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Par Mustapha Sehimi
Par touches successives depuis des années, le Maroc a réarticulé sa politique étrangère. Un regard rétrospectif aide à appréhender l’évolution intervenue. Le premier temps, au lendemain de l’indépendance -et surtout dès le début des années 60-, a été celui d’une orientation pro-occidentale dans la bipolarité de la guerre froide entre l’Est et l’Ouest, ce que le Roi Hassan II avait résumé en ces termes: «Nous sommes du côté de l’Occident, un club, face à un clan...»
Dans un tel contexte, la question nationale des provinces méridionales ne pouvait qu’illustrer cette altérité géostratégique dès le milieu des années 70 avec l’arrêt de la CIJ en date du 16 octobre 1975 -le Sahara occidental n’était pas «terra nullius»- et des liens d’allégeance établis entre les tribus sahraouies et les sultans de l’empire chérifien.
Dix jours plus tard, le défunt souverain lançait l’historique Marche verte, une épopée... Le Maroc parachevait pratiquement son intégrité territoriale. Cette cause était insérée alors dans un autre registre, celui de la globalisation et de la guerre froide. Avec la chute du mur de Berlin, le 8 novembre 1989, les termes de référence de cette séquence ont changé. Et la cause nationale retrouvait sa véritable nature et sa dimension; elle n’était, au fond, que la traduction d’une politique d’hostilité récurrente de l’Algérie.
En 2023, cette même donnée demeure. Rabat se mobilisait dans toutes les instances régionales et internationales et l’appareil diplomatique œuvrait dans ce sens. S’est opérée ainsi une sorte de polarisation de la politique étrangère du Royaume sur la cause nationale: elle était prioritaire, même si elle était accompagnée par des paramètres de solidarité culturelle (monde arabe, Palestine, monde islamique, Afrique...) et une politique de partenariat et de coopération (UE, France, Espagne, États-Unis, etc.).
Lors des décennies écoulées, bien des changements sont intervenus. Ils sont nombreux et importants: un projet de société démocratique et moderniste, des chantiers de réformes et de grands travaux d’infrastructures, ainsi qu’un reploiement de la diplomatie vers de nouvelles latitudes continentales, asiatiques, latino-américaines.
La vision royale se nourrissait de plusieurs principes d’ailleurs liés entre eux: préserver et conforter les relations avec les partenaires traditionnels et promouvoir en même temps des rapports féconds avec d’autres relevant d’espaces distincts. C’est que le Maroc a enregistré et engrangé bien des avancées de développement et de démocratie en interne.
Il est aussi devenu une puissance dans la région et sur le continent; et tous ces acquis étaient servis et valorisés par le leadership personnel, moral et politique de Sa Majesté le Roi. La cause nationale était évidemment toujours la première, mais elle a bénéficié d’un rehaussement du Royaume qui a accru sa visibilité et sa crédibilité à l’international.
Avec l’initiative d’autonomie du 11 avril 2007 déposée au Conseil de sécurité et qualifiée depuis de «sérieuse, crédible et réaliste», n’était-ce pas une reconnaissance internationale par cette haute autorité onusienne de la légitimité de la marocanité des provinces sahariennes?
Avec les paramètres de négociation définis depuis, n’est-ce pas un processus de règlement sous l’égide des Nations Unies qui est devenu incontournable alors que l’Algérie et le mouvement séparatiste s’y opposent depuis octobre 2020?
Le rejet du format des tables rondes -il y en a eu deux- et même le rejet du cessez-le-feu par les séparatistes en novembre 2020 confondent ces deux parties aux yeux de la communauté internationale. Elles se mettent en dehors de la légalité internationale et des décisions du Conseil de sécurité.
Cela dit, le Maroc a aujourd’hui une offre diplomatique, si l’on ose dire, qui a pratiquement changé de nature et de portée. La question du Sahara marocain est désormais le prisme à travers lequel le Royaume appréhendera ses relations avec les autres États, comme l’a déclaré le Souverain dans son discours du 20 août 2022.
Une grille de lecture claire. La cause nationale a enregistré de grandes avancées au sein de la communauté internationale avec les positions des États-Unis, de l’Espagne, de l′Allemagne, l’obtention du soutien de 84% des 193 pays membres de l’ONU en faveur du processus de règlement de l’ONU et, partant, du projet marocain d’autonomie.
Dans un tel contexte, la question nationale des provinces méridionales ne pouvait qu’illustrer cette altérité géostratégique dès le milieu des années 70 avec l’arrêt de la CIJ en date du 16 octobre 1975 -le Sahara occidental n’était pas «terra nullius»- et des liens d’allégeance établis entre les tribus sahraouies et les sultans de l’empire chérifien.
Dix jours plus tard, le défunt souverain lançait l’historique Marche verte, une épopée... Le Maroc parachevait pratiquement son intégrité territoriale. Cette cause était insérée alors dans un autre registre, celui de la globalisation et de la guerre froide. Avec la chute du mur de Berlin, le 8 novembre 1989, les termes de référence de cette séquence ont changé. Et la cause nationale retrouvait sa véritable nature et sa dimension; elle n’était, au fond, que la traduction d’une politique d’hostilité récurrente de l’Algérie.
