Abject, barbare, lâche ! Il n’y a pas de mot assez fort pour qualifier l’abominable assassinat perpétré contre Samuel Paty, professeur d'histoire-géographie à Conflans-Sainte-Honorine dans les Yvelines.
La réaction a été immédiate dans tout l’hexagone et au-delà de ses frontières, pour condamner unanimement un acte inique et monstrueux dicté par la seule vindicte d’un fanatisme religieux, terreau de l’islamisme radical et dangereux qui incite à la division, la haine et la violence.
Les maudites caricatures qui avaient valu au journal satirique Charlie Hebdo un assaut meurtrier dans ses locaux en janvier 2015 (17 morts), continuent à sévir et faire couler le sang toujours pour des motifs obscurantistes, punir les profanateurs d’un islam fondamentaliste qui a du mal à trouver son point d’ancrage dans un Etat plus que jamais attaché à ses valeurs républicaines, sa laïcité et sa liberté d’expression.
En France, le texte fondateur des libertés publiques place la religion au rang des opinions au même titre que celles assujetties à la critique, la satire ou la moquerie.
C’est la pierre angulaire et l’essence même de toute démocratie, fini le temps où l’impiété ou le blasphème pouvaient mener son auteur à l’échafaud. Le dernier cas d’exécution pour délit de blasphème étant celui du Chevalier de La Barre, décapité en 1766 à l’âge de 21 ans simplement pour avoir manqué de saluer une procession religieuse.
Face à la dérive idéologique mortifère qui a conduit un jeune tortionnaire Tchétchène au meurtre de Samuel Paty, tous les musulmans de France se sont trouvés plongés dans un inextricable embarras, réfutant tout amalgame entre leur identité religieuse ou nationalité et l’innommable acte terroriste de Conflans.
Et l’on se demande à juste titre, si la frange d’islamistes rigoristes ou salafistes qui se proclame d’une culture musulmane sunnite et pacifiste, a sa place dans le pays des Droits de l'Homme et de la Philosophie des Lumières.
Faut-il encore pour cela qu’elle se soumette à ses lois et ses valeurs de façon constante et inconditionnelle sans céder à la provocation si choquante soit-elle. Néanmoins, bien que l’Islam soit la religion de paix par excellence, celle qui prône la tolérance pour une meilleure coexistence entre les peuples, il y a des limites à ne pas franchir.
Un exercice on ne peut plus difficile dans uns contexte politique et social suffisamment confus pour qu’une islamophobie maladive et quasi virale prenne racine dans l’imaginaire des français de souche, des hautes sphères du pouvoir jusqu’aux bancs des écoles en passant par les médias où de partout les musulmans de toute obédience sont injustement pointés du doigt et stigmatisés dans leur foi et leur culture, toujours au nom de la sacro-sainte « laïcité et liberté d’expression ».
Une question se pose :
Ce professeur intrépide et déterminé à « prêcher » cette liberté d’expression, n’a-t-il pas bafoué la laïcité au sein même d’une structure où la religion n'a pas sa place ?
Ignorait-il qu’en outrepassant ses prérogatives, il pouvait heurter des sensibilités et attiser la haine et la division religieuse et raciale ?
Au lendemain du crime sordide de Samuel Paty que bien évidemment nul ne peut cautionner, des initiatives réaffirment le droit à l’exercice et l’enseignement de la liberté d’expression incluant la caricature comme composante fondamentale.
C’est ainsi que la présidence des régions de France a lancé une initiative forte et symbolique visant la mise en place d’un livre pédagogique regroupant toutes les caricatures religieuses et politiques parues dans la presse nationale, un livre qui sera publié et diffusé dans tous les lycées français dès la rentrée scolaire.
Cette décision prise avec l’aval du ministre de l’éducation nationale et la complaisante bénédiction du président Macron, n’a pas pu contenir ce dernier à enfoncer le clou en martelant avec véhémence et détermination dans son discours à la Sorbonne : « Nous ne renoncerons pas aux caricatures… », allusion faite à celles du Prophète Muhammad (SLWS), nous l’avions tous bien compris.
En terre judéo-chrétienne, n’est-il pas prétentieux d’affirmer pouvoir gagner la guerre contre l’islamisme radical quand on promet ne pas renoncer aux caricatures fussent-elles offensantes pour les quelques 2 milliards de musulmans disséminés à travers le monde ?
Des déclarations tonitruantes et malvenues surtout après celles faites il y a quelques semaines en Turquie, selon lesquelles « l’islam est en crise » ou encore la nécessité de «structurer l'islam» notamment par la future loi contre le « séparatisme islamiste ».
Autant d’annonces qui n’ont pas manqué de froisser une grande majorité parmi la communauté musulmane de France et d’ailleurs, vu leur caractère impertinent et provocateur ne prouvant qu’une volonté délibérée d’aviver la colère et le ressentiment.
Est-ce cela le nouveau visage de la république ?
Par Jamal Benaddou Idrissi