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​Éducation, mariage, migration : les trois freins à l’autonomie des filles rurales


Rédigé par La Rédaction le Mercredi 26 Mars 2025



Dans le Maroc profond, l’avenir d’une fille se joue trop souvent dès l’adolescence. Accès limité à l’éducation, mariages précoces et exode vers les villes composent un triptyque implacable qui empêche des millions de jeunes femmes rurales d’accéder à l’autonomie économique. Le rapport du Haut-Commissariat au Plan (HCP) de mars 2025 met en lumière cette spirale d’exclusion qui commence tôt… et finit rarement bien.

Premier verrou : l’école. Si l’enseignement primaire s’est largement généralisé dans les campagnes, le décrochage scolaire s’accélère au collège. En 2018, à peine 40% des filles rurales accédaient au collège, et seulement 12% atteignaient le secondaire qualifiant. Ces chiffres révèlent une rupture brutale avec la promesse d’égalité des chances. L’éloignement des établissements, le coût du transport ou des fournitures, et surtout les normes sociales qui valorisent peu l’instruction des filles, contribuent à cette déperdition massive. Or, l’éducation reste le principal levier de l’autonomisation, tant sur le plan économique que personnel.

Deuxième barrière : le mariage précoce. Bien que l’âge moyen au premier mariage ait progressé dans les années 1980 et 1990, il est reparti à la baisse depuis 2010. En 2024, une fille rurale se marie en moyenne à 23 ans, contre 25,4 ans en ville. Dans certaines régions enclavées, le mariage peut survenir bien plus tôt, parfois dès 16 ans. Cette précocité interrompt les études, réduit les opportunités professionnelles et enferme les jeunes femmes dans un cycle de dépendance économique, accentué par de fortes responsabilités domestiques et familiales.

Troisième impasse : l’exode rural. Privées d’emplois qualifiés dans leur région, de plus en plus de jeunes femmes quittent les villages pour tenter leur chance en ville. Mais sans diplôme, sans réseau, elles deviennent vulnérables aux emplois informels, précaires et mal rémunérés, souvent dans le secteur domestique. Cette migration appauvrit les territoires ruraux en capital humain féminin, tout en n’offrant que rarement un véritable tremplin vers l’indépendance.

Le phénomène des "NEET" (ni en emploi, ni en études, ni en formation) est révélateur : en 2019, 61,8% des jeunes femmes rurales âgées de 15 à 29 ans étaient dans cette situation. La majorité d’entre elles sont mariées, sans diplôme, confinées aux tâches domestiques. Ce chiffre alarme autant qu’il interpelle : que perd le Maroc à laisser ces millions de jeunes femmes au bord de la route du développement ?

Pour briser ce cercle vicieux, le rapport du HCP propose une série de leviers d’action : améliorer l’accès aux internats et transports scolaires, retarder l’âge légal du mariage, développer des formations professionnelles en milieu rural, et créer des opportunités économiques locales adaptées aux jeunes femmes. Une approche intégrée est indispensable pour que l’autonomie des filles rurales cesse d’être une utopie.

Car derrière chaque jeune fille empêchée de se projeter dans l’avenir, c’est une partie du potentiel national qui s’éteint. Instruire, protéger et retenir les jeunes femmes rurales dans leurs territoires n’est pas une simple question sociale. C’est un pari sur l’avenir.

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Mercredi 26 Mars 2025

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