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Un nouveau massacre se produit sous les yeux du monde, face à une opinion publique indignée mais divisée : un Occident faussement scandalisé, et le reste du monde outré. Le gouvernement Netanyahou en perdition jette de l’huile sur le feu, provoque par sa politique d’expulsions une réaction des populations expulsées, puis des autres Palestiniens. Et c’est la guerre. Une énième. Qu’Israël remportera… Mais pour combien de temps encore ?
L’Etat hébreu a deux ennemis qu’il ne pourra vaincre, car ils sont hors de sa portée : le temps et la technologie.
Le « fonds de commerce » de sionistes est la Shoah. Il est vrai qu’un peuple qui perd en quelques années les deux tiers de son effectif ne peut qu’attirer l’empathie du genre humain, en plus de sa sympathie. Mais quand ce peuple prend appui sur ce drame pour pratiquer une politique d’apartheid (la référence est de Human Rights Watch, qui l’emploie 143 fois dans un récent rapport) et se jouer du droit international, il ne peut susciter que de la répulsion. Hantés par l’Holocauste, les Israéliens cherchent la « pureté » de leur « race », d’où la loi sur l’Etat-nation de 2018.
Or, à mesure que s’éloigne la 2nde Guerre mondiale et que disparaissent ses derniers témoins, de nouvelles générations adviennent, qui ne voient que les massacres, les affrontements extraordinairement asymétriques pour cause d’armements disproportionnés. Les jeunes d’aujourd’hui, abreuvés d’un web plus « démocratique », sont sur les réseaux et, en lieu et place des photos en noir et blanc laborieusement colorées des rafles, ghettos et camps de concentration d’hier, ils observent les images de la dévastation enragée qui a lieu aujourd’hui à Gaza, d’immeubles qui s’écroulent sous les impacts des missiles high-tech, de médias attaqués par des avions chasseurs de dernière génération, de familles entières qui périssent, et d’enfants, d’enfants, et encore d’enfants (des deux camps) qui périssent, déchiquetés, décapités par des obus intelligents, des missiles téléguidés, des bombes perforantes… auxquels répondent des roquettes artisanales et des fusils vieillissants…
Il y a trois catégories d’observateurs du conflit israélo palestinien : les pro-Israël qui ne changeront pas mais qui se renouvellent de plus en plus lentement, les anti-Israël qui ne changeront pas non plus, mais dont les rangs grossissent sensiblement, et les « gris » ; ceux-là prolifèrent avec les informations sur les réseaux. Sur les réseaux, les activistes anti-Israël et surtout les défenseurs des droits sont bien plus nombreux que les pro-Israël.
Tout cela changera fatalement, quoique progressivement, la perception de l’Etat d’Israël chez les jeunes et moins jeunes d’aujourd’hui. Depuis 80 ans, les médias occidentaux sont contrôlés par les amis d’Israël, lesquels contrôlent et triturent l’information, par le déni, le vocabulaire (« conflit », « roquettes », « terrorisme »…), la rétention (massacres tus, images de crimes de guerre dissimulées…) ou la manipulation. Aujourd’hui, tout est étalé aux yeux de tous.
Et si les gouvernements occidentaux soutiennent encore les sionistes israéliens, c’est parce que le travail de fond est effectué en amont par les médias qui façonnent leurs opinions publiques. Aujourd’hui, avec les réseaux sociaux, les échanges d’images, les hashtags et autres comptes et pages terriblement factuels, les opinions commencent à basculer, sous les poids combinés des photos et vidéos, de la démographie changeant la pyramide des âges, du brassage des cultures en Occident, du ras-le-bol des populations face aux crimes perpétrés sous leurs yeux... Cela prendra une génération ou même deux, cela occasionnera encore et toujours d’autres massacres, mais cela adviendra et Israël perdra la sympathie dont il bénéficie et le soutien (de moins en moins) inconditionnel des chancelleries occidentales sur lequel il s’appuie.
Exterminés par la brutalité nazie, les Juifs devraient comprendre que la force brute perd toujours… car la masse radicalisée qui fonde leur puissance ne saurait tenir indéfiniment à distance ou museler les innombrables populations en quête de justice et d’équité (et la crise Covid accélère le mouvement).
Enfin, l’erreur stratégique que commet le gouvernement israélien est ce message très embué qu’il adresse aux Etats signataires des Accords d’Abraham et à ceux qui voulaient y adhérer, un jour très prochain. Comment faire confiance à un Etat qui fait si peu de cas du droit et de leurs droits ? Et l’affection que dit porter Joe Biden à Israël ne saurait être définitive, inconditionnelle ni éternelle. Il ne faut pas oublier qu’il est démocrate et surtout âgé de 78 ans…
Comment donc ce « peuple d’élite », avec son intelligence collective et ses talents individuels, peut-il ignorer que le temps et la technologie jouent contre lui ? Comment peut-il encore s’accommoder de voir ses dirigeants conduire ses descendants vers l’abîme moral et l’opprobre universelle ?
La Thora : « Tu ne tueras pas, Dieu dit à Israël : mon peuple, ne soyez pas des assassins, ne vous associez pas avec des assassins, pour que vos enfants n'apprennent pas leur manière d'agir. Car, c'est le meurtre qui a amené sur terre les armes, provoqué les guerres et les conflits ». Puisse l’opinion publique israélienne lire, relire, et méditer cette ordonnance.
Un peu de raison, que diable, amis juifs… un peu de sérieux, dirigeants israéliens… à poursuivre ainsi, vous reculerez inexorablement dans les cœurs et les esprits, vous perdrez dans les réseaux sociaux, et il ne restera plus que les sinistres excités surarmés, qui seront tout simplement vaincus, par le temps et le nombre.
Rédigé par Aziz Boucetta sur https://panorapost.com