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Par Mustapha Sehimi
Sur l’écologie et le climat, il a publié deux exhortations majeures sur les questions environnementales. Il fait de l’écologie un axe central de son enseignement, recommandant une approche globale liant protection de l’environnement et justice sociale. Pour ce qui est de l’exclusion, le Souverain pontife s’impliquait en faveur du «développement humain intégral», englobant également les périphéries de la pauvreté, et plaidait ainsi pour une aide au développement plus équitable.
Des initiatives qui témoignent de son engagement: porter le message de l’Église aux marges de la société et promouvoir la justice sociale à l’échelle mondiale. Par ailleurs, la diplomatie pontificale fut très active sur les dossiers liés au Moyen-Orient, à l’Afrique, à l’Asie et à l’Europe, notamment dans les régions de crise. Elle s’efforçait de répondre aux crises humanitaires mondiales, telles que les conflits en Syrie, au Soudan du Sud et au Congo. Pour la question des chrétiens d’Orient face aux persécutions, le Pape a mobilisé une aide humanitaire importante, couplée à une politique d’accueil des réfugiés.
Dans les tensions géopolitiques mondiales, le Pape a joué également un rôle actif, adoptant une approche diplomatique complexe reflétant les changements et les mutations dans l’équilibre mondial du pouvoir. Il a ainsi fait des gestes de rapprochement envers Pékin et Moscou. Dans le dossier chinois, il faut souligner l’accord entre le Saint-Siège et la République populaire concernant la nomination des évêques, signé en septembre 2018 et renouvelé en octobre 2024, jusqu’à 2028. Pour ce qui est de la guerre en Ukraine, le Saint-Siège a dû maintenir un équilibre délicat entre ses relations avec le patriarcat de Moscou et son soutien à la souveraineté ukrainienne: il a reconnu ce pays comme victime d’agression et appelé à une solution diplomatique et à des négociations. Il s’est toutefois concentré sur des objectifs humanitaires, plutôt que sur une médiation directe entre Moscou et Kiev. Des résultats concrets ont pu être enregistrés dans les efforts du Vatican, comme la libération de 388 mineurs ukrainiens et celle de 10 prisonniers.
«Volonté de dialogue, de médiation et d’engagement envers la paix: tel était le crédo de la diplomatie vaticane sous le pape François.»
Dans un autre périmètre, il faut s’arrêter sur son approche avec les pays du Sud global. Le Pape s’est ainsi attaché à une vision géopolitique particulière: celle d’une attention aux «périphéries» du monde. Une rupture avec ce que l’on pourrait appeler l’eurocentrisme traditionnel du Vatican, pour s’intéresser davantage aux pays du Sud. Originaire d’Argentine, Jorge Mari Berboglio a été marqué par son expérience en Amérique latine, notamment la «théologie du peuple» -variante argentine de la théorie latino-américaine de la libération- et la proximité avec les plus démunis. Son pontificat a mis en avant une Église humble, engagée et solidaire, levier d’action de la diplomatie vaticane en faveur des pays du Sud. Il a ainsi fait une cinquantaine de déplacements: au Maroc, en mars 2019, avec l’Appel d’Al Qods lancé avec SM le Roi, Amir Al-Mouminie; aux Émirats arabes unis, en Irak, en Indonésie, au Timor oriental ou encore à Singapour en 2024.
Sous son pontificat, le Vatican a cherché à dissocier le catholicisme de l’image d’une religion occidentale. Comment? En effectuant des visites dans des zones négligées par ses prédécesseurs (Centrafrique, Mozambique ou Madagascar), en favorisant l’émergence d’Églises catholiques locales et en nommant des cardinaux issus de pays du Sud. Parmi les 137 cardinaux nommés depuis 2013, pas moins de 67 sont issus des pays du Sud global (17 Africains, 26 d’Amérique latine, 17 d’Asie…).
Volonté de dialogue, de médiation et d’engagement envers la paix: voilà le crédo de la diplomatie vaticane sous le pape François. Une action qui a reposé sur un soft power moral et une influence spirituelle pour promouvoir le dialogue et la résolution pacifique des conflits.
Par Mustapha Sehimi / fr.le360.ma/