Triste Afrique…


Les chefs d’états et de gouvernement d’une vingtaine de pays africains ont répondu favorablement à l’invitation de Vladimir Poutine à un sommet réunissant l’Afrique et la Russie à Saint Petersbourg.



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Ce sommet devait être l’occasion pour Poutine de démontrer au monde occidental, avec qui il est fâché depuis qu’il a décidé d’avaler l’Ukraine il y’a 17 mois, qu’il avait encore de la visibilité à l’international et qu’il pouvait compter sur des alliés ou du moins des amis bienveillants, surtout en Afrique et briser ainsi son isolement sur la scène mondiale. 

Le PIB de toute l’Afrique est de 2513 milliards de dollars, soit moins de 3 % du PIB mondial. Le PIB de la Russie est de 1779 milliards de dollars et comparativement le PIB de la France est de 2958 milliards de dollars. Celui de l’Europe est de 15.810 milliards de dollars et celui de la Chine culmine à 17.963 milliards de dollars…

L’Afrique possède des richesses innombrables. À l’échelle mondiale, il est estimé que l'Afrique représente 40 % des réserves d'or, 30 % des réserves de minerais, 12 % des réserves de pétrole, 60 % du cobalt et 90 % du platine.

L’Afrique possède surtout 21 % des réserves mondiales en Uranium, dont 7 % de cette ressource stratégique se situent au Niger, qui vient de connaître un coup d’état, ce qui met à mal la sécurité énergétique en France principal exploitant des mines d’Arlit au nord du pays et qui permettent de produire 35% de l’énergie électriques dans l’hexagone…

Les africains savent tout cela, essayent de se libérer du joug du néocolonialisme, mais peinent à faire décoller leur économies depuis les indépendances survenues durant les années 60. Le colonialisme a appris aux chefs d’états africains à se comporter comme les blancs pour asservir leur concitoyens demeurés noirs, au profit des anciennes puissances coloniales qui voulaient continuer à exploiter éhontement les richesses africaines, sans contribuer efficacement au développement du continent noir.

Franz Fanon l’a très bien expliqué en son temps, ainsi que l’agronome René Dumont dans son célèbre ouvrage de 1962  « l’Afrique noire est mal partie ». Ce dernier y décrit méthodiquement les handicaps du continent africain, les problèmes de corruption, les conséquences de la décolonisation, et son diagnostic s'est révélé le plus souvent pertinent par la suite…

Au bout de 6 décennies de cet état de sous-développement, les africains engins réveillés grâce à la mondialisation, se mettent à brader leurs richesses avec de nouveaux partenaires dont la Chine, qui leur construit des infrastructures, mais qui en échange, siphonne leurs richesses de manière bien pire que les européens.

Aujourd’hui les africains se tournent vers la Russie, y mendiant du blé et des baisses de dettes, surtout militaires. Un temps ils y cherchaient aussi des mercenaires de chez Wagner, la société appartenant à Prigogine, le traiteur devenu guerrier et accessoirement ami de Poutine. Il faut dire que l’Afrique est un immense continent qui peut contenir la totalité des grands pays du monde sur son territoire et il resterait encore des milliers de kilomètres carrés pour caser d’autres miettes de nations.

Pourtant le point faible de cet immense continent est la sécurité. Des frontières quasi inexistantes entre des états dont les tracés ont été dessinés à la règle, lors de sommets européens durant le 19eme siècle à Berlin ou Madrid, quand les puissances blanches se sont partagé les territoires de l’Afrique, sans que les africains ne soient au courant. Imaginez un peu que l’ancien roi de Belgique, Léopold II, s’est arrogé la possession du Congo, comme une possession personnelle où il faisait travailler toute la population sous un régime d’esclavage pour son propre profit égoïste.

Et celles et ceux qui refusaient de travailler ou qui chapardaient quelques nourritures, on leur coupait la main ou subissaient des coups de fouet…

Des exactions comme celles perpétrées par les agents de Léopold 2 furent légion en Afrique durant plus d’un siècle de colonisation.

Et quand les indépendances survinrent, des leaders africains sincères apparurent en Afrique comme Patrice Lumumba, Kwamé Nkrumah, Hamani Diori, Sékou Touré, Léon Mba ou Thomas Sankara, mais quand ils arrivèrent au pouvoir, ils furent vite renversés par des coups d’états alimentés par les anciennes puissances coloniales qui ne voulaient pas que les consciences africaines se réveillent et l’état de servitude ambiant des africains puisse s’achever. 

