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Par Aziz Boucetta
Le Maroc vit une rude sécheresse, qui s’accumule et s‘aggrave d’année en année, mais le royaume est coutumier de cela. L’histoire du pays est en effet emplie de ce genre de phases, dans les années 1520, en 1597-1608, en 1613-14, et depuis, les sécheresses ont régulièrement frappé le pays, souvent accompagnées de calamités comme les famines, les épidémies et autres invasions de sauterelles. La dernière grande sécheresse avant l’actuelle remonte aux années 1980, quand le Maroc était désorganisé, sans moyens, sans politiques préventives (excepté celle des barrages), sans adhésion ou prise de conscience populaire… Le Maroc est donc coutumier de ces fléaux et durant des siècles, il a essayé de lutter contre leurs effets et conséquences.
Aujourd’hui, quel est l’état des lieux ? Selon le ministère de l’Equipement et de l’Eau, Les ressources en eau naturelles moyennes sont évaluées à 22 milliards de m3/an, soit l’équivalent de 600 m3/an/habitant en 2023. Ces 22 milliards se répartissent en 18 milliards pour les eaux de surface (ce qui reste des pluies après évaporation) et 4 milliards d’eaux souterraines. C’est peu mais cela reste correct, ou au moins gérable. Sur les 60 dernières années, 152 barrages ont été construits, assurant une capacité de stockage de près de 20 milliards de m3. Et la stratégie des transferts d’eau d’une région à l’autre, qu’on appelle aujourd’hui les autoroutes de l’eau, a commencé voici bien longtemps aussi.
Mais aujourd’hui, la situation est critique, et le ministre de l’Equipement et de l’Eau Nizar Baraka est sur tous les fronts dont celui, très important, de la communication, essayant de surnager sur des eaux de plus en plus rares. Ainsi, le taux de remplissage des barrages est aujourd’hui de 23,2%, contre à 31,7% à la même période l’année dernière, ce qui signifie en clair une retenue de 3 milliards de m3 d’eau, contre 5 milliards début 2022. Et comme il n’y a pas de pluie à l’horizon, ou dans le ciel, il faut s’attendre à de sombres moments. « Que d’eau, que d’eau ! », s’exclamait Mac Mahon devant les crues en France ; face aux barrages presqu’à sec et à une pluviométrie en souffrance, Nizar Baraka pourrait reprendre cette expression par « peu d’eau, peu d’eau ! ».
Les sombres moments commencent déjà dans...
plusieurs régions, dont celle de Casablanca-Settat. Le wali a en effet décidé d’émettre ses dix commandements, et sera certainement suivi par ses pairs dans les autres régions du royaume. Quels sont ces dix commandements ? Ton débit d’eau tu réduiras, ta voiture tu ne laveras point trois jours par semaine, au hammam tu n’iras point trois jours par semaine aussi, tes rues et avenues tu n’aspergeras pas, de gazon tu ne planteras pas, d’espaces verts et d’aires sportives tu n’arroseras pas, tu ne rempliras ta piscine qu’une fois par an, de puits et forages clandestins tu t’abstiendras, tes conduites et installations d’eau tu entretiendras et répareras, et l'eau tu en économiseras autant que tu pourras.
Il s’agit là des mesures urgentes, à court terme. Mais il y a aussi, en parallèle, les mesures à moyen terme et à long terme. Le moyen terme consiste à procurer de l’eau au pays, soit par les transferts et interconnexions hydriques du nord vers le sud, ou encore la construction d’usines de dessalement. Ces usines devaient en principe commencer à pousser sur nos littoraux depuis au moins 10 ans, et au nom du principe de reddition des comptes, un principe aussi beau que largement ignoré, il serait intéressant d’interroger et de demander des comptes à ceux qui étaient en situation de pouvoir dans les différents gouvernements de cette dernière décennie.
Aujourd’hui, quel est l’état des lieux ? Selon le ministère de l’Equipement et de l’Eau, Les ressources en eau naturelles moyennes sont évaluées à 22 milliards de m3/an, soit l’équivalent de 600 m3/an/habitant en 2023. Ces 22 milliards se répartissent en 18 milliards pour les eaux de surface (ce qui reste des pluies après évaporation) et 4 milliards d’eaux souterraines. C’est peu mais cela reste correct, ou au moins gérable. Sur les 60 dernières années, 152 barrages ont été construits, assurant une capacité de stockage de près de 20 milliards de m3. Et la stratégie des transferts d’eau d’une région à l’autre, qu’on appelle aujourd’hui les autoroutes de l’eau, a commencé voici bien longtemps aussi.
