Entretien exclusif de lodj.ma avec Maître Abdallah BENZEKRI PhD Law & Finance Paris Avocat au Barreau de Casablanca
Première question Maître : pourquoi maintenant, alors qu'on en parle depuis les années 2000?
Maître Abdallah BENZEKRI : Le Crowdfunding est un mode de financement dont l'apparition remonte à plusieurs décennies, mais se manifestait dans ce qu'on appelait le "Financement de proximité", notamment par le don entre les proches, les participations des "anges salvateurs", le prêt entre amis, le "Love Money"...
Cependant, malgré l'existence de ces formes de financement de proximité, il fallait attendre le développement phénoménal de l'internet et des plateformes électroniques pour voir émerger une nouvelle forme de financement de proximité, lequel devient populaire par la possibilité d'y faire participer plusieurs milliers de personnes, voire davantage.
Existe t-il différents types de crowdfunding et lesquels? Sont-ils intégrés dans cette loi ?
La loi n° 15-18 prévoit les trois types de crowdfunding connus dans les autres législations comparables :
1. Le crowdfinding par le prêt (crowdLending), lequel consiste pour la société de Financement Collaboratif ( SFC) de mettre en relation, via la plateforme qu'elle gère, des porteurs de projets, désirant emprunter pour le lancement desdits projets et des prêteurs potentiels, ayant de la liquidité à placer, si le prêt est avec intérêt ou simplement d'aider à développer un projet, si le prêt est sans intérêt. Compte tenu de sa nature de prêt, cette opération relève de la supervision de Bank Al maghrib.
2. Le Crowdfunding d'investissement ( CrowdEquity), lequel consiste pour un investisseur à prendre une participation dans un projet proposé via une plateforme dédiée, moyennant la remise par la société porteuse du projet des titres représentatifs de cet investissement ( actions, certificats d'investissement...). Compte tenu de sa nature juridique d'opération financière, le crowdEquity relève de la compétence de l'AMMC.
3. Le CrowdFunding par le don, prévu par les dispositions de l'article 52 de la loi n° 15-18, est réalisé sous forme d'un don en numéraire, octroyé par un contributeur à un porteur de projet, dans la limite de 500.000 dh, ou au delà si la SFC obtient une autorisation de l'Administration compétente, en l'occurrence le Ministère de l'Intérieur.
La loi n° 15-18 relative au Crowdfunding est-elle complète pour espérer la réussite de cette forme de financement ?
Maître Abdallah BENZEKRI : il faudra signaler que toute loi ne peut prétendre être complète . Une loi a besoin de vivre et d'être pratiquée pour se rendre compte de ses insuffisances et lacunes. La loi n° 15-18, que j'ai participé personnellement à mettre en œuvre comme consultant auprès du Ministère des finances, a fait l'objet de plusieurs études d'impact préliminaires et de certains benchmark avec des législations voisines ou comparables.
Laissons la vivre et nous verrons après quelles seraient les lacunes à combler. Pour ce qui concerne le financement des TPE et des startUps, il faut dire que par ailleurs, le crowdfunding a pas mal participé au financement des TPE, compte tenu des montants et de l'inexistence d'intermédiation bancaire.
Ceci dit, le développement dans ce sens me paraît devoir passer par des périodes de balbutiement et de reconnaissance, avant de passer à un stade de maturité.
Quels sont les prérequis pour en garantir un grand développement, surtout que la bourse et la banque alternative n'arrivent pas encore à répondre à la demande de la grande majorité des TPE, TPI marocaines ?
Maître Abdallah BENZEKRI : Le financement des TPE TPI marocaines reste le problème épineux par excellence. D'un coté, vous avez lesdites TPE qui souffrent d'un déficit de financement et du manque de la coopération des banques et des autres opérateurs agréés et d'un autre côté, vous avez les établissements de crédit qui se plaignent du manque de structures de gouvernance et de la transparence des dirigeants de ces TPE.
Le crowdfunding pourrait jouer ce rôle intermédiaire pour assurer le financement de démarrage et de premiers développement de certains projets d'investissement portés par des startUps et des porteurs de projets novateurs.
Ceci dit, comme il est prévu par la loi n° 15-18, un minimum de transparence et d'organisation sera dans tous les cas requis, car l'argent récolté via les plateformes de crowdfunding reste l'argent des épargnants, qu'il faudra rembourser selon les conditions requises et, même dans le cas du don via la plateforme, il y aura certainement des gardes fous réglementaires afin de préserver l'épargne des contributeurs et éviter que l'argent qui transit par la plateforme ne soit versé pour le financement de projets fictifs ou qui n'auront pas d'impact économique ou social.
C'est pour cela que les prérequis pour la réussite de cette forme de financement résident à notre sens dans deux facteurs décisifs:
Maître Abdallah BENZEKRI : il faudra signaler que toute loi ne peut prétendre être complète . Une loi a besoin de vivre et d'être pratiquée pour se rendre compte de ses insuffisances et lacunes. La loi n° 15-18, que j'ai participé personnellement à mettre en œuvre comme consultant auprès du Ministère des finances, a fait l'objet de plusieurs études d'impact préliminaires et de certains benchmark avec des législations voisines ou comparables.
Laissons la vivre et nous verrons après quelles seraient les lacunes à combler. Pour ce qui concerne le financement des TPE et des startUps, il faut dire que par ailleurs, le crowdfunding a pas mal participé au financement des TPE, compte tenu des montants et de l'inexistence d'intermédiation bancaire.
Ceci dit, le développement dans ce sens me paraît devoir passer par des périodes de balbutiement et de reconnaissance, avant de passer à un stade de maturité.
Quels sont les prérequis pour en garantir un grand développement, surtout que la bourse et la banque alternative n'arrivent pas encore à répondre à la demande de la grande majorité des TPE, TPI marocaines ?
Maître Abdallah BENZEKRI : Le financement des TPE TPI marocaines reste le problème épineux par excellence. D'un coté, vous avez lesdites TPE qui souffrent d'un déficit de financement et du manque de la coopération des banques et des autres opérateurs agréés et d'un autre côté, vous avez les établissements de crédit qui se plaignent du manque de structures de gouvernance et de la transparence des dirigeants de ces TPE.
Le crowdfunding pourrait jouer ce rôle intermédiaire pour assurer le financement de démarrage et de premiers développement de certains projets d'investissement portés par des startUps et des porteurs de projets novateurs.
Ceci dit, comme il est prévu par la loi n° 15-18, un minimum de transparence et d'organisation sera dans tous les cas requis, car l'argent récolté via les plateformes de crowdfunding reste l'argent des épargnants, qu'il faudra rembourser selon les conditions requises et, même dans le cas du don via la plateforme, il y aura certainement des gardes fous réglementaires afin de préserver l'épargne des contributeurs et éviter que l'argent qui transit par la plateforme ne soit versé pour le financement de projets fictifs ou qui n'auront pas d'impact économique ou social.
C'est pour cela que les prérequis pour la réussite de cette forme de financement résident à notre sens dans deux facteurs décisifs:
- Tout d'abord, il faudrait que la liquidité drainée via les plateforme serve à financer avant tout des projets novateurs et porteurs de valeur ajoutée;
- Ensuite, il faudrait que lesdits projets portent en eux un minimum de transparence et d'organisation pour ainsi rassurer les contributeurs et éviter que le crowdfunding devienne le terreau du contentieux.