Le fait démographique…


Aziz Ghali président de l’organisation marocaine des droits de l’homme (OMDH) à sévèrement critiqué la participation des hommes et femmes appartenant à l’éducation nationale dans l’opération de recensement général de la population de l’habitat (RGPH) qui aura lieu en septembre, affirmant que leur place est à l’école, et a qualifié ce personnel mobilisé pour cette noble mission de « Attacha », ou travailleurs à la tâche, à la recherche d’un indemnisation ridicule pour effectuer cette mission.



Par Rachid Boufous

Ghali qui fait beaucoup de sorties médiatiques pour tirer sur tout ce qui bouge selon le principe très marocain « Ma Laabinch », a raté une nouvelle fois, l’occasion précieuse de la fermer.

 
Le RGPH qui a lieu tous les dix ans est un formidable outil statistique piloté par le Haut Commissariat au Plan (HCP) et permet d’avoir un diagnostic détaillé de la société marocaine à travers le comptage de la population, de sa localisation géographique, de son niveau d’éducation, de son activité et des lieux où elle habite ainsi que le niveau d’équipement des ménages. Pour nous les urbanistes mais aussi pour beaucoup de chercheurs, de sociologues ou de décideurs, cet outil statistique revêt un grand intérêt scientifique et stratégique.


Il permet en urbanisme par exemple de faire des projections fines sur les besoins futurs des villes en termes d’équipements en fonction des densités de population constatées, mais aussi avoir une radiographie précise, en fonction des données des décades précédentes sur les migrations des populations dans un même périmètre urbain, mais aussi à l’échelle du territoire national.


C’est une excellente base de données qui permet d’apprécier le développent économique des ménages en fonction par exemple, du taux d’équipement des logements et de la nature de ces derniers (télé, téléphone, wc, cuisine, réfrigérateurs, locataires, propriétaires, cohabitants, villas, appartements, maison marocaine, bidonville,…etc), mais aussi renseigne sur le taux de fécondité des ménages, le nombre d’enfants, et surtout le niveau scolaire des recensés, ainsi que leur occupations professionnelles ou non selon les cas.

 
Cette opération fait appel à des dizaines de milliers de fonctionnaires, d’instituteurs et d’agents d’autorité, réquisitionnés par décret à cet effet. Pour cette enquête nationale, les recenseurs touchent une indemnité forfaiture quotidienne.

 
La sincérité du recensement est primordiale, car elle permet de voir l’évolution du pays depuis que le RGPH existe.
 
Celui de 2024 est très important, car il permettra dans quelques mois avec la publication des chiffres par le HCP de comparer la société marocaine depuis 1960 et son niveau de développement. Nous sommes passés de 7 enfants par femmes en 1960 à 2 en 2014 et de 15% de populations urbaines à presque 58% aujourd’hui, cantonnées en grande partie sur une bande littorale allant d’El Jadida à Casablanca.

 
C’est le RGPH qui a démontré l’attractivité des territoires mais aussi leur niveau de pauvreté. Cela permet aux gouvernements successifs de mieux calibrer les politiques publiques et l’intervention de l’Etat à travers le Royaume. L’identité des recensés reste confidentielle mais la sincérité de leur réponses est importante afin d’avoir des chiffres exacts. À cet égard une campagne de sensibilisation des populations est importante à mener afin de les rassurer, car le RGPH est important pour tous. Le fait de mentir ou de cacher des informations aux recenseurs ne sert à rien, car le recoupement de données est de plus en plus possible grâce aux IA et la digitalisation des données personnelles, toutefois les réponses données de manière sincère, permettent d’éviter de perdre du temps.


Mêmes les pouvoirs publics ne peuvent plus manipuler les chiffres comme avant, car les statistiques sont d’abord une science exacte et des incohérences de chiffres ont été relevées par le passé, ce qui a donné lieu à des corrections. Il ne faut pas avoir peur des chiffres du recensement quels qu’ils soient. À titre d’exemple : nous constatons que les femmes marocaines font moins d’enfants, les jeunes se marient très tard et qu’il y’a plus de logements occupés par rapport aux ménages existants.


Cela démontre une explosion des petites surfaces pour ce qui est des logements et plus de célibataires ou de femmes divorcées qui occupent des logements, ce qui est corroboré par les chiffres du RGPH sur la nature des logements occupés.

