Par Abdelghani El Arrasse
Une ouverture économique à fort potentiel
L’un des principaux intérêts du Maroc dans le renforcement de ses liens avec la MENA réside dans la diversification de ses débouchés commerciaux et la consolidation de ses investissements extérieurs. Nos secteurs phares — industrie agroalimentaire, textile, automobile, services financiers, BTP, logistique — peuvent y trouver des relais de croissance dynamiques. Plusieurs champions nationaux y ont déjà planté leurs racines : Attijariwafa Bank en Afrique du Nord, Maroc Telecom dans le Sahel, l’OCP à travers sa stratégie d’intégration continentale.
En parallèle, les fonds souverains des pays du Golfe — Qatar, Émirats arabes unis, Arabie saoudite — offrent des opportunités de financement stratégique, notamment pour les infrastructures, les projets verts ou encore les écosystèmes industriels.
Un positionnement géostratégique à valoriser
Le Maroc dispose d’atouts uniques pour jouer un rôle de passerelle entre l’Europe, l’Afrique subsaharienne et la région MENA. Le port Tanger Med, Casablanca Finance City, les réseaux d’infrastructures modernes et la stabilité institutionnelle du pays renforcent cette vocation de hub logistique et financier régional. Ce positionnement crée des opportunités en cascade : emplois, transferts de compétences, développement territorial et rayonnement international.
Une coopération énergétique et environnementale prometteuse
La transition énergétique constitue un autre domaine structurant de coopération. Les pays de la MENA regorgent de ressources fossiles mais s’engagent aussi dans les énergies renouvelables, notamment le solaire et l’hydrogène vert. Le Maroc, pionnier en la matière, peut devenir un acteur central de la mutualisation régionale des projets énergétiques, de la sécurisation des approvisionnements et même de l’exportation verte vers l’Europe via des corridors interconnectés.
Un levier d’échange d’expériences réformatrices
La région est également un espace d’apprentissage partagé. Plusieurs pays expérimentent des réformes ambitieuses dans les domaines de la gouvernance publique, de la fiscalité, de la digitalisation ou encore de la formation professionnelle. Le Maroc peut à la fois s’en inspirer et faire valoir ses propres réussites : développement des énergies renouvelables, inclusion financière, sécurité alimentaire, ou encore gestion des grands projets structurants.
Des risques à ne pas négliger
Mais cette ouverture vers la MENA ne saurait être aveugle. La région reste marquée par une instabilité géopolitique persistante : conflits armés, tensions diplomatiques, volatilité des marchés… Le Maroc doit en anticiper les impacts indirects, qu’il s’agisse de ruptures d’approvisionnement, de crises financières ou de pressions politiques.
La dépendance excessive à certains partenaires — notamment dans le Golfe — pourrait également exposer notre économie à des revirements cycliques ou à des arbitrages extérieurs peu compatibles avec nos priorités nationales.
Enfin, la compétition régionale s’intensifie. Égypte, Jordanie, Émirats et autres pays MENA développent des stratégies similaires à la nôtre pour attirer les investissements : création de zones franches, incitations fiscales, diplomatie économique active. Le Maroc devra redoubler d’efforts pour préserver son attractivité, sa crédibilité et son avance comparative.
Une ambition régionale lucide et constructive
La MENA n’est ni un eldorado, ni un fardeau. Elle est une région stratégique, à la fois riche de promesses et de défis. Le Maroc a tout intérêt à s’y investir, à condition de le faire avec pragmatisme, esprit de coopération et souci de diversification. C’est dans cette approche équilibrée, lucide et proactive que réside notre véritable force. Car la montée en puissance du Maroc, sur les plans économique, diplomatique et énergétique, passe aussi par une intégration intelligente dans cet espace regioal elargi.
Rédigé par Abdelghani El Arrasse