Ces chefs d’états, souvent naïfs et révolutionnaires, furent remplacés par des militaires à la solde de « cellules africaines » nichées dans les plus respectables chancelleries européennes, qui les alimentaient en armes et en mercenaires pour se maintenir au pouvoir coûte que coûte. 
 

Des ambassadeurs européens en Afrique devinrent de vrais proconsuls, élisant et destituant les élites locales au gré des intérêts de leurs pays et au détriment des intérêts des africains. 

Au nom de la lutte contre le communisme soviétique ou chinois, l’Afrique devint le champs de bataille des services secrets occidentaux qui alimentèrent de graves guerres civiles comme celles du Katanga au Zaïre ou Biafra au Nigeria durant les années 60, en Angola durant les années 80, ou celles du Soudan, de la Somalie, de l’Éthiopie et du Rwanda durant les années 90 et 2000…

Aujourd’hui encore de larges territoires au Sahel sont occupés par des dgihadistes et des groupes terroristes en tous genres, au Mali, au Niger au Burkina Fasso, au Tchad, au Nigeria. Même des pays comme le Sénégal, la centre Afrique, la RDC ou la Côte d’Ivoire n’échappent pas à la déstabilisation perpétrée par des groupes sécessionnistes. 

Ces déstabilisations obligent les états africains à vivre dans une insécurité permanente qui les oblige à toujours recourir à des protections venant de l’extérieur, au plus grand bonheur des sociétés minières et pétrolières qui trouvent là le meilleur moyen de siphonner les sols africains sans payer trop de redevances à l’état central. 

Souvent ces sociétés financent leur propres groupes sécessionnistes afin de contrôler aisément leurs gisements. Tout est bon pour piquer les richesses africaines, sans rien payer en échange. Et quand bien même ces sociétés payent les redevances obligatoires aux états, cet argent finit son parcours dans les banques suisses des potentats africains, qui mendient après-coup de l’aide au développement et donc de la dette, pour financer le train de vie de leur état et importer du blé et du maïs pour permettre la survie de leurs populations…

Et c’est ce que les pays africains vont aller chercher en Russie actuellement. Le jeune président du Burkina Fasso, putschiste de son état, a très bien résumé cet état d’esprit lors de son intervention au sommet de Saint Petersbourg : « Comment l’Afrique avec tant de richesses sur notre sol, avec une nature généreuse, de l’eau, du soleil en abondance, l’Afrique est aujourd’hui le continent le plus pauvre. L’Afrique est un continent affamé. Et nous chefs d’état nous passons notre temps à mendier. Voilà des questions auxquelles nous n’avons pas de réponses…».

Les maux qui gangrènent l’Afrique sont multiples : corruption, gabegie, séditions, guerres civiles, coups d’états permanents, famines, pandémies, dictatures, absence de démocratie, absence de conscience collective... 

Alors quand un chef d’état européen comme Nicolas Sarkozy vient dire aux africains que « Le drame de l'Afrique, c'est que l'homme africain n'est pas assez entré dans l'Histoire. Jamais il ne s'élance vers l'avenir. Dans cet univers où la nature commande tout, l'homme reste immobile au milieu d'un ordre immuable où tout est écrit d'avance.

Il n'y a de place ni pour l'aventure humaine, ni pour l'idée de progrès… »; les africains restent ébaubis devant tant de méconnaissance de leur histoire, émanant d’un chef d’état européen, qui pourtant, s’enorgueillit de lire des livres…

Les africains n’ont à présent que leurs yeux pour pleurer devant un destin funeste et une destinée qui ne leur appartient pas, ballotés qu’ils sont entrés des intérêts économiques et géostratégiques, qui les dépassent.

Aujourd’hui Poutine offre de 25.000 à 50.000 tonnes de blé au Burkina Faso, au Mali, au Zimbabwe, à la Somalie, à la République centrafricaine et à l’Érythrée et se chargera du transport gratuit des céréales vers ces pays.

Sauf que ces pays préfèrent avoir du maïs, plus adapté à leur nourriture de base, et ça la Russie n’en possède pas. Ils mangeront du pain à base de blé et ça fera de la pub humanitaire à Poutine. En contrepartie de quoi ? Le président russe ne l’a pas dit, car l’aumône n’est jamais gratuite, surtout chez les slaves.

Notre pompiste national, Aziz qui était présent à ce sommet Afrique-Russie, à bien essayé de répliquer en disant que l’Afrique n’a pas besoin d’aide mais de partenariats économiques. 

Le Maroc peut se targuer de le dire, fier aujourd’hui de ce qu’il a accompli en vingt ans, sortant doucement mais sûrement de son sous-développement récent.

