Réélection de Trump : quel avenir pour les droits des femmes ?


Rédigé par le Jeudi 7 Novembre 2024

Qu'est-ce qui peut inciter des femmes américaines à voter pour un homme accusé de misogynie et d'agressions sexuelles ?



Mercredi 6 novembre, c’est une vraie douche froide : Donald Trump est annoncé gagnant des élections américaines, et cela ne repose pas uniquement sur le soutien des hommes blancs conservateurs admirateurs d’Elon Musk.

Ces élections ont mis en lumière un véritable fossé entre les femmes et les hommes aux États-Unis. En général, les femmes sont davantage démocrates — 54 % d'entre elles ont voté pour Harris — tandis que les hommes sont plus souvent républicains, avec 54 % en faveur de Trump.

Cependant, on remarque que 44 % des femmes ont voté, de manière réfléchie, pour Donald Trump. Les statistiques ethniques autorisées aux États-Unis montrent que ces électrices sont principalement blanches, âgées de plus de 30 ans, et sans diplôme universitaire.

Il est légitime de s'interroger sur les raisons pour lesquelles tant de femmes ont choisi de voter pour un candidat ouvertement misogyne, d'autant plus dans une campagne où les enjeux liés aux femmes étaient au cœur des débats.

Plus troublant encore, qu'est-ce qui peut pousser à soutenir un homme accusé, et à plusieurs reprises condamné, pour des agressions sexuelles ? Qui sont ces "Trump Girls", prêtes à sacrifier leur vie, et même leur droit à l'avortement, pour voir Trump diriger le pays ?

La désinformation, au cœur de la stratégie de campagne de Trump ?

De nombreux experts en politique américaine tentent, depuis les résultats, de comprendre ce qui a poussé autant de femmes à voter pour Donald Trump.

Selon Marie-Christine Bonzom, spécialiste des États-Unis, interviewée dans Le Parisien, la question de l'avortement n'a pas été un facteur décisif pour faire basculer le vote féminin en faveur de Harris. Trump a su exploiter d'autres thèmes clés, tels que l'insécurité (notamment avec des déclarations comme "They're eating the dogs") et la lutte contre le "wokisme," perçu comme une menace pour l'Amérique, au même titre que la Chine.

Pour Trump, le terme "wokisme" englobe tout ce qui s’éloigne d’une pensée conservatrice et remet en question les anciens codes sociaux.

Cela inclut notamment ses attaques contre l'homosexualité et la théorie du genre. Pour les partisans de Trump, l’école publique serait responsable de diffuser de "mauvaises idées" aux enfants, les incitant à des comportements contraires aux valeurs religieuses. 

Il n’est un secret pour personne que 70 % de l’électorat de Donald Trump provient des communautés évangéliques, un groupe religieux particulièrement strict sur des sujets comme l’avortement et les valeurs modernes.

Ne mentionnez pas les Drag Queens devant ces religieux : pour eux, elles incarnent littéralement le mal.

Cette population est donc naturellement encline à soutenir un candidat prônant un retour aux valeurs traditionnelles — autrement dit, la femme au foyer et les hommes au travail. 

La communication centrée sur l'image de Trump, sa personnalité et son allure a également joué en sa faveur. Homme blanc, grand, riche, ayant réussi à faire prospérer sa fortune, ami d'Elon Musk, l’homme le plus riche du monde, marié à une épouse discrète, amateur de McDonald's et de Coca-Cola…

Trump incarne le "véritable" Américain, une figure presque caricaturale, mais qui trouve un écho inspirant. Il représente peut-être l’ultime incarnation vivante du "rêve américain", et ce modèle continue de séduire les hommes et femmes blancs.

Son style de communication a aussi joué un rôle clé. En se présentant comme un expert, il applique le principe du "Fake it until you make it", ce qui fonctionne particulièrement bien sur une population peu éduquée, souvent ancrée dans son comté.

On le croit, parce qu'il est un ancien président. On lui fait confiance, car il semble sûr de lui. On l’apprécie, car il exprime ses opinions sans filtre, sans jamais mâcher ses mots.
 

Quel impact aura la réélection de Trump sur la vie des femmes américaines ?

Le sujet majeur de cette réélection est, bien sûr, la question de l’avortement à l’échelle nationale. Dans certains États, la vie du fœtus est déjà considérée comme prioritaire par rapport à celle de la mère.

Peut-on envisager que cette réalité s’applique à tout le pays ? Oui. Avec six juges ultraconservateurs à la Cour suprême, tout devient possible (même les scénarios les plus inquiétants).

La question des discriminations envers les femmes pourrait devenir un enjeu central durant ce nouveau mandat. Le président élu semble totalement indifférent aux problématiques d'égalité dans le monde professionnel, et les femmes risquent d’être dévalorisées, notamment dans les secteurs perçus comme « très masculins ». Avec l'assouplissement des mesures visant à lutter contre le harcèlement au travail ou les inégalités salariales, les femmes pourraient se retrouver piégées dans des situations de harcèlement sans recours possible.

À l'échelle mondiale, le retour de Trump pourrait également avoir des conséquences négatives pour les femmes dans les pays en développement, notamment en réduisant les subventions américaines aux ONG. 

Mais ce qui pourrait être le plus inquiétant dans cette réélection, c’est l’effet d’inspiration que la politique ultra-conservatrice de Trump pourrait avoir sur le reste du monde.

Les États-Unis étant un modèle pour de nombreux pays occidentaux, cette victoire pourrait ouvrir la voie à d’autres candidats politiques tout aussi conservateurs et rigides sur des questions comme l’immigration.

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Journaliste sportive et militante féministe, lauréate de l'ISIC En savoir plus sur cet auteur
Jeudi 7 Novembre 2024
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