Un Jésus IA : audace ou sacrilège ?

Si une expérience similaire était menée dans une mosquée, la réaction des musulmans serait vraisemblablement marquée par une grande controverse.


Rédigé par La Rédaction le Dimanche 24 Novembre 2024

Débat - Podcast ci-dessous de cet article : les chroniqueurs de la Web Radio débattent des idées contenues dans cet article ci-dessus à travers ces questions :
Quel impact la technologie a-t-elle sur la spiritualité contemporaine ?
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L’intelligence artificielle entre dans les lieux saints – Révolution spirituelle ou profanation technologique ?

Dans un monde en perpétuelle mutation, la rencontre entre foi et technologie continue de provoquer des débats intenses. La récente expérimentation menée à la chapelle Saint-Pierre de Lucerne, en Suisse, en est un exemple frappant. Avec son projet intitulé « Deus in Machina », cette église a introduit une intelligence artificielle représentant Jésus-Christ, bouleversant les codes établis de la spiritualité et posant de nombreuses questions éthiques et théologiques.

Depuis août dernier, les visiteurs de cette chapelle suisse ont pu interagir avec un avatar virtuel de Jésus, animé par une intelligence artificielle capable de converser en cent langues. Placé dans un confessionnal, ce Jésus numérique répondait en temps réel aux questions des fidèles. Environ 1 000 participants de différentes confessions ont participé à cette expérience inédite. Selon Marco Schmid, théologien à l’origine du projet, l’objectif était d’étudier la manière dont les fidèles interagissent avec une telle innovation : quels sujets abordent-ils avec un Jésus numérique ? Quels impacts cela peut-il avoir sur leur foi ?

Si deux tiers des participants ont décrit l’expérience comme spirituellement enrichissante, des voix critiques se sont aussi fait entendre. Pour certains, les échanges manquaient de profondeur, illustrant une limite technique de l’intelligence artificielle. Ces réactions contrastées reflètent bien le choc des sensibilités face à l’intégration croissante de la technologie dans les domaines sacrés.

L’expérience s’inscrit dans une série d’expérimentations menées par cette église en collaboration avec un laboratoire universitaire, explorant des technologies immersives comme la réalité augmentée et virtuelle. Cependant, l’introduction d’un avatar religieux représente une avancée sans précédent, suscitant curiosité et perplexité. Les concepteurs ont formé cette IA à partir de textes théologiques afin de garantir la conformité des réponses avec la doctrine chrétienne, mais des doutes subsistent sur les risques d’erreurs ou de messages inappropriés.

Malgré des tests préalables, l’initiative soulève des inquiétudes sur le plan éthique.
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Certains voient en cette innovation une modernisation nécessaire, capable de rapprocher les jeunes générations des institutions religieuses. D’autres, au contraire, dénoncent une banalisation du sacré, une sorte de profanation technologique. La frontière entre respect des traditions et adaptation aux réalités contemporaines s’avère délicate à tracer.

L’avenir de telles initiatives dépendra de la capacité des institutions religieuses à encadrer ces outils technologiques et à éviter les dérives potentielles. Mais une chose est certaine : la quête de spiritualité, qu’elle passe par des moyens traditionnels ou numériques, reste un besoin humain universel.

Si une expérience similaire était menée dans une mosquée, la réaction des musulmans serait vraisemblablement marquée par une grande controverse.

L’introduction d’une intelligence artificielle représentant une figure religieuse, telle que le Prophète Muhammad (que la paix et la bénédiction soient sur lui), est en effet inconcevable dans l’islam, où la représentation des prophètes est strictement interdite par les textes religieux pour préserver leur sacralité et éviter toute forme d’idolâtrie.

Les musulmans attachent une importance profonde au respect des traditions et à la préservation des enseignements spirituels dans leur forme authentique. Une initiative de ce type risquerait donc d’être perçue comme une transgression grave des valeurs islamiques. Les érudits religieux, les institutions islamiques et une large partie de la communauté s’opposeraient fermement à un tel projet, le considérant comme une atteinte au sacré.

Cependant, certains courants progressistes pourraient voir dans cette démarche un outil pédagogique pour transmettre les principes de l’islam à une jeunesse de plus en plus connectée. Une IA, formée uniquement aux textes coraniques et aux hadiths, pourrait éventuellement susciter un débat sur son rôle éducatif. Malgré tout, la majorité des musulmans privilégierait des formes d’apprentissage plus traditionnelles pour éviter tout détournement ou banalisation de leur foi.

Débat - Podcast : les chroniqueurs de la Web Radio débattent des idées contenues dans cet article ci-dessus à travers ces questions :

Quel impact la technologie a-t-elle sur la spiritualité contemporaine ?
Comment les religions perçoivent-elles l'intégration de l'IA dans le sacré ?
L'IA peut-elle réellement incarner la foi et la sagesse divine ?

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Dimanche 24 Novembre 2024
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