Par Aziz Boucetta
Cette « faveur » accordée aux têtes bien pleines et bien faites marocaines succède à ce discret arrangement avec les médecins, conclu voici quelques mois, qui auront ainsi droit à une démarche facilitée auprès des services consulaires. C’est gentil… C’est vraiment gentil oui, mais rappelons quand même cette petite phrase prononcée par l’alors tout nouveau Premier ministre Gabriel Attal, annonçant la nomination d’un émissaire chargé d’« aller chercher à l’étranger des médecins qui voudraient venir exercer en France ».
Aujourd’hui, ce sont les étudiants mastérisés, doctorants ou ingénieurs qui sont courtisés, avec la mise en place d’une « simplification » des rendez-vous chez TLS, et une bienveillance. Les mots ont un sens, et quand elles émanent d’un organisme officiel français, ils ont une plus grande portée ; le terme « simplifier » implique qu’il y a « complication » ou « complexité » en temps normal, et cette complexité porte plusieurs noms : TLS, politique migratoire, mesure de rétorsion… quant au mot « bienveillance », doit-on le mettre en miroir avec « malveillance » pour les dossiers ordinaires, ceux dont les porteurs sont voués à attendre et à subir ?
La France se protège, on peut la comprendre mais on peut aussi rejeter sa manière de voir et de faire, et le lui dire. Seulement, nos gouvernants assistent à ces politiques de plus en plus restrictives, à l’humiliation aussi inutile que croissante – malgré ce qu’on en dit à l’ambassade de France à Rabat –, et tout ce qu’en dit notre ministre des Affaires étrangères est qu’ « il s’agit d’une décision souveraine ». Soit, mais de nôtre, de décision souveraine, n’y en a-t-il pas ? Il faut croire que non.
Il faut qu’on se le dise une fois pour toutes. Toutes les politiques, tous les efforts destinés à améliorer notre relation avec l’Union européenne en bloc ou avec chacun de ses membres en particulier, seront promis à l’échec tant que l’UE contrôle nos mouvements et tant que nous en serons encore à nous aligner, docilement, stoïquement, longuement, dossiers en main, données personnelles prêtes à être remises à un inconnu, chapeau...
sur la tête pour atténuer les piqûres du soleil,… devant les locaux de TLS. Un Etat qui ne protège pas ses citoyens, qui ne défend par leur dignité, est un Etat qui ne sera pas respecté lui-même, il ne le sera jamais.
M. Attal, du temps où il était porte-parole du gouvernement, avait indiqué du menton qu’il réduira de moitié les visas pour les Marocains, pour punir ou tordre le bras au gouvernement de Rabat ; « décision souveraine », réagit mollement M. Bourita.
TLS filme ‘à l’insu de leur plein gré’ les demandeurs de visas et envoie ces images à des institutions gouvernementales à l’étranger, selon la CNDP, qui se saisit de cette affaire, s’en empare, constitue un dossier, qu’elle range dans un tiroir… M. Attal, promu depuis, annonce un émissaire pour aller débaucher les médecins dans les pays qui sont les leurs ; aucun signe de vie (politique) de MM. Bourita, Miraoui, Aït Taleb.
Dans l’intervalle, un accord est signé avec les médecins marocains pour faciliter leurs déplacements en France…
Pourquoi donc tous ces responsables de chez nous sont-ils si « bienveillants » à l’égard d’un pays qui veut bien manifester sa « bienveillance » dans le traitement des demandes de visas ? Les dirigeants français agissent encore comme en terrain conquis ; comme le dit J-L Mélenchon, « ils » ne se rendent même plus compte de leur arrogance. Mais pourquoi se priver d’arrogance quand en face, chez les homologues, on rencontre l’indifférence et même une forme d’acquiescement ?
Ainsi donc, voici comment on peut résumer les choses : la France maintient sa politique de visas, de plus en plus serrée, quoiqu’on en dise, mais « facilite, avec bienveillance » l’entrée sur son territoire de doctorants et de médecins, en plus des travailleurs saisonniers (placés dans une forme moderne de servage), qui vont travailler dans les champs, et revenir ; de « l’immigration choisie », en quelque sorte.
Pour la partie marocaine, rien, aucun droit n’est accordé à ses citoyens, aucune dérogation n’est consentie aux Marocains. Comment le Maroc réagit-il ? Il a reçu de plus en plus de dignitaires français cette année, signant des conventions, accords, contrats et autres dons… nos amis Français promettant, quand même, en échange, d’avancer sur la question du Sahara.
Le prisme était net. Avec Paris, il l’est moins, et de moins en moins. Attendons néanmoins le prochain gouvernement pour voir comment évolueront les choses.
Rédigé par Aziz Boucetta sur Panorapost