Mais aujourd’hui, la situation est critique, et le ministre de l’Equipement et de l’Eau Nizar Baraka est sur tous les fronts dont celui, très important, de la communication, essayant de surnager sur des eaux de plus en plus rares. Ainsi, le taux de remplissage des barrages est aujourd’hui de 23,2%, contre à 31,7% à la même période l’année dernière, ce qui signifie en clair une retenue de 3 milliards de m3 d’eau, contre 5 milliards début 2022. Et comme il n’y a pas de pluie à l’horizon, ou dans le ciel, il faut s’attendre à de sombres moments. « Que d’eau, que d’eau ! », s’exclamait Mac Mahon devant les crues en France ; face aux barrages presqu’à sec et à une pluviométrie en souffrance, Nizar Baraka pourrait reprendre cette expression par « peu d’eau, peu d’eau ! ».
Les sombres moments commencent déjà dans...
plusieurs régions, dont celle de Casablanca-Settat. Le wali a en effet décidé d’émettre ses dix commandements, et sera certainement suivi par ses pairs dans les autres régions du royaume. Quels sont ces dix commandements ? Ton débit d’eau tu réduiras, ta voiture tu ne laveras point trois jours par semaine, au hammam tu n’iras point trois jours par semaine aussi, tes rues et avenues tu n’aspergeras pas, de gazon tu ne planteras pas, d’espaces verts et d’aires sportives tu n’arroseras pas, tu ne rempliras ta piscine qu’une fois par an, de puits et forages clandestins tu t’abstiendras, tes conduites et installations d’eau tu entretiendras et répareras, et l'eau tu en économiseras autant que tu pourras.
Il s’agit là des mesures urgentes, à court terme. Mais il y a aussi, en parallèle, les mesures à moyen terme et à long terme. Le moyen terme consiste à procurer de l’eau au pays, soit par les transferts et interconnexions hydriques du nord vers le sud, ou encore la construction d’usines de dessalement. Ces usines devaient en principe commencer à pousser sur nos littoraux depuis au moins 10 ans, et au nom du principe de reddition des comptes, un principe aussi beau que largement ignoré, il serait intéressant d’interroger et de demander des comptes à ceux qui étaient en situation de pouvoir dans les différents gouvernements de cette dernière décennie.
Enfin, le long terme… sachant que l’agriculture engloutit à elle seule près de 90% de l’eau douce utilisée dans le royaume (77% en Espagne, 45% en France), il importe aujourd’hui, avant de questionner la politique agricole outrageusement hydrophage poursuivie depuis une quinzaine d’années, de revoir de fond en comble nos priorités en agriculture.
C’est à ce niveau-là qu’il faut agir, en changeant la manière actuelle de produire et en mettant en place une « doctrine agricole » nouvelle. Cette approche ne doit surtout pas être confiée au seul ministère de l’Agriculture qui, au vu de la situation actuelle, a singulièrement failli, et elle doit exclure les défenseurs de cette hérésie intellectuelle qu’est « la balance commerciale hydrique nationale » qui montre la situation sous un jour favorable et comporte le risque de creuser encore davantage notre déficit en nous approchant dangereusement du seuil de la soif !
Le Maroc dispose d’agronomes de renom, de chercheurs de talent, d’entreprises et d’administrations aguerries, mais tout cela ne servirait à rien s’il n’y a pas de réflexion nationale, à haut, très haut niveau, pour remédier à ce qui peut encore être réparé. La situation est en effet encore gérable, mais pour combien de temps ? Les peuples ont certes besoin de pain et de jeux, mais aussi d’eau.
Rédigé par Aziz Boucetta sur Panorapost
C’est à ce niveau-là qu’il faut agir, en changeant la manière actuelle de produire et en mettant en place une « doctrine agricole » nouvelle. Cette approche ne doit surtout pas être confiée au seul ministère de l’Agriculture qui, au vu de la situation actuelle, a singulièrement failli, et elle doit exclure les défenseurs de cette hérésie intellectuelle qu’est « la balance commerciale hydrique nationale » qui montre la situation sous un jour favorable et comporte le risque de creuser encore davantage notre déficit en nous approchant dangereusement du seuil de la soif !
Le Maroc dispose d’agronomes de renom, de chercheurs de talent, d’entreprises et d’administrations aguerries, mais tout cela ne servirait à rien s’il n’y a pas de réflexion nationale, à haut, très haut niveau, pour remédier à ce qui peut encore être réparé. La situation est en effet encore gérable, mais pour combien de temps ? Les peuples ont certes besoin de pain et de jeux, mais aussi d’eau.
Rédigé par Aziz Boucetta sur Panorapost