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Billet 408-Covid-19, le bla-bla des ministres
Avec une courbe ascendante des contaminations et des décès, avec presque toujours plus de nouveaux contaminés que de guéris, avec Casablanca qui semble plonger, testée par ses (au moins) 700 à 800 cas Covid par jour, on pourrait raisonnablement penser que l’épidémie n’est pas vraiment maîtrisée, quoiqu’en dise le ministre de la Santé Khalid Aït Taleb. Et les mesures prises n’incitent pas à l’optimisme.
Invité par Fathia Elaouni de 2M, M. Aït Taleb affirme la main sur le cœur que l’épidémie est sous contrôle. On le croirait volontiers si Marrakech n’était pas encore bouclée, et Tanger aussi. On le croirait certainement si nous avions toutes les informations sur les catégories d’âge des malades, sur la répartition géographique des contaminations dans les régions les plus touchées. On le croirait également si nous avions plus d’informations sur les différents hôpitaux de campagne, ouverts pour enfermer. Et on le croirait enfin s’il n’avait pas dit l’exact contraire le 6 septembre, sur la maîtrise et le contrôle du virus.
Mais comme tout le monde patauge et tangue, ici et ailleurs, on donnerait crédit aux propos de M. Aït Taleb si, en se contredisant, il s’expliquait… Comme pour l’hydroxychloroquine au sujet de laquelle il avait doctement déclaré en juin que « le Maroc a assumé cette responsabilité en raison de l’efficacité de ce médicament, qui peut être prouvée »… à 2M, il a très sereinement affirmé cette semaine que « l'hydroxychloroquine n'est pas un remède, mais elle freine la contagion ». Personne ne remet en cause la compétence médicale de Khalid Aït Taleb, mais sa communication et sa pédagogie font cruellement défaut.
Et puis voilà que M. Benchaâboune, grand argentier aujourd’hui désargenté, arrive au parlement et, les doigts en V, annonce une reprise en V et repeint l’avenir en rose ! S’il prévoit une récession de 5,8% pour 2020, il claironne une croissance de 4,8% en 2021. Juste pour rappel, sans épidémie, la croissance fut de 3% en 2018 et de 2,3% en 2019… Avec un pays barricadé depuis mars 2020, le ministre croit dur comme fer que le reflux du tourisme sera de 50% cette année, et le recul du transport aérien d’un miraculeux -9% ! Pourquoi aider la RAM alors ? Comment peut-il dire ça alors que l’opération Marhaba n’a pas eu lieu, que les touristes ne sont admis au compte-goutte que depuis quelques semaines, que les grandes villes touristiques sont bouclées et que les avions estampillés RAM sont sur cale ?
Venons-en à l’éducation nationale. M. Amzazi, nous ne le dirons jamais assez, s’exprime et essaie d’expliquer le très difficilement explicable. Sans y parvenir… Si les jeunes ne présentent pas de danger sanitaire pour leurs congénères et leurs parents, pourquoi alors prendre des mesures aussi drastiques dans les écoles encore ouvertes ? Et s’il y a nécessité de prendre de telles mesures, alors pourquoi décréter l’enseignement présentiel ? Et que dire des propos de M. Aït Taleb, qui explique l’explosion des cas à Casablanca par la rentrée scolaire… qui n’a pas eu lieu ?!
La question est celle-ci : comment, avec 500.000 pertes d’emploi, un manque à gagner de 100 milliards de Dirham pour le pays, des TPE en grande souffrance et de grandes entreprises qui sentent le soufre, une pluie qu’aucune météo ne se hasarderait à prévoir, de pleins secteurs d’activité en déliquescence ou en désarroi, des ministres qui ne disent rien ou bien n’importe quoi… comment peut-on raisonnablement prétendre à toute vapeur que 2021 sera une année de croissance heureuse et que notre économie en serait presque fastueuse ?
Nos responsables gouvernementaux ne sont pas des communicateurs, on le sait, il n’est donc nul besoin qu’ils se transforment en bonimenteurs que personne ne croit, mais qui contribuent à creuser le doute. Il ne sert à rien de faire des discours creux, mais il faut en revanche mûrir sa com.
Rédigé par Aziz Boucetta le 30 septembre 2020 sur www.panorapost.com