En 2023, cette même donnée demeure. Rabat se mobilisait dans toutes les instances régionales et internationales et l’appareil diplomatique œuvrait dans ce sens. S’est opérée ainsi une sorte de polarisation de la politique étrangère du Royaume sur la cause nationale: elle était prioritaire, même si elle était accompagnée par des paramètres de solidarité culturelle (monde arabe, Palestine, monde islamique, Afrique...) et une politique de partenariat et de coopération (UE, France, Espagne, États-Unis, etc.).
Lors des décennies écoulées, bien des changements sont intervenus. Ils sont nombreux et importants: un projet de société démocratique et moderniste, des chantiers de réformes et de grands travaux d’infrastructures, ainsi qu’un reploiement de la diplomatie vers de nouvelles latitudes continentales, asiatiques, latino-américaines.
La vision royale se nourrissait de plusieurs principes d’ailleurs liés entre eux: préserver et conforter les relations avec les partenaires traditionnels et promouvoir en même temps des rapports féconds avec d’autres relevant d’espaces distincts. C’est que le Maroc a enregistré et engrangé bien des avancées de développement et de démocratie en interne.
Il est aussi devenu une puissance dans la région et sur le continent; et tous ces acquis étaient servis et valorisés par le leadership personnel, moral et politique de Sa Majesté le Roi. La cause nationale était évidemment toujours la première, mais elle a bénéficié d’un rehaussement du Royaume qui a accru sa visibilité et sa crédibilité à l’international.
Avec l’initiative d’autonomie du 11 avril 2007 déposée au Conseil de sécurité et qualifiée depuis de «sérieuse, crédible et réaliste», n’était-ce pas une reconnaissance internationale par cette haute autorité onusienne de la légitimité de la marocanité des provinces sahariennes?
Avec les paramètres de négociation définis depuis, n’est-ce pas un processus de règlement sous l’égide des Nations Unies qui est devenu incontournable alors que l’Algérie et le mouvement séparatiste s’y opposent depuis octobre 2020?
Le rejet du format des tables rondes -il y en a eu deux- et même le rejet du cessez-le-feu par les séparatistes en novembre 2020 confondent ces deux parties aux yeux de la communauté internationale. Elles se mettent en dehors de la légalité internationale et des décisions du Conseil de sécurité.
Cela dit, le Maroc a aujourd’hui une offre diplomatique, si l’on ose dire, qui a pratiquement changé de nature et de portée. La question du Sahara marocain est désormais le prisme à travers lequel le Royaume appréhendera ses relations avec les autres États, comme l’a déclaré le Souverain dans son discours du 20 août 2022.
Une grille de lecture claire. La cause nationale a enregistré de grandes avancées au sein de la communauté internationale avec les positions des États-Unis, de l’Espagne, de l′Allemagne, l’obtention du soutien de 84% des 193 pays membres de l’ONU en faveur du processus de règlement de l’ONU et, partant, du projet marocain d’autonomie.
Enfin, la nouvelle vision de la politique étrangère. De quoi s’agit-il? Du fait que le Maroc se distingue par une forte valeur ajoutée à propos de grands défis continentaux et internationaux: changement climatique, énergies renouvelables, hydrogène vert, régulation de l’immigration, lutte antiterroriste, sécurité, islam tolérant et modéré, coopération sud-sud, etc.
Sur ces bases-là, un nouveau paradigme a fait sa place, celui du partenariat stratégique.
En visite ces derniers jours à Rome puis à Berlin, le ministre des Affaires étrangères, Nasser Bourita, a évoqué avec ses interlocuteurs officiels la question du Sahara marocain, mais sans que celle-ci donne lieu à de laborieux échanges: les deux pays ont déjà tranché à cet égard au printemps 2022 en apportant leur ferme soutien au projet marocain d’autonomie.
Et la substance des entretiens était ailleurs: elle était axée sur les voies et les modalités d’un partenariat stratégique multidimensionnel. Cette doctrine a des références et un contenu: des valeurs communes, un attachement à la démocratie, une volonté de soutenir le multilatéralisme et le droit international, un monde multipolaire régi par le droit et le respect des souverainetés, la confiance, le respect, la transparence, une réponse aux défis mondiaux (paix, sécurité, protection de l’environnement, solidarité, etc.).
Le Maroc a une claire vision du contenu de ce partenariat stratégique qu’il appelle de ses vœux et qui est devenu pratiquement un marqueur de sa diplomatie. Il s’articule autour de plusieurs piliers.
Le premier d’entre eux a trait au dialogue politique devant offrir une plateforme de discussion et de consultation sur les questions stratégiques d’intérêt mutuel, y compris les questions de sécurité et de développement régionales et internationales.
Un autre pilier intéresse la coopération sécuritaire pour contrer les menaces à la sécurité nationale et internationale. Autre fondement: la politique du climat avec une volonté commune de plaider en faveur d’un engagement international ambitieux pour combattre les effets du changement climatique.
Il faut également mentionner la coopération au développement (formation, emploi, climat et énergie, gestion des ressources en eau...). La coopération économique à renforcer et à élargir avec un véritable transfert de savoir-faire et de technologie est un autre pan. Enfin, les domaines de la culture, de l’éducation et de la recherche pour la promotion du développement humain et économique.
L’ambition qui doit être partagée est celle de ne plus se limiter à un bilatéralisme traditionnel. Elle entend s’inscrire à un niveau qualitatif élevé: celui d’un partenariat stratégique global, une nouvelle dynamique de la diplomatie marocaine en première ligne à cet égard.
Rédigé par Mustapha Sehimi sur le 360