En dénonçant publiquement la collaboration de Microsoft avec l’armée israélienne dans le contexte de la guerre à Gaza, elle a fait plus que protester. Elle a cassé le décor. Renvoyée dans la foulée, elle devient une icône sur les réseaux, symbole d’un courage brut, sans hashtag marketing ni filtre LinkedIn. Un rappel brutal : derrière les technologies “neutres”, il y a des choix, des silences, des complicités.

Mais au GITEX Africa, son nom est à peine murmuré. On préfère parler d'innovation, de partenariats, de souveraineté numérique. Le Maroc, si prompt à saluer ses talents à l’international, est soudain très discret sur cette jeune femme. Parce qu’elle dérange. Parce qu’elle dépasse les cadres. Parce qu’elle rappelle que l’éthique en IA ne se résume pas à un tableau Excel de bonnes pratiques.

Ibtihal n’a pas proposé une nouvelle API, elle a posé une bombe symbolique : et si nos IA n’étaient pas “intelligentes” mais simplement obéissantes ? Et si le vrai progrès commençait par la désobéissance ?

C’est un geste fort, sans aucun doute. Mais que reste-t-il après la tempête médiatique ? Une vidéo virale. Un licenciement. Et peut-être… rien d’autre. L’histoire d’Ibtihal Aboussaad nous fascine parce qu’elle nous donne l’illusion qu’un individu peut encore se dresser face aux géants. Mais dans la réalité, l’IA continue sa route, les contrats militaires aussi, et la machine avance, imperturbable. Le courage individuel ne suffit pas à faire système. Il est admirable, mais souvent sans effet. Et le Maroc, qui célèbre sa diaspora lorsqu’elle brille dans les classements, reste timide quand elle dénonce. On applaudit les success stories, mais pas les lanceurs d’alerte. Alors Ibtihal, héroïne d’un jour ? Ou simple glitch dans une matrice qui se referme aussitôt ?