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Mais d'autres se sont en revanche émus de cet acte de censure en invoquant la portée de ses conséquences. Un problème de régulation des rapports entre les pouvoirs publics et les puissances privées.
Orthodoxie idéologique
Celles-ci viennent de consacrer de manière la plus spectaculaire qui soit leur rôle hégémonique, directif même par bien des aspects, sur la vie des citoyens. Elles font montre d'une puissance en cours d'accumulation. Dans l'affaire Trump, les GAFAM ont ainsi géré une crise politique majeure sans prendre la mesure du bouleversement généré dans le cadre historique des libertés. Qui a vraiment décidé ? Dans quel cadre ? A quoi répond cette obsession de ce qui est présenté comme de la transparence ? D'une manière ou d'une autre, cela porte un nom : celui de l'orthodoxie idéologique. Un processus déjà en marche…
Ces entreprises planétaires sont ultraperformantes, omniscientes aussi; elles connaissent de mieux en mieux les internautes. Il y a là un lien organique avec leurs marchés respectifs, ce qui les rend sensibles aux sentiments des consommateurs. Trump a été ainsi censuré, mais qu'en est-il d'Erdogan ou plus encore de Khamenei ? Dans le cas du président américain sortant, la censure a été expliquée - et justifiée ? -par "les discours de haine". Sur le papier, pareil argument peut être recevable. Mais qu'en est-il du contenu de tels discours ? D'une autre manière, sous certaines formes, cette qualification peut être établie - racisme, antisémitisme, violence physique,... Mais cette difficulté existe: où commence et où finit un discours de haine ? De quoi ouvrir la porte à des mécanismes de censure actionnés par des rapports de force à l'avantage des GAFAM. Une autre problématique ; celle de la conciliation de la liberté et de la responsabilité sur les réseaux sociaux.
C'est cette délégation de fait d'un pouvoir de régulation qui est cause. Une compétence qui n'est pas contrôlée par aucun régulateur public. Les GAFAM occupent de manière oligopolistique un espace public numérique devenu en moins d'une décennie le soubassement de tout l'espace public. Il faut ajouter un autre paramètre : celui d'une certaine américanisation de la pratique des libertés. Comment ? Les plateformes numériques formatent et façonnent l'exercice des libertés sur la base d'un régime planétaire de tolérance ; elles en sont les seules arbitres et juges ; elles obéissent à des critères américains émanant a fortiori de puissances privées.
C’est dire qu'il faut réagir ; que l'organisation de l'espace digital ne saurait passer sous le contrôle d'une logique marchande, discrétionnaire, alors qu'elle devrait relever de lois établies par les Parlements et appliquées par les juges. Les "normes " des plateformes numériques ne sont en effet ni équilibrées, ni transparentes ni susceptibles de recours en justice. En Europe, il y a eu le mois dernier un projet de Digital Services Act (DSA) ; mais il reste encore en-deçà d'une appréhension conséquente des enjeux. En septembre 2019, un Partenariat international a été signé par 38 Etats, en marge de l'Assemblée générale des Nations Unies ; il n'est pas cependant contraignant. L'une des options opératoires pourrait être de garantir le pluralisme et la neutralité idéologique des GAFAM en permettant à des organes de contrôle d'accéder aux boîtes noires des algorithmes.
Orthodoxie idéologique
Celles-ci viennent de consacrer de manière la plus spectaculaire qui soit leur rôle hégémonique, directif même par bien des aspects, sur la vie des citoyens. Elles font montre d'une puissance en cours d'accumulation. Dans l'affaire Trump, les GAFAM ont ainsi géré une crise politique majeure sans prendre la mesure du bouleversement généré dans le cadre historique des libertés. Qui a vraiment décidé ? Dans quel cadre ? A quoi répond cette obsession de ce qui est présenté comme de la transparence ? D'une manière ou d'une autre, cela porte un nom : celui de l'orthodoxie idéologique. Un processus déjà en marche…
Ces entreprises planétaires sont ultraperformantes, omniscientes aussi; elles connaissent de mieux en mieux les internautes. Il y a là un lien organique avec leurs marchés respectifs, ce qui les rend sensibles aux sentiments des consommateurs. Trump a été ainsi censuré, mais qu'en est-il d'Erdogan ou plus encore de Khamenei ? Dans le cas du président américain sortant, la censure a été expliquée - et justifiée ? -par "les discours de haine". Sur le papier, pareil argument peut être recevable. Mais qu'en est-il du contenu de tels discours ? D'une autre manière, sous certaines formes, cette qualification peut être établie - racisme, antisémitisme, violence physique,... Mais cette difficulté existe: où commence et où finit un discours de haine ? De quoi ouvrir la porte à des mécanismes de censure actionnés par des rapports de force à l'avantage des GAFAM. Une autre problématique ; celle de la conciliation de la liberté et de la responsabilité sur les réseaux sociaux.