 

Grace au RGPH aussi nous avons pu démontrer que Rabat, la capitale du royaume a perdu 100.000 habitants entre 2004 et 2014 en faveur des villes périphériques comme Salé, Temara, Skhirate, Sidi Allal Bahraoui, Ain Aouda, Tifler, Khemisset, Kenitra, ou ces populations se sont redéployés car les taux d’accroissement des ménages dans la capitale est le même que le reste des villes citées, sauf que les conditions de vie des enfants arrivés à l’âge adulte ne peut plus de faire dans le territoire de Rabat, ou le foncier est devenu trop cher et le prix des appartements et leurs locations, hors de prix.


Pour sue la capitale du Royaume continue de garder ses habitants d’origine tout en recevant de nouvelles population, il est primordial d’ouvrir de nouvelles zones à l’urbanisation ou de donner plus de hauteur dans les quartiers intra-muros de la ville, afin de ne pas la transformer en ghetto pour riches. C’est l’un des enseignements importants du RGPH.

 
Le recensement peut aussi avoir des répercussions politiques. Ainsi Emmanuel Todd remarqua en 2006 en travaillant sur la démographie au Maroc que notre pays avait atteint la transition démographique plus rapidement qu’en France qui a mis 160 ans à l’atteindre alors que le Maroc n’a mis que 23 ans de 1983 à 2006.

 
La transition démographique est le processus historique par lequel une population passe d'un régime démographique caractérisé par un taux de mortalité et un taux de natalité élevés à un nouveau régime caractérisé par un taux de mortalité puis un taux de natalité faibles. Ce type d'évolution a été observé à partir de la fin du 18eme siècle en France et au Royaume-Uni, puis dans l'ensemble des autres pays au cours des trois siècles suivants.


C'est une composante de la modernisation ou du développement socio-économique. Emmanuel Todd avait même prédit à l’époque pour le Maroc comme pour des pays comme la Tunisie, l’Algérie ou L’Égypte, que des bouleversement importants allaient se produire sous forme de revendications sociale et politiques avant 2020. Le printemps arabe et le Hirak sont la preuve de ce fait démographique sur les pays du Maghreb…

 
Todd avait aussi prédit la chute de l’union soviétique rien qu’en étudiant la démographie de ce pays dans un livre resté fameux « La Chute Finale », paru en 1976, soit 15 ans avant l’effondrement de l’URSS. Dans cet ouvrage, Emmanuel Todd rend compte de la complète fausseté des statistiques officielles soviétiques et aborde le sujet par des méthodes détournées tel un archéologue. Il prédit ainsi, avec une grande justesse, l’écroulement du bloc de l’Est sous la pression des classes éduquées, à forte conscience politique, de la partie européenne de l'empire soviétique.

 
Il rend compte de la complète fausseté des statistiques officielles soviétiques et aborde le sujet par des méthodes détournées tel un archéologue. Par exemple, plutôt que de prendre les chiffres bruts (forcément surestimés ou sous-estimés selon les nécessités de la propagande), il regarde plutôt les tendances que ces statistiques ne peuvent totalement dissimuler. En outre certains indicateurs comme les taux de suicides, même corrigés à la baisse, sont tellement énormes qu’ils suggèrent une profonde souffrance psychologique de la population. En particulier, il constate la hausse de la mortalité infantile en URSS, fait unique pour un pays industrialisé et développé, d'où il déduit que toute sa structure technique et industrielle est en train de régresser vers une décrépitude irréversible…

 
En recensant aussi les populations habitant dans le bidonvilles, le RGPH permet de voir clairement quel territoire connaît une prolifération de ce fléau en comparant les chiffres des les anciens recensements et en les croisant avec le nombre de population. Le RGPH, grâce au recoupement des information par village, ville, région et territoire demeure un formidable outil d’appréciation de ce qui doit être fait pour juguler le fait démographique qui est aujourd’hui le principal frein au développement serein et harmonieux de notre pays. Il faut non seulement encourager toutes les populations à y participer mais aussi faire en sorte que toutes les données statistiques soient accessibles en libre accès.

 
Alors si les gens préposés au recensement viennent toquer à votre porte, donnez-leur le maximum d’informations demandées après s’être assuré de leur identité, des margoulins cherchant toujours à s’infiltrer à leur place, cela nous aidera énormément à comprendre l’évolution de notre pays et proposer des solution efficaces à son développement.

 
Quant aux dénigreurs professionnels de type Ghali,que l’on retrouve principalement dans l’extrême gauche locale, ils ne changeront rien à la donne, le fait démographie est déjà là et c’est grâce aux instituteurs que le RGPH est une réussite, n’en déplaise aux oiseux et aux vaseux…
 
Rédigé par Rachid Boufous
 


Jeudi 15 Aout 2024

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