Le transport maritime, véritable pilier du commerce mondial, représente 80 % des échanges internationaux en volume. Cependant, la flambée des coûts de fret, exacerbée par des crises géopolitiques et sanitaires, a eu des répercussions marquées sur l’inflation, notamment au Maroc. Une étude récente met en lumière les effets persistants de ces coûts sur l'économie marocaine et propose des pistes d’analyse pour mieux comprendre cette dynamique.

En 2021, les indices mondiaux des taux de fret, tels que le Harpex et le Baltic, ont atteint des sommets historiques, enregistrant des hausses respectives de 532 % et 415 % en glissement annuel. Cette explosion des coûts a été déclenchée par plusieurs facteurs : goulets d'étranglement logistiques, déséquilibres entre l’offre et la demande, et tensions géopolitiques comme la guerre en Ukraine. Ces perturbations ont entraîné des retards de livraison et une augmentation des coûts, avec des répercussions directes sur les prix des produits importés.

Au Maroc, où le commerce maritime représente 95 % des échanges extérieurs, les coûts de fret influencent directement les prix des marchandises. L'étude a utilisé des modèles économétriques SVAR pour estimer les effets des fluctuations des taux de fret sur trois indicateurs principaux : l’inflation globale (IPC), l’inflation sous-jacente (IPCX) et l’inflation des biens échangeables (IPCXE).

Les résultats montrent que :
 

• Une hausse de 100 % de l'indice Harpex entraîne une augmentation de 0,3 % de l’IPC, avec un effet persistant de 8 mois.
• L’impact est plus marqué sur l’IPCX et l’IPCXE, atteignant 0,5 % avec une durée de 12 mois.
• L’indice Baltic, focalisé sur les matières premières, génère des effets moindres mais significatifs, avec des hausses de 0,1 % à 0,2 % selon l’indicateur.

Des répercussions économiques et stratégiques

Cette inflation importée est aggravée par la dépendance énergétique et alimentaire du Maroc, où les importations représentent 55 % du PIB. La hausse des coûts de fret pèse lourdement sur les entreprises, qui répercutent ces charges sur les consommateurs, renforçant ainsi les pressions inflationnistes.

Par ailleurs, l’étude souligne l’importance des alliances stratégiques dans le secteur maritime, qui concentrent 84 % de la capacité de transport mondiale entre les mains de dix compagnies. Cette concentration limite les marges de négociation des pays comme le Maroc et rend les coûts de fret plus volatils.

Recommandations pour une gestion proactive

Pour atténuer ces impacts, l’étude propose :

Développer des indices spécifiques au Maroc pour suivre les variations des coûts de fret maritime et leur impact sur l’inflation.
Diversifier les sources d’approvisionnement pour réduire la dépendance aux importations lointaines et mieux maîtriser les coûts logistiques.
Renforcer la flotte maritime nationale, actuellement limitée, afin de diminuer la dépendance vis-à-vis des opérateurs internationaux.

Une fragilité persistante malgré des ajustements

Malgré une stabilisation partielle des coûts de fret en 2023, la persistance de tensions géopolitiques, notamment en mer Rouge, continue d’alimenter les incertitudes. Le Maroc, en tant qu'économie ouverte, reste vulnérable à ces fluctuations. L’élaboration d’outils d’analyse adaptés et la mise en œuvre de stratégies logistiques robustes sont donc cruciales pour préserver sa compétitivité et limiter l’impact sur les ménages.
 

Quelles relations existent entre coûts maritimes et inflation marocaine ?
Comment les chocs internationaux affectent-ils l'inflation au Maroc ?
Quels facteurs influencent la persistance de l'inflation ?