C'est cette délégation de fait d'un pouvoir de régulation qui est cause. Une compétence qui n'est pas contrôlée par aucun régulateur public. Les GAFAM occupent de manière oligopolistique un espace public numérique devenu en moins d'une décennie le soubassement de tout l'espace public. Il faut ajouter un autre paramètre : celui d'une certaine américanisation de la pratique des libertés. Comment ? Les plateformes numériques formatent et façonnent l'exercice des libertés sur la base d'un régime planétaire de tolérance ; elles en sont les seules arbitres et juges ; elles obéissent à des critères américains émanant a fortiori de puissances privées.
C’est dire qu'il faut réagir ; que l'organisation de l'espace digital ne saurait passer sous le contrôle d'une logique marchande, discrétionnaire, alors qu'elle devrait relever de lois établies par les Parlements et appliquées par les juges. Les "normes " des plateformes numériques ne sont en effet ni équilibrées, ni transparentes ni susceptibles de recours en justice. En Europe, il y a eu le mois dernier un projet de Digital Services Act (DSA) ; mais il reste encore en-deçà d'une appréhension conséquente des enjeux. En septembre 2019, un Partenariat international a été signé par 38 Etats, en marge de l'Assemblée générale des Nations Unies ; il n'est pas cependant contraignant. L'une des options opératoires pourrait être de garantir le pluralisme et la neutralité idéologique des GAFAM en permettant à des organes de contrôle d'accéder aux boîtes noires des algorithmes.
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Maroc : une faille de la législation
Le Maroc est évidemment concerné, lui aussi, par cette problématique. Il l'est également par une autre question en instance : celle de la taxation des GAFAM. Google et Facebook captent plus de 70 % du marché marocain de la publicité digitale - quelque 400 millions de DH. Les opérateurs locaux n'ont pas de choix que de se disputer le "reste"... Pareille concurrence doit-elle perdurer, d'autant qu'elle est perçue et jugée comme étant déloyale ? Les GAFAM excellent dans l'optimisation fiscale et se déploient dans une "zone grise", entre les lieux de réalisation et de facturation des contrats. L'Europe est également confrontée à ce dossier sans y apporter encore une solution. Une faille existe dans la présente situation celle de la domiciliation mise à profit. Non domiciliées au Maroc, les GAFAM arrivent ainsi à faire plier les lois fiscales à leur avantage. N'ayant aucune représentation juridique dans le Royaume, ces plateformes s'affranchissent de toute possibilité de mise en conformité par fiscale. La DGI avait bien annoncé l'exploration de piste de taxation de ces opérateurs - sans suite... Une publicité sur Facebook visant le marché marocain ne paie aujourd'hui aucune TVA (20 %). Les factures sont établies en hors taxe parce que présentées comme des opérations d'export. Un problème de manque à gagner fiscal, de transfert de devises (plus de 40 millions de dollars). Faut-il continuer à regarder ailleurs ? En tout état de cause, une normalisation s'impose à l'évidence - question de souveraineté digitale...
Publié par Mustapha Sehimi sur https://quid.ma/
Le Maroc est évidemment concerné, lui aussi, par cette problématique. Il l'est également par une autre question en instance : celle de la taxation des GAFAM. Google et Facebook captent plus de 70 % du marché marocain de la publicité digitale - quelque 400 millions de DH. Les opérateurs locaux n'ont pas de choix que de se disputer le "reste"... Pareille concurrence doit-elle perdurer, d'autant qu'elle est perçue et jugée comme étant déloyale ? Les GAFAM excellent dans l'optimisation fiscale et se déploient dans une "zone grise", entre les lieux de réalisation et de facturation des contrats. L'Europe est également confrontée à ce dossier sans y apporter encore une solution. Une faille existe dans la présente situation celle de la domiciliation mise à profit. Non domiciliées au Maroc, les GAFAM arrivent ainsi à faire plier les lois fiscales à leur avantage. N'ayant aucune représentation juridique dans le Royaume, ces plateformes s'affranchissent de toute possibilité de mise en conformité par fiscale. La DGI avait bien annoncé l'exploration de piste de taxation de ces opérateurs - sans suite... Une publicité sur Facebook visant le marché marocain ne paie aujourd'hui aucune TVA (20 %). Les factures sont établies en hors taxe parce que présentées comme des opérations d'export. Un problème de manque à gagner fiscal, de transfert de devises (plus de 40 millions de dollars). Faut-il continuer à regarder ailleurs ? En tout état de cause, une normalisation s'impose à l'évidence - question de souveraineté digitale...
Publié par Mustapha Sehimi sur https://quid.ma/