette procédure avec les objectifs suivants :
• Faire Annuler l’autorisation accordée à Berkane de porter le maillot, contenant la carte du Maroc, validé au préalable par la CAF.
• Annuler le résultat des deux matchs contre Berkane,
• Proclamer l’USMA vainqueur de ces deux matchs
• Faire rejouer la finale remportée par le Zamalek
Les frais de cette procédure ont été pris en charge par le gouvernement algérien qui s’est également occupé de choisir les cabinets d’avocats en charge de l’affaire. C’est une information puisée dans les médias officiels algériens. Ils en tirent un motif de fierté entérinant la posture de l’Algérie qui se veut et s’autoproclame puissance régionale influente.
Le TAS vient de rendre son verdict et, il faut savoir être bon perdant, c’est une victoire algérienne, on verra en quoi ? Est-ce une défaite marocaine ? C’est plus compliqué que ça.
D’abord la tentative de modifier les résultats et de sanctionner le club marocain a échoué. La qualification de Berkane est confirmée et les résultats entérinés, c’est pour ça que ce n’est pas forcément une défaite. En revanche le TAS a estimé que la décision d’autoriser le maillot de Berkane avec la carte du Maroc contrevenait aux propres règles de la CAF. C’est pour ça que c’est une victoire partielle, non pas pour l’USMA mais pour ceux qui ont sortis ce dossier de son contexte sportif. Une question reste posée. Quid de la saison en cours ? Berkane qui a déjà fait valider son maillot, avec la même carte, sera-t-il autorisé à le porter ? C’est une vraie question, le TAS a certes décrété que l’autorisation de la CAF du maillot floqué de la carte du Maroc contrevenait aux règles de la CAF, mais ne s’est pas prononcé sur les autorisations en cours, de même la qualification de Berkane en finale n’a pas été remise en cause.
Il faut dire que les avocats en charge de la demande algérienne se sont focalisés, comme on peut l’imaginer, sur la carte du Maroc, et non sur l’objectif qui était censé être le leur, celui de la victoire sportive de l’USMA. Le discours qui consistait à expliquer que cette procédure visait à faire rejouer la finale, est un discours de façade. C’est la marque de fabrique du régime algérien, l’objectif n’est jamais le fond mais la forme et la communication autour de cette forme. Les projets économiques ne sont jamais motivés (ou rarement) par un souci de rentabilité mais par un objectif politique. La fermeture du gazoduc méditerranéen prive l’Algérie d’importantes capacités d’exportations et d’un coût d’exploitation moindre, ce n’est pas grave l’importance de la décision réside dans l’idée de nuire au Maroc. Le rationnel économique n’a jamais été prioritaire, c’est pour ça que l’Algérie malgré ses énormes moyens vit encore avec une monnaie dont la valeur au marché noir coûte la moitié de son coût officiel.
C’est ce qu’il s’est passé devant le TAS. Les avocats en charge de la partie algérienne ont piégé la partie adverse, c’est-à-dire la CAF, Berkane a vite était disculpée de toute fraude, par le déroulé des questions. En effet la première : Est-ce que la carte en question représente le Maroc a été déterminante ?
La CAF, mal préparée n’a pas eu la bonne réponse. Elle aurait dû rétorquer : Est une question politique ou sportive ? et dans la foulée dire que si c’est sur le plan sportif : OUI, cette carte représente tout le périmètre couvert par la Fédération Royale Marocaine de Football au sein de la CAF. Et de rajouter que les cartes politiques ne correspondent pas toujours aux cartes sportives. La Grande Bretagne dispose d’un siège à l’ONU et de quatre sièges à la Fifa : Angleterre, Pays de Galles, Ecosse et Irlande. Inutile d’épiloguer le match n’est pas terminé.
L’Algérie compte jouer les prolongations et réclamer des indemnités en faveur de l’USMA, il faut calmer les supporters auxquels a été promis une victoire sportive et profiter d’une fenêtre ouverte par cette décision. Une prolongation qui aura un protagoniste, si Berkane décide de jouer avec son maillot lors de son prochain match face au représentant de l’Afrique du Sud et, en cas de qualification au prochain tour face à un club Algérien. Il y en aura forcément un, le tirage au sort nous a offert un derby algéro-algérien. Pour le moment le club marocain n’a pas le choix, à moins d’une instruction de la CAF, le maillot validé comporte la carte du Maroc et les décisions judicaires ou arbitrales ne sont pas rétroactives.
Le Maroc a choisi la voie libérale, un choix risqué qui oblige les entreprises marocaines à se confronter à la concurrence et à souffrir de la compétition. Elle a permis à nos entreprises de gagner en productivité et en compétence. Il croit en l’ouverture économique et la coopération Sud-Sud comme levier de développement. Il ne croit pas en l’aide qui nourris la dépendance. Il a dupliqué ce modèle dans sa politique sportive, en football en tous cas.
Alors que les neufs stades prévus pour la CAN sont en cours de travaux, il a mis à la disposition de pays amis six autres stades, aux normes, pour les matchs de leurs sélections au titre des éliminatoires de la Coupe du Monde 2026. Le leadership qui en découle a probablement irrité les hommes au pouvoir en Algérie. Ils ont décidé de revenir en force, mais pas pour se mettre au service du football africain, mais pour le dominer.
Leurs convictions, nées du système adopté en 1962, n’a pas évolué, ils sont toujours convaincus que la compétition détruit de la richesse et qu’il faut la détruire avec tous les moyens même les pires. Ceci explique cela. Cette fois c’est au Maroc de ne pas tomber dans le piège. Les grands projets du pays nécessitent l’énergie de tous, une énergie positive et contagieuse. Le public marocain a bien rigolé de l’hystérie provoquée par une carte. Il sait que ce n’est pas une question de principes. Personne n’a réagi à la signature de cette même carte par l’ancien ambassadeur des États-Unis Unis. Il faut certes attendre la réaction de la CAF et s’en tenir, parce qu’avec le pays voisin quand il y en a plus, il y en a toujours encore.
Bargach Larbi