Une plongée émouvante dans la Somalie contemporaine : « The Village Next to Paradise » de Mo Harawe


Rédigé par le Mardi 3 Décembre 2024

Dans un paysage cinématographique en constante évolution, Mo Harawe, réalisateur somalien installé en Autriche, s’impose avec son premier long métrage, "The Village Next to Paradise".



Ce film, projeté dans la compétition officielle du 21e Festival international du film de Marrakech (FIFM), est une œuvre poignante et profondément humaine. À travers l’histoire d’une famille vivant dans un village isolé de Somalie, sous la menace permanente des frappes de drones, Harawe offre une perspective inédite sur son pays d’origine, loin des clichés habituels.

Le récit suit Mamargade (Ahmed Ali Farah), un père célibataire qui lutte quotidiennement pour subvenir aux besoins de son fils Cigaal (Ahmed Mohamud Saleban). Chauffeur, réparateur de véhicules ou fossoyeur, Mamargade exerce divers métiers pour assurer leur survie dans un désert hostile, balayé par des vents violents. La disparition soudaine de l’instructeur de son fils pousse Mamargade à envisager de l’inscrire dans un pensionnat voisin, une décision qui soulève des tensions entre eux. Parallèlement, la sœur de Mamargade, Araweelo (Anab Ahmed Ibrahim), rêve d’échapper à ses problèmes conjugaux et d’ouvrir une boutique de vêtements. Ces ambitions modestes mettent en lumière les défis socio-économiques auxquels les personnages font face, tout en reflétant la vision nuancée du réalisateur.

Mo Harawe, en décrivant son film au FIFM 2024, explique qu’il s’agit avant tout d’un portrait familial intimiste : « Nous suivons une famille somalienne non conventionnelle dans leur quotidien et découvrons ce qui influence leurs décisions. En arrière-plan, le contexte du pays se dévoile progressivement. » Ce choix narratif permet de dépasser les représentations simplistes souvent associées à la Somalie et d’explorer des thèmes universels tels que l’amour, le sacrifice et la résilience.

L’esthétique visuelle du film, orchestrée par le directeur de la photographie Mostafa El Kashef, est un autre point fort. Les paysages arides et majestueux de la Somalie sont capturés avec une précision saisissante, rendant palpable la dureté du désert. Les défis techniques rencontrés lors du tournage, notamment l’impossibilité d’importer des équipements depuis Vienne – ont poussé l’équipe à faire preuve d’une créativité remarquable. « Quand nous manquons de ressources, nous devons être inventifs », a affirmé Harawe.

Enfin, les performances des acteurs non professionnels apportent une authenticité rare à cette œuvre. Mo Harawe souligne leur contribution exceptionnelle : « Ils ne sont peut-être pas formés, mais leurs performances sont profondément sincères. » Ce réalisme permet aux spectateurs de s’immerger pleinement dans la vie des personnages.

Révélé au Festival de Cannes avant d’être présenté au FIFM, "The Village Next to Paradise" marque un tournant pour le cinéma d’Afrique de l’Est. En mêlant émotion brute et réflexion politique, ce film ouvre une fenêtre sur une Somalie méconnue et annonce une nouvelle ère pour les cinéastes de la région.

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Mardi 3 Décembre 2024
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