Ce n’est pas le cas des autres pays africains qui restent dans leur grande majorité dépourvus de routes d’autoroutes, de lignes ferroviaires, d’eau potable, d’électricité ou même de trottoirs…

Même la grande Egypte, qui, du temps du Roi Farouk nourrissait l’Europe en blé, prêtait de l’argent à l’Angleterre et où la Guinée égyptienne valait plus que la livre sterling, est devenue sous le régime militaire qui y sévit depuis 1952, un grand pays de 100 millions d’êtres humains affamés. 

Elle importe des millions de quintaux de blé annuellement pour nourrir sa population, aux prises avec une inflation stratosphérique. 

Le président égyptien est affublé du sobriquet de « Maréchal Mendiant », passant son temps à quémander des aides auprès des émirats du golfe autant qu’auprès de la Russie et de la Chine. Et au même moment il construit des palais présidentiels partout en Égypte et une nouvelle capitale pharaonique a 60km du Caire et où personne ne veut aller…

Que dire de l’Afrique du Sud jadis prospère sous l’égide des blancs afrikaners et devenue pauvre sous la démocratie à majorité africaines des copains de Nelson Mandela. Un ramassis de soudards et de Kleptocrates qui ont mis à genoux l’économie florissante de l’Afrique du Sud. Aujourd’hui toutes les villes de ce pays connaissent une grande insécurité et une interruption d’électricité 12 heures par jour…

Que dire de la Tunisie, qui est en quasi faillite grâce à l’intelligence destructrice de son président Kaïs Said. 
Et ce propos ne saurait s’achever sans parler de la grande puissance en carton pâte qu’est devenue l’Algérie. Un pays qui a gaspillé en 10 ans, 800 milliards de revenus pétroliers en subventions et en importation de tout ce qu’il consomme, sans rien transformer.

Pas d’eau potable dans les robinets des grandes villes, des queues monstrueusement longues de la population pour acheter un sac de lait en poudre, un litre d’huile ou un sac de semoule. Un pays qui possédait des terres tellement généreuses qu’il était le grenier de l’Afrique aux côtés du Soudan. 

Aujourd’hui l’Algérie est l’ombre d’elle-même, gangrenée par une oligarchie de militaires qui ont saccagé toutes les richesses laissées par la France dans ce pays et qui mendie aujourd’hui des aides auprès des chinois et des russes. Et le président algérien, sans honte aucune, ose demander l’intégration de son pays dans les BRICS, ce nouvel ordre mondial économique en gestation.

Avec un PIB de 150 milliards de dollars ? Avec une économie socialiste qui ne produit rien et qui consomme tout ? 

Le président chinois XI n’a pas feint son plaisir d’asiatique triomphant en rappelant au président algérien que les médecins chinois ont mis au monde 2,7 millions d’algérien et soigné 22 millions d’habitants de ce pays depuis 1960. Un véritable camouflet pour un dirigeant algérien qui se targuait en toute effronterie de posséder la meilleure médecine du continent et qui déclarait récemment devant la télévision chinoise que l’Algérie constituait pour l’Afrique ce que représente la Chine pour le monde…

Pourtant les solutions existent. Et c’est aux africains seuls de les activer. Le monde ne peut se passer des richesses des sols africains ni de la force de travail de ses hommes et femmes.

Le monde occidental vieillit à grande vitesse et il n’a plus de capacité de se régénérer démographiquement. Il a besoin des africains pour continuer à être riche et à survivre. Les africains doivent se résoudre à se prendre en main, à arrêter de se morfondre et de se lamenter sur leur sort sans réagir. 

C’est facile de rejeter la faute sur les autres, de parler tout le temps du complot extérieur et de la voracité des multinationales étrangères. Tout cela on le sait. Les africains doivent se bouger et arrêter d’être fatalistes.

Sinon ils continueront à être les mendiants qu’ils sont devenus, à force de s’entretuer entre-eux, à piller eux-mêmes leurs richesse à cause de la corruption et de la gabegie, qui les minent et continuer d’adorer se faire dicter leurs actions par les blancs occidentaux au lieu de compter sur leurs compétences nationales. 

Quant à la Russie, ce pays est tout aussi pauvre que les pays africains, ne produisant rien d’interessant et se contentant de vendre du blé, des armes, du pétrole et du gaz. Il ne peut rien offrir aux africains que des kilos de blé ou des armes pour continuer à s’entretuer entre-eux. 

Il n’y a pas pire colonialisme que celui des esprits. 

Triste Afrique… Reveille-toi. Ton avenir est entre tes mains et non entre celles de Vlad l’Empaleur…

Rédigé par Rachid Boufous


Lundi 31 Juillet 2023

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